
c’eft peut-être une des étalons pour lefquelles
les individus font fi nombreux , en général ,
parmi les efpèces d'oifeaux de mer , tels
que les Goelans , les Hirondelles , les Fous ,
les Manchots, &c.
Tous les oifeaux d’eau compofent leur nid
d’herbes fèches 8c, grollières, comme les feuilles
de rofeau , les differentes plantes aquatiques
, quand cê font des oifeaux qui fréquentent
les eaux douces; d'algue , de1meujfe
arrachée entre les fentes des rochers , quand
ce font des oifeaux de mer ; Ta femelle d’un
grand nombre s’arrache , au moment de pondre
, les plumes ou le duvet fous le ventre ,
pour en garnir l’intérieur du nid. Il y a quelques
faits particuliers dans l’énoncé defquels
je ne fuis pas entré , dont le détail me con-
duiroit trop loin. Je n’en rapporterai que
deux. La poule d’eau, à qui la proximité de
cet élément eft apparemment Ci riéceffaire ,
qu’elle ne peut s’en éloigner en aucun tems ,
ralfemble fur l’eau 8c joint enfemble des
feuilles fèches de rofeau , elle en compofe un
nid flottant, qui s’élève ou baiffe félon que
l’eau monte ou defcend; mais pour empêcher
que ou fon cours ne l’entraîne, ou qu’il ne
devienne le jouet des vents, elle l’attache par
quelques feuilles lougues liées d’une manière
lâche, à la tige de la même plante , en forte
qu’il peut haulfer ou baiffer fans crainte qu’il-
loit entrainé ou pouffé hors de fa place. Le Martin
Pêcheur, qui fe nourrit de Poiffon, qui a le
bec très-long, fort grosiSc très-pointu, creufe
un trou en terre le long des rives à pic, & y
place fon nid ; il s’élance facilement des bords
du trou , ou fur l’eau pour faifir la proie qui
patoît à fa furface , ou fur les branches des
arbres voifins, pour épier la proie qui fe montre
; il ne l’a pas plutôt enlevée , qu’il eft a
portée de rentrer dans'fon nid fans s’expofer
à la lenteur & au rifque d’un long vol, pendant
lequel il pourrait être vu , enlevé lui-
même par un oifeau de proie , ou forcé de
lâcher & de céder la capture qu’il vient de
faire. D’ailleurs fon nid eft autant à l’abri &
auffi caché qu’il le puiffe être. Mais il lui
falloit, pour le placer avec tant d’avantage,
un infiniment perforatif, auffi fort que l’eiî
fon bec , & conformé comme il l’eft.
Les quadrupèdes ovipares , foit qu’ils vivent
fur terre, foit qu’ils vivent dans l’eau,
les reptiles en général, & les vers proprement
dits , foit qu’ils, foient nuds comme les vers
de terre ; ou qu’ils vivent dans un tuyau ou
une coquille , dépofent leurs oeufs ou dans des
trous en terre , ou dans le fable en des lieux
peu fréquentés , ou dans la vafe , ou entre
les fentes des rochers , ce foin feul fuffità leur
efpèce. La température de l’atmofphère communique
au germé affez de chaleur pour le
mettre en mouvement', & pour entretenir le
développement & l’accroiffement de l’em-
brion ; les petits , en naiflant , n’ont pas be-
foin non plus d’une autre chaleur que de celle
de l’atmofphère, & ils font en état de chercher
eux-mêmes leur nourriturer Suivant les
voyageurs , F Autruche , parmi les oüèaüx,
s’écarte des animaux de cette claffe , & fe rapproche
des quadrupèdes ovip’ares par le dépôt
de fes oeufs dans le fable ; par letjr abandon ,
le développement du germe par la feule chaleur
de l’atmofphère , & la faculté des petits
de pourvoir a leurs befoins au fortir de l’oeuf.
Ainfi j félon le rapport dés befoins & des cir-
conftanees , les habitudes des efpèces les plus
éloignées fe rapprochent.
Les Poiflbns dépofent leur frai , c’eft ainfi
qu’on nomme leurs oeufs , fur les plantes
aquatiques, fur les rochers couverts de mouf-
fes & baignés par les eaux , ou fur quelqu’au-
tre corps qui plonge dans l’eau ; une vifco-
fité qui lui eft propre l’y cole , les oeufs y
croiffent abandonnés du poiffon qu’il les y a,
pour ainfi dire jettés, & les petits y naiflent.
Le frai des poiflbns expofé à la vue des diffé-
rens habitans de l’eau , prefque tous voraces,
à la gourmandife des oifeaux d’eau qui en
font avides, court donc de grands dangers :
il en périt, fans doute une portion confide-
rable , & c’eft pour cette raifon ,■ vraifembla-
blement, que les poiflbns font, en général,
fi féconds, & plus que ne le font aucun des
autres animaux. Cependant, malgré l’abandon
du frai par les poiflbns &r leurs négligence
apparente à fon égard } on doit remarquer
qu’ils ne le dépofent que fur des
corps fixes auxquels ils puiflent fe coller, 8c
qui 1 empêchent de devenir le jouet des
eaux ; qu’ils le répandent près du bord ,
aux endroits acceflibles à moins d’ennemis,
8c fréquentés par de plus faibles , par de
plus aifés à raflafier : que les poifions de mer
viennent fraier à l’embouchure des rivières
8c des fleuves, où les tempêtes & l’agitation
des flots font moins à craindre, 8c où les ennemis
, qui ne fe plaifent que dans les eaux
falées , ne fréquentent que pour y dé’pofer
eux-mêmes leur frai.
Nous vçnons de voir quelles précautions
les quadrupèdes prennent pour préparer une
couche a leurs petits , les foins qu’ils leur rendent,
8c le tems que ces foins durent} les
rapports entre les befoins de la famille 8c les
facultés de la mère , chargée feule de veiller
à fa confervaxion. Nous avons vu de même
les précautions que les oifeaux apportent à la
conflr ucHon de leur nid, la manière dont ils
le conftruifent, quelles font les matières qu’ils
y empîoient, en quels lieux ils le placent-fui-
vanr leur efpèce} nous avons parlé des befoins
des jeunes & des moyens d’exécuter dont jouif-
fen: le père 8c la mère qui partagent les foins né-
cefiaires pour la couvée; enfin nous avons reconnu
que les quadrupèdes ovipares, les reptiles,
les poiflbns, les vers dépofent leurs oeufs
en des lieux convenables à leur efpèce ,
& que ce foin fuflit -pour que le germe fe
développe , que les petits font , en naïf
fant , en c:at de pourvoir à tout ce qui leur
eft néce flaire. 11 nous relie à continuer d’ob- :
ferver les oifeaux dans la luire , des foins 1
qu ils donnent à la couvée, après la conftru-
tion du nid, & à terminer cer article par
l’expofé des précautions que les infeéles prennent
, ou des travaux qu’ils exécutent en fa
veur de leur poftérité.
Quand parmi les oifeaux le père & la
tnere ont raflemblé les matériaux du nid ,
qu’ils l’ont conftruit,,& que la .mère fur-
Hijloire Naturelle, InfeÜes. Tome I.
tout lui a donné la forme qu’il doit avoir,
le tems de la ponte eft très-proche : alors la
mère garde' le nid par intervalles pendant le
jour, & elle y paffe la nuit. Ell-ce pour s’habituer
à l’affSdinté de l’incubation , oü , chargée
du poids de fes oeufs, fe repofe-t elle
mieux dans fon nid? A peine quelques jours
fe font-ils écoulés, que la mère dépofé un premier
oeuf; c’eft ordinairement le matin, quelque
rems après le lever du foleil. Cette opération
eft fans doute- pénible ; la dilatarion
de l’oviduélus, des gouttes de fang dont la
coquille de l’oeuf eft quelquefois mouchetée
en font un témoignage. Lcrfque la ponre n’eft
que d’un petit nombre d’oeufs elle a lieu de
jour en jour, & elle finit le quatrième, fi ,
comme cela eft très-commun parmi les petits
oifeaux , c’eft le nombre des oeufs d’une
couvée ; mais fi la ponte eft de beaucoup
d’oeufs , comme vinge & davantage , air.fi
que la chofe a lieu dans les efpèces de la
Perdrix, du Fai fan, alors après quatre ou
cinq jours de ponre continue , il y a un ou
deux jours d’intervalle. Mais foit que la
ponre s’exécute d’un jour à l’antre fans interruption
, foit qu’il y en ait , la femelle
qui a commencé à pondre, ne relie fur fes
oeufs que par momens, & ne couve pas affez
de tems de fuite pour que le germe
commence à fe développer par l’aétkm de
la chaleur. Ce n’eft que quand la mère ne
doit plus pondre qu’elle garde le nid avec
affiduité ; alors elle ne le quitte plus que
par intervalles fort courts , & le germe commence
à fe développer en même-tems dans
tous les oeufs, auffi les petits en forrent-ils tous-
le même jour à quelques heures les uns des
autres, & le plus fou vent prefqu’en même-
tems. S’il y a donc des petits plu? foïbles que
les autres, ce n’eft pas qu’ils forcent des oeufs
pondus lès derniers, que les petits plus ro-
buftes aient'commencé à vivre plutôt dans
les oeufs qui ont été dépofés les premiers; c’eft
que parmi les couvées, comme parmi les portées
des quadrupèdes, il y a des individus
plus ou moins robuftes, fans qu’on puiffe en
déterminer la caufe. Comment a-t-on d’ailleurs
imaginé que les petits fe formaffène
f