sentent un amas de boue épouvantable : car déjà, quoique la
saison ne fût pas très-avancée, et que les pluies n’eussent encore
duré que quelques jours, il était souvent impossible d arriver,
du milieu de la rue vers lés maisons, sans faire un détour considérable
pour chercher quelques lambeaux de chaussée. La disposition
même des rues annonce combien la ville doit être marécageuse;
car dans les parties les plus frequentees, on a eié
obligé de construire au milieu des espèces de chaussées, composées
de'poutres de bois placées transversalement, et qui se
trouvent élevées de deux ou trois pieds au-dessus du sol : on a
de même exhaussé le terrain auprès des.maisons, et il en té-
sulte une espèce de trottoir, tantôt en pierres, tantôt en bois,
et assez souvent en terre battue.
On conçoit facilement que des maisons qui n’ont que le rezr
de-chaussée, placées de chaque côté d’une large rue, dont tout
le milieu est boueux, ne peuvent donner un grand agrément à
la ville, qui, dès lors, ressemble tout-à-fait à un village, et ne
s’en distingue réellement que par l’emplacement considérable
qu’elle occupe. Les habïtans sont luthériens, et par conséquent
les églises n’offrent aucunluxe de décoration ni intérieure ni extérieure;
on en bâtissait cependant une à mon passage à l’extrémité
nord de la grande rue, à laquelle on a voulu donner une
certaine élégance ; mais elle sera encore trop écrasée pour être
réellement agréable : au reste, il fallait bien qu elle fut a 1 unisson
de tout ce qui l’entoure, et une église élevée dê la même
construction aurait été assez ridicule au milieu des bàtimens
voisins. Il n’y a aucune promenade ni extérieure, ni intérieure,
et les environs de la ville ne présentent qu’une plaine aride et
marécageuse, où l’on est grillé pendant l’été, et enseveli sous
les eaux pendant l’hiver.
, Cependant Debretzin est mise au rang des principales villes
de la Hongrie, et elle renferme jusqu’à 24000 âmes. Il s’y trouve
un tribunal particulier, une coût distnctucllô, dont il n y a
que quatre dans tout le royaume, et où sont portées les afïàires
de la noblesse. Son collège des réformés est aussi en grande réputation,
et y attire un grand nombre d’élèves. Il s’y tient an-
nuellement quatre foires aussi tres-renommees, qui y amènent
un assez grand concours d’etrangers : ces foires consistent principalement
en bestiaux, qui sont extrêmement nombreux ail
milieu de ces vastes plaines, et qui font la richesse de la contrée.
Il y existe aussi quelques manufactures, comme des tanneries,
dont les produits sont assez renommés, des savonneries,
qui ont été établies surtout à cause de la proximité des lacs de
natron ( sous - carbonate de soude). Tout le savon qu on y fabrique
est fait avec du suif, comme dans la plus grande partie
des. états de l’Europe ; mais quoique cés manufactures donnent
en générai d’assez bons produits, la fabrication, abandonnée à
la routine de quelques ouvriers, aurait besoin de perfectionne-
mens de plusieurs genres. On fabrique aussi à Debretzin dés
étoffes grossières pour les paysans, et qu’on nomme guba : ces
tissus imitent grossièrement une toison, par de nombreuses mèches
de laine qui pendent de toutes parts sur une des faces, qui
se recouvrent les unes les autres, et forment ainsi une sorte de
fourrure sur laquelle l’eau glisse sans la pénétrer. Le guba est
ordinairement teint en noir, ou fabriqué immédiatement avec
des laines de moutons noirs ; il ne sert qu’aux dernières classes
du peuple, qui en font des manteaux, et particulièrement aux
Valaques, qui, sous cet accoutrement, ressemblent parfaitement
à des ours.
. Le natron, qu’on nomme en HongrieSzeksô(sel de latrine), lacs
de Natron.