
peu fi elles n’ont pas une trop longue durée,
& elles font beaucoup de bien par la grande
quantité d’infeétes dont elles délivrent ; mais
pour les froids de l’hiver , c’eft en vain qu’on
en attend le même fecours, Quelques rigoureux
qu’ils foient, ils rie font que fufpendre
le développement des infeéles ; ils n’en font
périr aucun de ceux qui doivent paroître
au printems , & que fon influence met en
mouvement.
De même que les années chaudes & humides
font les plus favorables aux infeéles ,
e’eft dans la même contrée , dans les lieux où
Iachaleur & l’humidité fe trouvent combinées,
& dansles climats où ces deux circonftances fe
rencontrent plus conftamtnent & à un plus
haut degré, que les efpèces d’infeéles font plus
variées, plus multipliées , que les individus
d’une même efpèce font plus nombreux , que
lesefpèccs font plus grandes. Sur un efpace
déterminé dans nos climats', il y a plus d’ef-
pèces d’infeéles & d’individus de chaque efpèce
dans les prairies, au bord des eaux
ftagnantes, à l’entrée & fur la lifière des
bois , où la chaleur & l ’humidité fe combinent
, tandis que la fraîcheur prédomine
au centre, que dans plaines, fur les coteaux
expofés au fouffle du vent & à l’ardeur du
foleil qui y rendent l’air trop fec, que dans
le centre des bois où la fraîcheur fe fait trop
fentir : il y en a beaucoup dans les, endroits
expofés au midi ou au couchant, où la chaleur
& l’humidité font plus fréquemment
combinées, moins au levant où la chaleur
prédomine fouvent avec la léchereffe , &
très peu à l’expofuion du nord qui eft sèche
& froide.
Si nous quittons notre climat pour nous
tranfporrer, d’après le récit des voyageurs,
dans les contrées éloignées & les parcourir,
nous trouverons qu’en nous portant du côté
du nord, la quantité d’infeétes eft moindre
à proportion qu’on avance vers les pôlés ;
que les efpèces font moins multipliées, moins
variées & moins fécondes en individus ; en
bous portant au contraire du côté du midi,
& en nous avançant yets la zone torridé ’
nous trouverons plus d’efpèces d'infectes,
des efpèces plus grandes, un nombre plus
confidérabie d’individus des mêmes efpèces
& des individus plus grands, à mefure que
nous avancerons à travers des régions où la
chaleur & l’humidité fe réunifient; mais
quand nous arriverons dans l’ancien continent
, fur les terres sèches, brûlées , qui
font lous la zone torride, nous rencontrerons
bien un très-grand nombre d’efpèces d’in-
leétes , mais beaucoup d’efpèçes fort petites,
beaucoup d une grandeur moyenne , peu
d’une forte taille , & aucune d’une grandeur
comparable à celle des efpèces que nous
obfetverons dans l’autre continent fous les
mêmes parallèles. C ’eft fous -la zone torride
du nouveau continent , ou fous les climats
qui en font proches, qu’il faut chercher,
& la plus grande quantité d’efpèces d’infeétes
& les efpèces. les plus grandes. On y
en trouve qui ont trois & quatre fois la
taiile de celles de même genre qu’on rencontre
ailleurs ; c’eft dé. la Guyane, du pays
des Amazones, des terres ..tra.verfées par
l’Orénock & le Maragnon , du Rréfil., &c.
qu’on nous apporte l’Hercules, 1 ' Alcides, VAction
, le Jafon, le Scaber. Ces Scarabés ,
dont la taille excède trois & quatre fois
celles des plus grands Scarabés des .autres
contrées ; le Lancifcr, le Sakceus, deux Scarabés
, fuivant Fabricius, & félon le fyftême
de Geffroy, deux Copris d’une taille fi peu
proportionée à celle des infeéles du même
genre ; mais c’eft fur - tout parmi les
Priones qu’on trouve entre les infeéles des
terres méridionales de l’Amérique & ceux
des autres contrées une énorme difpropor-
tion ; tels font le Prionus Gigantaus, le
Longimanus , le Curvicornis, &c. C ’eft également
à la Guyane qu’on trouve le Papillon
hécube , le Tancer , ces deux Papillons diurnes
, qui furpaflent en grandeur les. Papillons
aulfi diurnes des autres contrées. Ce font
les mêmes régions de l’Amérique, defquelles
s’élève fans celle une abondante humidité
que le foleil échauffe continuellement, qui
nourriffent les plus grandes efpèces de Blattes,
de Criquets, de Sauterelles, de Manthes,
& les plus grands infeéles en général. Ce-,
pendant la Courtilière eft beaucoup plus
petite à la Guyane', d’où je l’ai fouvent reçue
, qu’en Europe , & les Guêpes qui y vivent
en fociété, qu’on nous en envoie, font
atiffi plus petites que les nôtres. Mais ces
exceptions dépendent de quelques circonftances
particulières fort difficiles à préfumer,
qu’on pourrait reconnoître dans le pays,
& elles ne fourniffent pas une objeélion fondée
contre l’aflertion qu’en général c’eft dans
lesclimatschauds de l’Amérique qu’on trouve^
les plus -grandes efpèces d infeéles. La Courti-
lière ne ferait-elle pas plus petitedans ces climats
qu’en Europe, parce qu’élevant fes petits
dans un nid creufé en terre , paflant fa
vie fous une couche épaifle de terre végétale
, celle de l’Amérique plus conftammenr
humide , y eft plus fraîche, que la Courtilière
n’y trouvant qu’une, terre compaéte,
rendue denfe par l’humidité, au lieu de la
terre meuble & légère, des potagers dans
laquelle elle habite en Europe, n’y reçoit
pas de même les impreflions de la chaleur
qui pénècrent moins lefolcompaél & humide
de 1 Amérique? Ainfi , quoique fous un climat
chaud, elle relfent moins l’influence du
foleil à la Guyane qu’en Europe.
Si du nouveau continent nous repaflbns
a l’ancien, nous trouverons dans la partie
méridionale de l’ Afie , dans les indes , de
fort grandes efpèces' d’infeétes, fans y en
rencontrer d’une taille aufli forte qu’en Amé- 1
rique. On nous apporte de fort grands infeéles,
d’une taille fort au deilus des nôtres,
de Batavia, des Moluques, de la partie
méridionale de la Chine, du Bengale, &c.
Mais l’humidité eft très forte dans ces contrées
pendant lix mois , fans qu’elle diminue
la force de la chaleur; les terres imbibées
& fortes la confervent long-rems, elle
eft encore entretenue par les rivières abondantes
, par les grands fleuves qui traverfent
& pénètrent les' terres , par les la c s , les,
marres, relies des pluies dans les lieux bas :
ainfi, dans ces contrées, l’humidité 8c la
chaleur régnent en tout teins & enfemble.
Je n’ai pas parlé des eaux détournées des
rivières pour inonder les rizières dans la
fai ion sèche , quoique l’étendue de ces eaux
faite de ces pays des lacs prefque continus,
& répandent •nécelïairement de l’humidité
dans l’air. Ces aüuvions n’entrent pas dans
l’ordre de la’ nature ; mais leur ufage remonte
a une fi haute antiquité, qu’on peur
penfer qu’elles contribuent à la propagation,
au développement des infeéles, à en rendre
les efpèces plus grandes , en augmentant
l’humidité. En nous approchant des terres
brûlées & des fables de l’Afrique , nous trouverons
encore de grandes efpèces d’infeétes
au Cap de Bonne - Efpérance , - où il tombe'
chaque année de longues & abondantes pluies
continues, & où dans la faifon sèche, les
terres font arrofées par de violens orages
qui furvienneiit de tems à autre ; mais en
pénétrant vers le centre de l’Afrique , en
paflant fur les côtes dé Barbarie , ou les
fables de l ’intérieur, les terres qui font fur
la côte, ne font raffraîchis que par quelques
journées de pluie en automne , & expofés -
le relie de l’année aux rayons ardensdu foleil,
nous ne trouverons plus que des efpèces d’infeétes
d’une grandeur médiocre, & un grand
nombre d’efpèces très-petites. La chaleur,
caufe première de la propagation , y vivi-'
fie un grand nombre de germes , mais le défaut
d’humidité en reftreint le développement.
Non-feulement les efpèces dinfeétes
de ces contrées ne font que d’une grandeur
médiocre , mais celles qui font analogues
aux efpèces qu’on trouve aufli en Europe ,
ou qui font décidément les mêmes, y font
plus petites. Les aflertions que j’avance en
cet endroit font fondées fur la comparaifon
des infeéles ramalfés au Sénégal, dépofés
au cabinet du Roi par M. Adamfon avec
les infeéles des autres contrées ;fur la même
comparaifon des infeéles que M. Desfontaines
a rapportés en grand nombre des
côtes de Barbarie, & parmi lefquels il y
a des efpèces qui font les mêmes qu’en
Europe. Ainfi , les terres habitées par
les quadrupèdes de la plus grande taille ,