L’eau s’élève en certaines .régions du lac pendant qu’elle s ’abaisse
dans d’autres régions. J’appelle ces changements dans le niveau de
l’eau des dénivellations.
Dans cette partie de notre livre, nous ne traiterons que des v a r i a t
io n s d e h a u t e u r de l’eau.
Le lac étant un bassin où l’eau des affluents entre, et d’où l’eau
sort par l’émissaire, toute différence entre le débit des affluents et celui
de l’émissaire se traduit par une variation de hauteur. Le débit
des rivières s’exprimant en mètres cubes à la seconde, nous avons le
rapport suivant :
S étant la superficie du lac en mètres carrés ;
h’ la, variation de hauteur du lac en mètres ;
t la durée de la variation en secondes;
D la différence de débit entre les affluents et l’émissaire, exprimée
en mètres cubes à la seconde (m3 sec)_
h ’ X S
D —J - — - v. '
t
Pour le lac Léman dont la superficie est de 582.4km2, toute variation
■ d e lmm représente une différence entre l’entrée et la sortie de 582 4001113 ;
toute variation de l mm en 24 heures représente une différence de débit
d e 6.74m3sec entre les affluents et l’émissaire; toute variation de l mm
par heure, une différence de débit de 161,8m3 sec. Si la variation de
hauteur est en crue, c’est le débit des affluents qui‘1’emporte; si elle
est en décrue c’est le débit de l’émissaire qui est le plus fort.
Tout lac. est soumis à des variations de hauteur de deux types
différents :
Les unes sont p é r io d iq u e s , et sont régies par les variations périodiques
du débit des affluents.
Les autres sont a c c id e n t e l l e s ou irrégulières, et sont causées
par les variations accidentelles, naturelles ou artificielles du débit des
affluents et de l’émissaire
Nous avons donc à étudier sur notre lac le caractère de la courbe
normale de variation périodique, l’amplitude de ces variations périodiques,
et en second lieu, les variations accidentelles qui modifient
cette courbe normale.
LIMNIMÉTRIE DU LÉMAN
Sur un lac sauvage, dont l’émissaire n’a point son débit réglé par
des barrages, et dont la puissance d’écoulement est fonction directe
de la hauteur des eaux, les variations de hauteur de la nappe suivent
exactement les variations du débit des affluents. Ceux-ci étant soumis
à des crues et décrues importantes dues aux différences des saisons,
le lac subit de fortes crues et décrues annuelles, qui peuvent être
incommodes pour les riverains; exagérées par des.causes accidentelles,
les trop hautes eaux inondent les bords du lae', les trop basses
eaux gênent la navigation, ou sont insuffisantes pour la marche des
moteurs hydrauliques placés sur le cours de l’émissaire. L’industrie
de l’homme cherche à réduire autant que possible l’amplitude de ces
variations périodiques et accidentelles, et à assurer à la hauteur du
lac une s'tabilité toujours plus parfaite.’
Tel est le cas du lac Léman qui, depuis l’année 1713, est transformé
de plus en plus en un lac artificiel, dont la hauteur est réglée par les
digues et barrages de Genève. La digue de la M a c h in e d e s f o n t
a in e s a eu d’abord pour fonction d’empêcher la chute excessive des
basses eaux et de permettre la navigation à l’entrée du port de Genève,
tout en assurant la sécurité de la ville contre un ennemi qui aurait
pu profiter des eaux guéables pour l’envahir ; en même temps
ces digues, emmagasinant l’eau du lac, réservaient une chute suffisante
pour les roues hydrauliques, nécessaires à l’alimentation d’eau
de la ville. A partir de 1713 - S e t probablement même avant, car les
nombreux moulins du Rhône établis de temps immémorial dans la
traversée de Genève, avaient certainement -des barrages de fonction
analogue, le lac Léman n’est plus un lac naturel, et ses variations
sont en partie altérées, -ou réglées, suivant le point dé vue auquel on
les considère, en tous cas diminuées d’amplitude par le jeu des digues
de Genève.
Mais ces digues et barrages, bien primitifs et impuissants dans le
siècle dernier, ont été perfectionnés et complétés à mesure que les
besoins de la ville réclamaient un plus grand volume d’eau pour l’alimentation,
et une plus grande profondeur.d’eau pour la navigation.
Les machines hydrauliques de Genève de 1820,1840,1856,1863,1871