
mâles n’ont de facultés & de defirs que
dans le tems où les femelles en éprouvent
elles-mêmes. Ce ne font, en général, que les
petites efpèces, ou, des efpèces de taille
moyenne , qui multiplient indifféremmeii
dans tous les tems de l’année , telles que
celles des Souris ,des Rats, des Lapins, &c.
Lorfque les femelles ont mis bas & élevé
leurs petits, elles font fans defirs durant
quelque tems, pendant l’intervalle nécef-
faire pour réparer, par la nourriture, la
dépenfe qu’ elles ont faite ; leurs forces ,
leur embonpoint fe rétabliffent bientôt, des
fucs furabondans ne tardent pas à affluer vers
les organes de la génération , & à faire
éprouver aux femelles les defirs qu’elles
avoient fentis avant Jeurs premières gefta-
tions. Mais comme ces efpèces vivent d’ali-
mens abondans dans tous les tems , qui
.fuffifent à leur entretien & au-delà, les individus
réparent à mefure qu’ils dépenfent,
les mâles ne ceffent pas d’être prolifiques ,
& les defirs des femelles fe renouvellent
peu après qu’elles ont celle de fournir à
l’entretien de leur famille. Ainfi les Souris
& les petits quadrupèdes de genres qui
vivent dans les lieux habités , qui n’y manquent
d’alimens en aucun tems , fe repro-
duifent indifféremment dans tout le cours
de l’année; le Lapin à qui les herbes que
l ’hiver ne fait pas périr , fourniffent une
ample nourriture , multiplie également pendant
la plus grande partie de l’année ; mais
il eft moins fécond quand il ne trouve qu’une
pâture moins abondante & moins fucculence;
la reproduétion de fon efpèce en eft retardée,
Si elle a plus généralement lieu quand le
retour de la belle faifon ramène des cir-
conftances plus favorables. C ’eft donc l’abondance
de la nourriture qui entretient quelques,
efpèces de petits quadrupèdes en état
de multiplier en tout tems. C ’eft tellement
cette abondance des alimens qui eft la fource
de la fécondité , le principe qui mer les
defirs en aétion & qui fournit la faculté
de multiplier, que les grandes efpèces même
de quadrupèdes que nous tenons en domef-
ticité & que nous nourriflons largement,
font indifféremment en état de fe reproduire
dans tous les tems de l’année, tandis que
les efpèces analogues, livrées à elles-mêmes,
& toutes celles qui vivent en liberté , qui
ne trouvent une nourriture abondante qu’en
une faifon déterminée , ne fe reproduite!.t
qu’à des époques fixes. Ainfi le Taureau
& la Vache-, qui paiffent dans les prairies,
auxquels on fournit du fourrage dans l’étable,
produifent pendant tout le cours ded’année,
tandis que les Taureaux & les Vaches fau-
vages, les Bifons , les Aurox, Sic. font
fournis à des époques périodiques; le Cheval,
dont on prend encore plus de foin que du
Taureau , qu’on nourrit plus largement, eft
de même en aéfivité en tout tems; le Bélier,
au contraire, & la Brebis, qu’on ne conduit
que fur de maigres pâturages, auxquels on
donne un abri & fort peu de nourriture , ou
une nourriture fans fubftance , qui ne font
pas mieux alimentés en domeftjcité que s’ils
cherchoient eux-mêmes leur nourriture en
liberté , ne multiplient, comme les efpèces
qui y vivent, qu’à une époque déterminée.
Ce feroit une expérience à tenter de nourrir
largement & en tout tems des Béli'ers Si
des Brebis; il eft très-probable que les premiers
feroient, fans interruption , eu état
de féconder , & que les Brebis deviendraient
en chaleur pendant tout Te cours de l’année
indifféremment. Mais feroit-ce un avantage
qu’il naquît des Agneaux dans tous les mois ?
Les différentes races de Chiens, que nous
nourriflons toutes , multiplient dans tous les
tems de l’année ; le mâle eft fans ceffe d’autant
plus ardent, la femelle entre en chaleur
d’autant plus fouvent, que les individus,
font mieux nourris. Cependant le Loup, qui
eft reconnu aujourd’hui pour la même efpèce
que le Chien, d’après l’organifation des deux
races parfaitement femblable, d’après la faculté
qu’elles ont d’engendrer des petits qui
fe reproduifent, ne multiplie qu’à une époque
marquée , après qu’il s’eft refait de la misère
& de la difette qu’il a éprouvées. Il faudrait
rapeller ici l’ hiftoire des différens quadrupèdes
, pour marquer le tems où chaque
efpèce entre en rhut & mec bas.
Le réfultat de ce tableau feroit que les
efpèces deviennent en chaleur après qu elles
fe font .refaites par une nourtiture .abondante
, que le tems de la geftation eft tellement
combiné entre ce terme & celui où
les femelles mettent bas , que les petits
naiffent à l’entrée d’une faifon favorable à
leur accroiflemenc, en ce qu’ils trouveront
une nourriture abondante & fucculente
quand ils cefferont de vivre du lait de leur
mère, en ce que la chaleur qui ira, en
augmentant, à mefure qu’ils grandiront, &
que leur mère pourra moins les réchauffer ,
favorifera leur développement; ainfi l’abondance
de la nourriture détermine le tems
de l’accouplement, de la durée de la geftation
fixe la naiflance à l’époque la plus favorable.
. Les oifeaux entrent généralement en chaleur
à la fin de l’hiver, ou au premier retour
du printems , & ceffent d’y être avant la fin
de l’été. Cette époque femble contredire ce-
que nous venons de dire fur l’effet d’une nourriture
abondante. Il ne paraît pas que les
oifeaux aient pu fe nourrir largement , & réparer
pendant l’hiver. Mais fi l’on fait attention
qu’ils ont celle de fe reproduire avant la
fin de l’été , qu’ils ont trouvé pendant ce qui
reftoic de cette faifon , & dans la première
moitié de l’automne , une nourriture abondante
& crès-fubftamive , puifque c’eft le
tems de l’année où il y a le plus de fruits &
de femence en maturité, on concevra qu’ils
s’étoient refaits en grande partie avant l’hi
ver. Cette remarque eft exaéte pour les granivores
: mais ceux qui vivent d’infeftes fe
feront éloignés à l’automne où les vivres commencent
à leur manquer , Si tls le feront
retirés fous des climats où la chaleur, en y
entretenant des infeétes en vigueur , leur
fourniffe des moyens de réparer leur forces.
Quant à ceux qui fe nourriffent de vers , les
pluies de l’automne en font fortir de terre
plus qu’en aucun autre tems , & rendent la
nourriture des oifeaux qui en vivent , plus
abondante que dans aucune autre faifon. Ils
auront donc pu fe refaire , comme les frugivores,
avant l’hiver. Dans cette faifon , la
nourriture aura été moins abondante , mais
la dépenfe aura été infiniment moindre que
dans le refte de l’année , & au-deffous du
produit d’une nourriture médiocre Le repos
pendant les longues nuits de l’hiver, l’inaction
fréquente dans la journée , quand le
ciel eft fombre & couvert , auront été de
puiffantes caufes d’épargne , & les oifeaux
n’auront que très-peu dépenfé pendant l’hiver
pour des moüvemens fort limités & peu
fréquens ; ils auront donc encore acquis , &
ils feront entièrement refaits à la fin de cette
faifon. Si on les examine , alors on trouve
leur plumage mieux fourni 8c plus luftré
qu’en aucun autre tems , leur corps plus
plein , chargé d’une plus grande quantité de
graiffe , les organes de la génération des
mâles d’un volume qu’il n’ont pas dans toute
autre faifon , des oeufs fur l’ovaire des femelles
prêts à fe détacher , d’autres à différens
degrés de groffeur. Cet état de pléthore des
deux fexes ne peut être le produit que de
fucs furabondans accumulés pendant Tau-
tomne & durant l’hiver. Au contraire , à la
fin de l’été le plumage des oifeaux eft dégradé
& falli , leur corps eft émacié ; les organes
de la génération des mâles font affamés
& retirés fur eux-mêmes ; il n’y a fur l’ovaire
des femellès que des germes fans aucun
commencement de développement. Il eft donc
démontré que c’eft à la fin de l’hiver ou au
commencement du printems, que les oifeaux
furabondent en fucs nourriciers , & que
c’eft par cette raifon qu’ils éprouvent alors
le befoin de fe reproduire. Les oifeaux carnivores
paroiflent préfenter une difficulté, en
ce que vivant de proie , ils femblent pouvoir
fe nourrir auiïi largement en un tems
qu’en un autre , & n’être pas dans le cas de
furabonder en fucs nourriciers à une époque
déterminée. Mais ils s’étoient , comme
les autres oifeaux, épuifés par les couvées qui
avoient eu lieu au printems & au commencement
de l’été précédent ; ils étoient de même
dans un état de dépériffement à l’automne ;
ils ont donc eu également befoin de fe refaire
pendant cecte faifon & durant l’hiver,