
s’appeloit Lacydon ou Halcydon, félon Pomponîus
Mêla.
Céfar dit que Marfeille étoit prefque environnée
de trois côtés par la mer, & qu’elle eft très-forte
du côté de terre, foit par fa fituation, fo-it- par
un foffé profond qui défend fes remparts. Strabon
dit que Marfeille étoit grande, enceinte de bonnes
murailles, & finie# au midi fur une colline en
forme d’amphithéâtre au-deffus du port.
Marfeille avoit les memes officiers que les colonies
romaines & les municipes. Les Romains donnèrent
à cette ville une nouvelle forme d’admi-
niftration. Les anciens Marfeillois avoient un éta-
bliffement bien effentiel, c’étoit la gymnaftique,
où l’on s’attachoit à rendre les jeunes gens adroits
& vigoureux en les affujettiffant à tous les exercices.
de corps.
Si le gymnafe de Marfeille étoit fur le même
pied qu’à Athènes, les enfans des citoyens deftinés
pour la pratique des arts méchaniques, n’y étoient
point admis..
L’emploi de prêtrefle de Diane à Marfeille, ne
fe conféroit qu’à des dames grecques ou Marfeil-
loifes, parce qu’on obfervoit dans le temple de
cette déeffe un rit grec , différent de celui des
Romains.
Les Romains firent à Marfeille dès établiffemens
qui n’étoient connus que dans les villes dépendantes
de l?empire ; tel eft le temple qu’ils bâtirent
en l’honneur d’Augufte, & dans lequel ils mirent
des prêtres pour lui offrir des prières & de l’encens^
Il y avoit à Marfeille un collège de Dendraphores.
Ils étoient chargés de la fourniture des bois pour
la conftruâfion des vaiffeaux & des- machines de
guerre. Quelques auteurs prétendent que l’on don-
Boit auffi ce nom à ceux qui, dans les proceffions
des dieux, portoient des branches d’arbres, ou
même des arbriffeaux entiers..
Les hiftoriens qui parlent de la fondation de
Marfeille, n’étant venus que cinq -à frx cens ans
après, ils n’ont parlé de cet évènement mémo.-
ïable, qu’en mêlant beaucoup de traditions populaires,
à des faits que l’on ne peut révoquer en
doute.
Cette ville fut fondée par des habitans de Phocée,
célébré ville de l lonie. Ces Phocéens ,.qui avoient
des comptoirs fur les côtes d’Italie., voulurent auffi
en avoir fur les cotes méridionales de la Gaule ,
©ù un établiffement pareil leur devenoit néceffaire,
parce que leurs vaiffeaux , battus par les vents,
y auroient- fouvent péri faute de fecours , ou ils
y auroient fait des. eourfes inutiles . parce que
les habitans de cette contrée ne favoient ni culr
.îiver la ferre-, ni. tirer parti des richeffes. qu’elle
renfermoit. Simos-& Protis furent chargés de cette
expédition. Après avoir confulté les dieux, ils s’embarquèrent
avec les.perfonnes des deux fexes qui
•voulurentpartager leur fort, & portèrent les inftru-
mens, des asts.méfhaniques alors connus.,.ceux.de
l’agriculture, & les loix fuivant lefquelles îa colonie
devoir fe gouverner. L’oracle leur avoit pref-
crit daborder à Ephèfe pour fe mettre fous la.
conduite de la perforine que Diane leur indiquerait.
A peine furent-ils arrivés à Ephèfe, que la
déeffe apparut eu fonge à une femme, de la ville
nommée Arifiarquc , & lui ordonna de prendre
une de ces ftatues, & de fuivre ces étrangers*
Arifiarque prit auffi dans le temple, une partie
du feu facré , pour le perpétuer dans le nouveau
temple que l’on devoir bâtir à Marfeille en l’honneur
de la déeffe.
Le premier foin des Phocéens en entrant dans
le golfe où ils fondèrent cette ville,.fut de gagner
les bonnes grâces du prince qui régnôit dans la.
contrée. Proti^ fut chargé de le voir, & de faire
alliance avec lui. Il arriva à la cour du prince,
le jour qu’il, devoit marier fa fille Gyptis. Juffin-
& Athénée, d’après Ariftote, rapportent que les
parens étoient afferablés, ainfr que. tous les fei-
gneurs du pays, & que, félon l’ufage des Gaulois,
ils artendoient que la fille du prince pré-
fentât une coupe remplie d’eau à celui qu’elle choi-
fiffoit pour époux. La bonne mine de Protis, fon
habillement & fes. manières, lui. attirèrent les regards
^ de toute l’aflèmblée.. Gyptis en fut auffi
frappée, & fans prévoir les fuites qu’il pourroit
y avoir de fe décider pour un étranger, elle lus
préfenra la coupe. Son père, pour prouver le contentement
qu’il avoit de ce choix,, fit abandon
aux Phocéens d’un terr.ein, où ils s’établirent la
première année de la quarante - cinquième olym^
piade, ou la 599e avant J.
Les Phocéens, félon Juffin., plus verfés dans
la connotflance qu’ont les hommes réunis ea fo-
ciété, entourèrent- leur, ville de. murailles-, & bâtirent
une citadelle pour contenir les peuples
voifins. Ils établirent leur gouvernement fur la
bafe des loix qu’ils avoient apportées, & décernèrent
à Diane d’Ephèfe, qui devint, la divinité
tutélaire de Marfeille., un culte particulier dans
un temple qu’ils lui élevèrent-,. & dont Ariftarque
fut la, première prêtrefle. Les Phocéens portèrent
eufuite leur attention vers l’agriculture., qui, avec
la pêche, fut l’unique reffource qu’ils-eurent pour
fubfifler. Ils cultivèrent la vigne & l’olivier. Ce
font vraifemblablement. les premières productions,
qu’ils tranfplaniérent dans les- Gaules.
Peu d’années après Férabliffement,de Marfeille,;
cette colonie fut attaquée par les peuples voifins^
dont le roi Nanus étoit. mort. Son fils , Goman
prit la réfolution. de les chaffer, & choiftt, pour
L’exécution de fon projet, le jour, où l’onîdevois
célébrer une fête de Flore ; mais l’amour- d’une
proche parente du roi-pour un jeune Marfeillois,.
frit Ccfufe que cette ville fut fauvée. Cette.femme
ne pouvant, fri p port er- Fidée. que fon, amant feroit
bientôt égorgé comme les autres , lui révélai
le fëcret de la confpiration. Le jeune homme,
effrayé , courut, chez.les magiffrats,. &. leu,».;di&
ce qu’il venoît d’apprendre. On s’empara'de toutes
les avenues ; les Gaulois qui étoient dans la ville ,
furent arrêtés; le roi lui-même fut attaqué &
perdit la vie dans le combat avec fept mille hommes
des fiens. Juffin dit que depuis ce temps, les Marfeillois
fermèrent les- portes de leur ville les jours
de fêtes, mirent des fentinelles" fur les remparts,
veillèrent avec attention fur les étrangers, &
•prirent,en temps de paix, les mêmes précautions
qu’en temps de guerre.
La ville de Marfeille fubfiftoit depuis environ
cinquante-fept ans, lorfque celle de Phocée fut
fubjuguée par les Perfes. La plupart des habitans
s’embarquèrent avec leurs effets, leurs femmes
& leurs enfans. Pluffeurs de leurs vaiffeaux.vinrent
relâcher fur les côtes de la Provence, où ils trouvèrent
les Marfeillois occupés à fe maintenir &
à établir dans leur république naiffante, Tordre
& la police qui l’élevèrent à un état fr floriffant.
Ils choifireat le gouvernement ariftocratique ,
-comme plus conforme à leur génie & à leurs intérêts.
Ils mirent l’autorité entre les mains de
quelques citoyens vertueux, dont un petit nombre
fuffifoit pour gouverner une république naiffante.
Il y avoit à Marfeille frx cens fénareurs, dont
chacun devoit être fils & petit-fils de Marfeillois,
& avoir des enfans. Sur ce nombre , quinze étoient
choifis pour rendre la juftice. Trois de ces quinze
préfidoient aux affemblées. Ces quinze magiffrats
ibrmoient le fénat ou t’affemblée ordinaire des juges,
& les fix cens formoient le confeil public, en qui
réfidoit Fautèrite fouveraine. Le confeil publie
étoit le maître de faire la paix ou la guerre; de
nommer des députés ou des ambaffadeurs ; de
ratifier les traités & les alliances, & d’examiner
tout ce qui concernoit la-religion & l’état. Il laiffoit
aux quinze fénateurs tirés de fon corps, l’exercice
de la police & le foin de juger les affaires
des particuliers. Ce ne fot que trois fiècles après
fa fondation, que Marfeille eut ce grand nombre
de magiffrats ; car une affemblée auffi angufte,
annonce une ville très - confidérable & déjà ancienne.
Strabon rapporte que les loix étoient gravées
fur des tables, & affichées dans les places publiques.
Elles ne furent jamais violées impunément,
de quelque état & de quelque condition
que l’on fut. Les magiffrats chargés de les faire
executer. étoient les premiers à les obferver, &
les peines étoient- plus févères contre eux que
contre de Amples particuliers'.
• Fendant pl-ufleurs frècles , les moeurs, à Marfeille
, fe conferv.èrent dans leur première frmpli-
cité , parce que 1 on eut foin d’éloigner les arts
qui les énervent, & les gens oifrfs qui les corrompent,
félon le rapport de Tacite. L’économie
& la: vertu des anciens Marfeillois les rendoient ;
ennemis de tout ce qui pouvoit introduire le luxe
©u alarmer la pudeur. Leur frugalité fut long-temps I
célèbre. Les femmes y étoient- modefres.,, fobres t
8c décentes. Elles ne connoifloient point Te vin
ni les ajuftemens frivoles. Là loi avoit fixé à une
fomme môdique la dépenfe que Fon pouvoit faire
en habits & en bijoux. On avoit fixé la plus forte
dot des filles à cent pièces d’or. Les pleurs &
les lamentations, étoient bannis des funérailles. On
avoit ordonné que la cérémonie fut terminée le
jour même par Un facrifice domeffiqwe entre les
parens & les amis.
On étoit dans l’ufage à.Marfeille, de fe donner
la mort quand on étoit las de vivre 1 mais un
homme n’étoit pas le maître de l’exécuter fans le
confêntemem de la république.
On tranchoit la tête aux criminels Fon tenoit
pour cet effet, une épée fufpendue au lieu de
fupplice. Deux bières étoient à la porte de la ville y
pour tranfporter les morts. L’une étoit pour les
perfennes libres., & l’autre pour les efclaves.
Un affranchi qui manquoit à fon ancien maître
étoit remis en fervitude jufqu’â trois fois v à la
quatrième, il étoit abfousparce que Fon fuppo-
foit qu’il y avoit de la faute de Foffenfé.
L’hofpitalité étoit exercée à Marfeille par principe
de religion & d’humanité. Pour maintenir la
’ fureté de l’afyle que Fon donnoit aux étrangers
il étoit défendu d’entrer armé dans la ville. Oh
laiffoit les-armes à la porte,. & ori les reprenoit
en fôrtànt;
Lorsqu’il régnoit quelque maladie comagieufe à-.
Marfeille, un pauvre * qui fe dévouoit volontairement
à la mort pour appaifer la colère des dieux
étoit nourri fort délicatement aux dépens du public!.
Il étoit enfuite conduit dans les rues, orné de
feftons & de bandelettes, comme une viélime»
En paffant, tout le monde le chargeoit de mal
diéfions, pour attirer fur lui la-vengeance céleffe.
Les Marfeillois avoient des loix pour régler les-
affaires de commerce ; mais elles ne font point,
venues jufqu’à nous.
Pythéas , citoyen zélé de cette vHlehabile aflro-
nome, & le plus favant géographe qu’il y eut:
àfors en Occident, entreprit environ trois cens-
vingt ans avant J. C. de perfe&ioimer la navigation
& de découvrir des pays où l’on pût commercer.
Il paffa le détroit & fuivit les côtes juf-
ques vers le 66e deg..32 min. nord. A fon retour,.
il1 entra dans la mer Baltique. Pythéas ouvrir au
commerce des- nouvelles routes ;. il enrichit i’hif-
toire naturelle, débrouilla-la géographie & rendit
la navigation plus fure: IL détermina la latitude
de Marfeille..
Euthymène, Marfeillois & affronome comme;
Pythéas, vers le même temps, parcouroit tes côtes-
occidentales de l’Afrique. Il reconnut l’embouchure-
du Sénégal. Ces deux voyages furent- entrepris,
aux dépens de la république;
La ville de Marfeille épioit les démarches des.
[ Carthaginois pourprofiter de leurs découvertes &
de leurs défaftres. Elle profita du moment où T y r
l< tomba- au pot w ok d’Alexandre-,., & où Carthage.