Le transport moyen des eaux du Rhône est :
en alluvion suspendue •! (>8k» Sl!'-
en alluvion dissoute 30
ensemble 198
Disons 200ks par seconde. Soit, par année, 6300 mille tonnes. Si
nous donnons à cette alluvion la densité moyenne de 2.68, ces
6300 mille tonnes représentent 2350 mille m3.
Le Rhône a donc dans l’année 1886, enlevé à son bassin d’alimentation
une quantité de matières, soit à l’état de poussière impalpable, soit
à l’état de solution, équivalant à 2350 mille m3. Or son bassin d’alimentation
est de 5383km2. Ce volume, réparti sur cette surface, représente
une couche de 0.44mm, moins d’un demi millimètre.
Il y aurait à ajouter à cette quantité celle qui correspond à l’alluvion
grossière charriée par le fleuve. Je n’ai pas les éléments qui me permettraient
d’en calculer la valeur pour le Rhône, mais, comme nous
l’avons dit, elle ne doit pas être très considérable. Heim a évalué la
quantité d’alluvion grossière apportée par la Reuss dans le lac des
Quatre-Cantons à un volume correspondant à l’ablation de 242m3par an
et par kilomètre carré du bassin d’alimentation, ( ‘) ce qui équivaut à une
couche annuelle de 0.24“™ sur la surface de ce bassin. Si nous admettons
la même valeur pour le Rhône du Valais, et si nous supposons que
les chiffres obtenus en 1886 représentent des valeurs moyennes, nous
aurions pour l’ablation totale en alluvion grossière, alluvion impalpable
et alluvion dissoute, une quantité annuelle équivalant à 0.44 -f 0.24
'âz 0.68mm de la surface du bassin d’alimentation. Il faudrait à l’érosion
du Rhône et de ses affluents une durée de 1470 ans, disons 1500 ans,
pour enlever, sur l’ensemble du bassin, une couche d’un mètre d’épaisseur.
(2)
Ne nous occupons maintenant que de l’alluvion en suspension, l’ai—
luvion impalpable qui se déposera dans le Léman quand les eaux du
Rhône s ’y clarifieront, et qui en comblera le bassin. A 168 kilogram-
(’) A. Heim. Gletscherkùnde, p. 365.
(2) N’oublions pas que cette érosion est localisée dans une très petite partie du
bassin d’alimentation du fleuve, sur les berges des torrents et rivières, sur les
parois dégarnies de végétation et exposées aux ravinements de la pluie, enfin dans
les lits des glaciers. Là, l’érosion est souveraine et enlève de puissantes masses de
matériaux.
mes par seconde, .valeur moyenne des 12 valeurs mensuelles, cela
représente, pour l’année 1886, un transport de 14 515 tonnes de
mille kilogrammes par jour, 5297 mille tonnes par an.
Pour la densité de cette alluvion, nous lui donnerons celle de l’argile
du Léman qui en est essentiellement formée, soit 2.68. Avec cette
densité, 5297 mille tonnes représentent un volume de 1976 mille m3;'
soit environ 2 millions de .mètres cubes.
En discutant la signification de ce chiffre, je pourrais montrer que,
vu les. circonstances climatériques de l’année 1886, le transport devait
avoir, cette année-là, une valeur moyenne ; que dans ce chiffre n’entre
pas le transport effectué sur le lit du fleuve par le charriage des
graviers et galets qui doit représenter une' valeur notable ; que dans
cette année il n’y a pas eu de transports extraordinaires dus à un ébou-
lement de montagne, à des glissements de terrains, à la rupture de
lacs temporaires, etc., catastrophes qui amènent au lac, en quelques
heures, des milliers de mètres cubes d’alluvion. J’en puis conclure que
le chiffre de 2 millions m3 est un minimum, et que, année moyenne, le
transport total de l’alluvion impalpable, sableuse et graviéreuse, doit
dépasser notablement cette valeur. Admettons-la simplement comme
une valeur minimale.
Cependant, comme nous savons que le transport de l’alluvion grossière
du Rhône n ’est pas relativement très considérable, nous pouvons
nous baser sur ce chiffre pour essayer le calcul de la durée probable
du remplissage du creux du Léman. Nous savons que le bassin
du Rhône représente les 0.72 du bassin total d’alimentation du lac;
nous pouvons, sans trop forcer les analogies, admettre que les affluents
directs ont un pouvoir de transport plus ou moins proportionnel à leur
superficie, et évaluer, année moyenne,
le transport du Rhône à 2000 mille m3
le transport des petits affluents du lac à 800 »
le transport total des affluents du Léman à 2800 »
De là, connaissant le volume du Léman, 89 mille millions m3, unè
division nous donnera la durée probable du comblement du lac. Nous
arrivons à 32 000 ans.
Ce chiffre n’a aucune prétention à la précision; il est basé sur l’étude,
bien insuffisante, du transport de l’alluvion impalpable du Rhône
d’une seule, année, qui nous paraît une année moyenne pour les circonstances
météorologiques ; il néglige le transport du Rhône en alluvion