
tone étoit d*efivlron de deux^ents ftadés, ou vingt-
cinq milles grecs ; le circuit de cinquante ftades ou
Üx mille & un quart grecs, & que cet état donnoit
la loi à quatre tribus ou nations voifines, & à vingt-
cinq villes: fuivant le même auteur, il y avoit
plusieurs autres états & des villes considérables
<lans la grande Grèce. Les Tarentins fur-tout ,
étoient mi peuple très-puiflant, en état de lever
trente mille fantaffins , trois mille cavaliers &
mille officiers de cavalerie. De plus, leur flotte étoit
Lien équipée: cependant, tout le pays compris fous
le nom de la grande Grèce, ne faifoit qu’une partie
de ce que l’on appelle aujourd’hui le royaume
de Naples.
Mais on fera bien plus en état de connoître les
anciennes forces de l’Italie, & les états puiffans
& nombreux qu’elle renfermoit, fi l’on fe rappelle
les longues guerres des différens états contre tous
les efforts des Romains.
Rome, devenue depuis fi puiffante, n’avoit eu,
comme on l’a v u , que la plus miférable origine;
c ’étoit des brigands raffemblés par l’avidité du
pillage. Le nombre ne fut pas d’abord très-confi-
dérable. Romulus n’avoit au commencement, pour
tous fujets, que trois mille fantaffins & trois cents
cavaliers. Mais à fa mort, après un règne de
trente-fept ans, il laiffa dans un très-petit territoire ,
«quarante-fix mille fantaffins & près de mille cavaliers.
Il ne faut-- pas s’imaginer que, dans la fuite ,
le territoire de Rome fe loit accru à proportion
du nombre de fes habitans ; car, même à la mort
de Camille, environ trois cents quatre-vingt-huit ans
après la fondation de la v ille , le territoire romain
•étoit peu confidérable & ne s’étendoit guère au-
delà de huit de nos lieues autour de Rome. Pendant
cette période ,-les Romains n’avoient fait la guerre
«qu’à leurs plus proches voifins, à la diffance de
peu de milles de leur ville. La guerre contre les
Samnites , dont le pays n’étoit pas fort éloigné,
ne commença qu’environ l’an 420 avant l ’ère vulgaire.
Eutrope remarque que ce fut environ vers ce
ïemps-là que commença la puiffance des Romains ; -
car ils portèrent la guerre dans le Samnium à 130
milles environ de leur capitale. Ce ne fut guère
«que l’an 450 de Rome, qu’ils firent des entreprifes
■ confidérables fur l’Etrurie. La guerre contre les
Tarentins n’eut lieu que vers l’an de Rome 477.
Pendant cet- efpace de 400 ans , ils s’étoient pro-
digieufement multipliés.
. Le dénombrement ne fut inffituè que fous le
règne de Servius Tullius, qui commença environ •
475 ans après la fondation de Rome. Tite-Live
'obferve qu’au premier dénombrement, il y eut
«quatre-vingt mille citoyens romains d’enrôlés ; &
un autre hifforien qu’il cite., rapporte qu’ils étoient >
sous en état de porter les armes. On peut voir ;
«dira ceup-cToeil tous les dénombremens faits en :
d ifférens temps, raffemblés dans un «ouvrage de 2
Voffius. En voici quelques-uns. L’ail 2,4^ > le dé-'
nombrement donnoit 130,000 hommes ; l’an 256 ,
il en donnoit 140,700; entre l’an 4 & 500,. il
monta quelquefois à 250,000, à 278,000, & même
à 292,224.
Prefque pendant tout ce période , 1e territoire
romain étoit très-petit : il étoit donc occupé par
une population immenfe. D ’ailleurs, on ne faifoit
le dénombrement que des perfonnes libres : les enclaves
ne s’y trouvoient pas compris. On a vu qu’on
ne les employoit pas à la guerre, qu’on ne les
enrôloit pas comme citoyens, quoiqu’ils fuffent en
très-grand nombre.
Une autre preuve delà grande multitude des Romains,
ce font leurs guerres continuelles, dans
lefquelles ils perdoient une fi prodigienfe quantité
de monde tous les ans. Il falloit donc que leur
pays, n’ayant qu’une petite étendue , fut extraordinairement
peuplé; autrement il n’eût pas été
en état de fournir aux armées, des renforts îi conf-
tans, réparant ainfi les pertes énormes qu’ils fai-
foiënt, quoique fouvent vainqueurs dans des batailles
..prefque continuelles. Ces armées, toujours
nombreufes, prouvent combien leur pays étoit peuplé
; & cette population, n’étoit pas reffreinte à
cette partie de l’Italie qui appartenoit aux Roumains
; elle s’étendoit encore aux autres états &
aux républiques puifîàntes du reftede l’Italie.
Nous n’en avons pas de connoiffanees pofitives.
Les hiftoriens Romains fe font fort peu étendus
fur ce qui concerne les autres peuples. Mais fi l’on
fait attention que les Romains avoient un grand
nombre de foldats; que c’étoit un peuple valeureux
& guerrier ; qu’ils n’ attaqüoient guère qu’une
nation de l’Italie à la fois, & qu’ils évitoient,
autant qu’il leur éteit poffible, d’avoir affaire en
même temps à différens états ; qu’ils avoient toujours
l’un ou l’autre à combattre, & fe faifoient
un métier de la guerre ; que malgré tout cela ,
leurs progrès ne furent que très-lents, & leurs conquêtes
peu confidérables dans l’efpace de 400 ans ;
il faudra convenir que chacun de ces états différens
devoit être puiffant & redoutable , puifqu’ils
ne purent les vaincre que par leur confiance opiniâtre
à les combattre.
Il eft donc très-probable que la population de
l’Italie, relativement à fes différens états, tels que
l’Etrurie, le Samnium , fur-tout les territoires des
petites villes, ait été moins grande depuis les
conquêtes des Romains. Rome devint fans contredit
une ville très-puiffante ; mais fa grandeur &
fa population ne purent jamais balancer le dé-
fordre & le ravage qu’elle avoit caufés dans tous
les autres lieux. Ajoutez à cette première affertion ,
que les Romains, en fe partageant les terres entre
eux, en attribuoient, aux chefs , des parts très-con-
fidérabies, qui n’étoient alors couvertes que d’ef-
claves deffinés à la culture , Sc qu’il n’y avoit que
le nombre dont le maître avoit pu faire l’acqififi-
R OM
tîon. C ’eft même ce que Tite-Live femble indiquer
, lorfque faifant mention de la grandeur des
armées des Volfques & des Ëques, il en rend la
raifon fuivante ( L. v i , c. x n ) . Après être convenu
de fa furprife , miki miraculo fu it, unie. tories
Volcis & Æquis fujfecerint milites, & c ., il ajoute qu’il
y avoit alors un nombre prodigieux d’hommes libres
dans ces mêmes lieux ; on n’y vit plus enfuîte que
des efclaves, & une pépinière peu nombreufe de
foldats.
J Les Romains, après avoir dévafté l’Italie, portèrent
la defolation dans la Sicile, puis dans la
Gaule. Je cite ce pays, parce que c’eft un de ceux
dont la population nous eft le plus connue. On
le conclut très - raifbnnablement du nombre des
troupes qui furent levées dans le temps que Céfar
attaquoit le Belgium.
Les peuples du Beauvoifis levèrent. . . 60,000h.
Ceux du Soiffonnois. 50,000.
LesNerviens, ou du Hainaut................... 5o’ooo.
Les Atrebates ou d’Arras.......................15,000!
Les Ambiani , ou d’Amiens. . . . . . 10,000.
Les Morins, dans la baffe Picardie
r VCnrL Ia mer............... : . . . . . . 25,000.
Les Ménapiens, dans la Flandre.. . . 9,000.
Les Caletes, ou du pays de Caux. . . 10,000.
Les Vélocatiens&les Vermandois. . . 10,000.
Les Aduatices.. . . . .- , V , « . . .- . 19,000.
Les Germains . ........................................ 49,000.
T ot a l ...................307,000.
Ce nombre eft bien plus confidérable qu’il ne
le feroit actuellement, fi on levoit une armée dans
ces mêmes pays; cependant il n’eft pas probable
que cette levée d’hommes comprît tous ceux du
Belgium en état de porter les armes; car Céfar
rapporte que les Bellovaces, ou peuples du Beauvoifis
, pouvoient mettre fur pied cent mille
hommes, quoiqu’ils ne fe fuffent engagés que pour
foixante mille. Prenons maintenant le total dans
la proportion de 10 à 6 ; le nombre des hommes
dans tous les états Belges, capables de porter les
armes, devoit être de 496,666 hommes. Pour
la population entière, il conviendra de quadrupler
ce nombre, ce qui donnera 1,986,664 hommes
libres, c’eft-à-dire, prefque deux.millions. O r ,
on ne comprenoit pas dans ce nombre tous ceux
qui étoient occupés des travaux pénibles, ni les
femmes, ni les enfàns. Cette claffe eftimée , & trois !
fois plus nombreufe, nous donnera 6 millions ; en
fout 8,000,000.
Mais le Belgium n’étoit guère què la quatrième
partie de la Gaule par fon étendue, puifqu’il
étoit compris entre l’Océan, le Rhin, la Marne
c l la Seine. Le refte de la Gaule, en y compre-
nant, il eft vrai, une partie de l’Helvétie, étoit
trois fois plus confidérable. On peut croire qu’il
s y trouvoit 24,000,000 d’habitans , ce qui donne
pour la totalité 32,000,000 pour toute la Gaule.
■R. O M 747
On voit que c’eft certainement plus qu’il n’y en
a actuellement.
Mais fuivons ce court examen fur la population
a x U , L^ans un autre endroit ( Liv. v u ,
enap. 75), Céfar fait mention des nombreufes levées
que les Gaulois refolurent de faire pour parvenir
a leur faire lever le fièee d’A life, dans laquelle
Vercengentorix s’etoit enfermé avec une armée nom-
breufe. On fenr bien que ces levées ne purent pas
etre faites dans toute l’étendue de la Gaule : tous
les pciiples n’y étoient pas liés par un même interet;
il n’y avoit entre eux aucun paCle fédératif;
oc Ion voit, dans cent endroits , qu’ils n’agiffoient
pas de concert. Cependant un affez grand nombre
dépeuples différens fe réunirent dans cette occafion ;
il fut refolu, dans un confeil général des chefs ,
que l ’on ne feroit pas marcher tous les hommes
propres à la guerre, de peur que leur trop grand
nombre n’entraînât de la confufion , & qu’il ne
fut împoffible de les nourrir : chaque état ne devoit
donc en envoyer qu’un certain nombre. En
comparant cette fécondé levée d’hommes avec celles
dtees précédemment dans le Belgium , on voit
qu elles font médiocres en proportion de celles que
u^es aur° ient Pu fournir avant d’avoir été fi
miferablement ravagées par Céfar. Car les Soiffonnois
, avant la guerre, étoient en état de lever
100,000 hommes, & alors on ne leur en demanda que
ro,ooo: les Nerviens, qui, félon ce qui eft ditau
• fécond livre, offrirent 50,000 hommes, ne font
I taxés qu’à 5,000: les Morins, au même nombre,
quoiqu’ils en euffent offert précédemment 25,000.
Les Atrebates ne furent taxés qu’à 4000, quoi-
qu’autrefois leur contingent eût été de 15,000.
Par ce que j’ai dit de l’état des Gaules, & par
les difpofirions aéluelles, qui n’exigeoient, pour chaque
peuple, qu’une foiblecontribution en hommes,
on peut affurer que l’armée levée par ce moyen,
n étoit pas la dixième partie de ceux qui étoient
deftines à la guerre, & qui n’avoient que la pro-
feffion des armes, au moment où les Gaules com-
meneèreut à être attaquées par Céfar.
O r , l’armée qui fut levée à cette occafion, fe
à- ,......................................... 248,000h.
Far conféquent le nombre des’ ci-
toyens libres, en état de porter les
armes, étoit de. , ................. 2,480,000.
Le quadruple de ce dernier nombre
, qui fera celui de tous les citoyens
libres, fera d e ........................ 9,920,000.
Et f i , pour avoir le nombre du
petit peuple & des efclaves, on triple
ce nombre, on aura...........................29,760,00a.
D’où il réfulte que la totalité du
peuple fe montoit à..............................39,680,000.
Quoique ce nombre paroifle d’abord bien confidérable,
cependant il feroit encore plus fort, fi l’on cal-
culoit rigoureufement d’après quelques autres hiftoriens,
Plutarque rapporte, dans la vie de Céfar, que
B b b h b 2