
du douzième fiècle les Croifés trouveront dès brigands
nombreux, connus fous le nom 6'AJfaJJinSy
& dont le chef fe nominoit Cheïk al Dgebal.
XVII. A quelque diftance au fud de Tripoli y
eft le promontoire nommé Theonprofopon ou le front
de Dieu : on préfume que les Phéniciens le nom-
moient Phanvel, mot qui emporte le même fens.
XVIII. Boirys en était peu éloigné au fud-eft :
elle avoir été bâtie par Ithobal : cette ville devint
épifcopale. Elle paffa aux Arabes, fut reprife par
les Croifés , puis revint aux Mufulmans.
XIX. Bikhs étoit au fud, mais peu éloignée.
L’itinéraire d’Antonin la place à dix-huit milles
de Tripoli. Ses habitans fervoient dans les expéditions
maritimes de T y r : ils excelloient dans la
coupe des bois ; car ce furent eux qui mirent en
oeuvre tous ceux qui furent employés à la conf-
truftion du temple de Salomon , 6c qui les tranf-
portèrent à Jérufalem : ils étoient alors fujets des
T yriens , lorfque la Phénicie fut fous la domination
des Perfes ; ils eurent des rois particuliers
dépendans de ces princes 6c leurs tributaires. Biblos
paffa aux Grées fous Alexandre, aux Egyptiens
après fa mort ; & peu après ils eurent à fouffrir
Fufurpation de Grypus , dont Pompée lés délivra,
en lui faifant trancher la tête.
Le nom phénicien de cette ville étoit Gebal ou
Gibel y probablement parce-qu’elle étoit fur une
montagne. M. Pabbè Mignot penfe que les Grecs
auront dit d’abord puis, par altération,
( G'blos, puis Biblos ( i) .
Il y avoit eu une ancienne Biblos, que l’on
nomma depuis, par cette raifon , Palce-Biblos.
N. B . Le chriftianifme ayant été établi à B iblos
, elle devint un liège épifcopal : mais il y fut
aboli, lorfque les Arabes s’en furent rendus les
maîtres. Les Croifés en firent le fiège en 1109:
on laiffa aux habitans la liberté de fortir ou de
refter, en payant un tribut. Saladin la prit : mais
après fa mort les Sarrafins l’évacuèrent pour une
fournie d’argent. Les Chrétiens la confervèrent
jufqu’à leur entière expulfion de la Terre-Sainte.
XX. t e fleuve Adonis, appelé aujourd’hui Nahr
Ibrahim, ou la rivière d’Abraham, prend fa fource
dans des montagnes à Peft : on difoit qu’Adonis
y avoit été blefle par un fanglier : il couloit entre
les deux villes de Biblos & de Palce-Biblos : il fe
jette dans la mer. On rapportoit que lorfque l’on
célèbroit la fête d1Adonis, les eaux de ce fleuve
fe teignoient en rouge, & l’on ne manquoit pas
d’attribuer cette couleur au fang d’Adonis : mais
Lucien , élevé par fes lumières au-deffus des préjugés
de fon fiècle, donne de ce phénomène ap*
parent une caufe toute naturelle. Dans le temps
que fe célébroit cette fê te , un vent confidérable
6c régulier chaque année portoit dans le fleuve
(1) Et ü citç plufieqrs exemples de pareils change-
PWh
un fable rouge, qui luidonnoit fa couleur;
voyageur moderne affure que le même effet a lieu
encore actuellement par la même caufe.
XXI. Aphaca (2) fe trouvoit à l’eft de Byblos\
entre cette ville 6c celle (VUeliopolis, près du Liban
6c de Y Adonis. ( Eufeb. de v. Conjl. ) Elle étoit célébré
par le culte que l’on y rendoit à Vénus
Aphacite. ( Voye^ A p h a c a . )
Près de cette ville étoit un lac d’où l’on voyoit
de temps à autre fortir des feux : cette efpèce de
phénomène eft actuellement connue ; ce n’eft autre,
chofe que de l’air .inflammable.
XXII. De Byblos à Berythus il y avoit vingt«'
quatre milles, félon l’itinéraire d’Antonin. Entre
ces deux villes on trouvoit une rivière nommée
Lycus ; c’eft aujourd’hui Nahr-Calb (3), On fait
que les Havims qui habitoient ce pays , adoroient'
une idole dont le nom hébreu étoit Nibbaç , 6c,
lignifie Yaboyeyr.
XXIII. 11 y avoit dans les montagnes un chemin
qui condutfoit de Biblos à Berythus ou Be-
rinthe : les Romains, fous l’empereur Antonin ,
en firent tailler un fur le milieu d’un long & affreux -
rocher fort efearpé & . au-deffus de la mer. (4).
Berythus, appelée aujourd’hui Baruth , étoffa
vingt milles de Byblos, félon l’itinéraire d’AntoV
nin. On croyoit ,„dit Etienne de Byfance, que fotl
nom lui venoir de fes eaux bir, fignifiant en effet,,
chez les Phéniciens, un lieu où l’on raffembloit
des eaux.
D’autres auteurs , fachant que de ce côté de.
la Phénicie on avoit adoré une divinité fous le
nom de Beryé, ont fait venir ce nom de Bch~
herith (& c’eft ainfi qu’il eft écrit fur les médailles);;
fignifiant une jeune perfônne diftinguée par fa
beauté.
Berythe avoit un port de mer, 8c elle étoit fituée
dans un terrein agréable & 'fertile ; fon terrbir-pro-
duifoit un vin excellent : mais on n’employoit pas
tout le raifin à faire ce vin ;on en confervoit une
partie, à caufe de fa grande douceur, pour le fervir !
fur les tables ; les grappes fe mettoient à cet effet
dans un barril, dans lequel elles étoient arrangées
avec des feuilles de plane , de vigne ou de figuier
féchées à l’ombre pendant un jour , & on les tranf-
porroit ainfi par-tout, fans qu’elles fe gâtaffenr.
Diodore Triphon , roi de Syrie , avoit fait dé^ •
truire çette ville : mais Agripp?, fils d’Ariftobule;
(2I N’eft pas fur la carte de M. d’An ville.
(3) On voit que l’ancien nom en grep fignifioit la
rivière du Loup ^ gç qu’en arabe moderne, irfignifie la
rivière du Chien, Ce nom moderne lui vient d’une an-<
cienne idole dont la tête reffemble à celle d’un chien
ou d’un loup.
(4) On y voit encore, fur une partie du rocher, une
infeription qui nous apprend que l’empereur Marc-
Aurèle-Antonin a fait couper, la montagne pour rendre
le chemin plus large. Encore félon Guillaume de T y r
n’a-t-il que deux coudées fur quatre ftades de long,
«
>
•& petit-fils de Hérodc-le-grand, n’épargna rien
pour la décoration de cette ville : outre un théâtre
& un amphithéâtre qui lui coûtèrent des fommes
immenfes , il y fit conftruire des bains & des portiques
; 6c, lorfque ces ouvrages furent achevés ,
il alla y faire repréfênter des jeux magnifiques.
" I l donna.fur le théâtre des fpeftacles accompagnés
de toutes fortes de mufiques ; 6c, dans l’amphithéâtre
, il fit combattre un très-grand nombre de
gladiateurs. Deux troupes , compofées chacune de
sept cens hommes , qni étoient tous des criminels
condamnés à la mort, fe battirent avec une telle
fureur & un fi grand acharnement, qu’il n’en refta
pas un feul. Agrippa I I , fon fils , qui conferva
pour Berythe la même affection que fon père ,
fe rendit odieux par les profufions qu’il y fit de
l’argent qu’ il tiroit de fes autres fujets; il donna
des fommes très-confidérables à cette ville, pour
-fournir aux dépenfes des fpe&acles qu’il vouloir
y repréfenter tous les ans : il fit aux habitans de
•fréquentes large {Tes de pain & d’huile, & plaça
-chez eux un grand nombre de ftatues, faites d’après
les plus grands maîtres.
C ’étoit dans cette ville qn’Hérode-le-grand, avec
la permifiion d’Augufte, avoit tenu l’affemblée qui
avoit condamné à mort Alexandre & Ariftobule,
rieux de fes fils , fur la fauffe accu fa non intentée
contre eux par Antipater , leur frère aîné , d’avoir
confpiré contre la vie de leur père. Les Bérythiens
- »voient une telle averfion contre les Juifs , qu’ils
fai fi fi oient avidement toutes les occafions de la
fatisfaire : ils fournirent quinze cens hommes à
Varus, qui marchoit à Jérufalem. Ils donnèrent
aufti, à Geftius-Gallus, des troupes , avec lefquelles
ce général alla brûler Zabulon-Andron.
Après la prife de Jérufalem , Titus vint à Bé-
rythe, pour y célébrer la fête de la naiffance de
1 empereur Vefpafien fon père ; il y donna des fpec-
tacles magnifiques, dans lefquels, des Juifs captifs
les uns furent obligés de fe battre contre des bêtes ’
-d’autres furent brûlés , & d’autres combattirent
en gladiateurs les uns contre les autres. Le nombre
de ceux qui périrent dans cette occafion , ne fut
pas moindre qu’à Ccfarée, où de femblables jeux
coûtèrent la vie à deux mille cinq cens Juifs.
Strabon., qui nous apprend (Z. x v i ) que cette
ville , détruite par Tryphon , avoit été rebâtie
par les Romains , ne nous dit pas à qui elle fut
redevable de fa reconftruétion ; mais feulement
qu Agnppa y pkçg deux légions : les noms de
c c ? A de M la AuBufia Fclix , quelle porte
fur fes médailles , pourroient indiquer qu’elle fut
relevee par le premier empereur romain. Elle iouif-
foit du droit italique : elle devint aufti colonie
romaine. ■
Lan de J. C. 349, la douzième de l’empire de
Confiance, Berythe éprouva un tremblement de
terre qm renverfa la plus grande partie de les édi-
fices. Euftathe, évêque de cette ville dans le cinquième
fiecle, obtint de l’empereur Théodofe II
Géographie ancienne. Tome IL
line loi pour l’ériger en métropole ; & dans la
fuite il parvint à mettre (bus fa dépendance les
villes de Byblos, â'Antaradus, de Tripolis 6c quel"
ques autres ; ce qui entraîna des diffenfions : il fut
enfin arrêté que T y r demeureroit feule métropole
de la Phénicie.
Mais, Berythe étant plus confidérable 6c plus
peuplée, on eut toujours pour elle Beaucoup d’égards.
Lorfque les empereurs faifoiem quelque loi
qyi intéreffoit la Phénicie , ils l’envoyoient d’abord
à T y r , où réfidoit le confulaire de cette province ;
mais ils la faifoient propofer & publier à Berythe,
comme un moyen de la répandre plus promptement
par toute la province.
L’étude des loix étoit en fi grande aélivité à
Berythe, que c’étoit ordinairement parmi les .ju-
rifconfultes qui y avoient étudié, que l’on choi-
fiffoir ceux qui dévoient faire les (bnélions d’affef-
feurs dans tous les tribunaux de l’empire.- On lui
donnoit les titres de mère 9 de nourrice 6c de ville
des loix.
Berythe fubfiftoit encore au temps des croi- facles CO- , v I
Depuis le feptième fiècle, elle étoit entre les
mains des Mufulmans, qui s’en étoient emparés
fous le califat d’Omar. Les Chrétiens la reprirent
1 an de J. C. 1 109. Saladin la leur enleva foixante-
dix-huit ans après, l ’an 1187. Après fa mort, les
Sarrafins qui la gardoient, ayant pris l’épouvante
6c s’érant retirés, les Chrétiens s’en remirent en
poffeffion l’an 1196 : mais ils la perdirent, k>rf-
qu’ ils furent -contraints d’abandonner la Syrie.
f l . B* Cette ville a,, •depuis, été entièrement
wiinée. Sa muraille, du côté du midi, eft cependant
encore entière : elle avoit été faite des ruines
de l’ancienne ville. On y voit différens reftes, entre
autres des pavés de mozaïque , des fragmens de
■ ftatues, qui annoncent la magnificence de cette
ville.
Le Tamyras,. fleuve , fe trouvoit au fud de Be-
rythe; du moins c’étoit le nom que les Grecs don-
noient à ce fleuve : il eft probable qu’ ils avoient
pris ce nom de l’arabe damer, rugir comme un
lion : les gens du pays difent Nahr damer ; & les
Occidentaux , ordinairement Damour (2).
(1) Les auteurs occidentaux de ces extravagantes expéditions
, ont prefque toujours dénaturé ou altéré les
noms. Ils ont écrit Baruth , Berinthus, Beaurim & même
Geris & Gérés.
(2) M. d’Anville Ta placé au fud de Sidon, & tout près
de Tyr. Mais M. è ’Anville fe trompe évidemment
puifque Strabon dit : Mtret <fe Bupurir *çi 2 /<Taiv oe-cv fs
TfTptotov/oVî Ç’etf-lotc : (AtTO-feu St ifTctfxvpstç troret/Aoi , xai t»
tou ’AtxXbtt/ou *.\<roç, x«î AiiVTa'v iro\t{ ; c’eû-à-dire
au-delà de Berythe, eft Sidon, éloignée d’environ 6a
ftades : entre ces deux villes eft le fleuve Tamyras un
bois d’Efculape, & la ville de Lcontopolis. M. d’Anville-
n’a placé nulle parc fur cette carte une ville de ce nom ;
& il a indiqué le fleuve plus au fud. Je penfe que cette
ville devoir être à l’embouchure du Tamyras j » le conclus
de l’analogie des noms.
A a a a