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en fermentation : c’en a été affezpour qu’on
ait penfé long-tems que la digeftion n’étoic
qu’une véritable fermentation ; mais le produit
eft fort différent de celui des fermentations
qui s’opèrent hors du corps des animaux
, de la fermentation acide & de la
putride , & du produit de la fermentation
fpirituenfe. De plus , on a vainement tenté
ou d'enfermer dans des vailfeaux qu’on bou-
choit, & qu’on expofoit à une chaleur analogue
à celle de l’elfomac, ou des fubftan-
ces alimentaires qu’on humeftoit fufnfam-
ment , & qu’on avoir auparavant divifées ,
broyées pour imiter la maftication, ou des
fiibftances qui avoient été même broyées
fous les dents, qui avoient fubi la maftication
SI avoient été imprégnées de falive.
Ces fiibftances ou n’ont pas fermenté, ou
le produit de leur fermentation n’a pas ref-
femblé à celui de la digeftion. Il paroît donc
que la digeftion eft une fermentation -d’un
genre particulier & déterminé par h fuc gaftrique
qui en eft le principe. On ne peut
douterqu’il le fuir, d’après l’expérience fui-
vanre toujours la même, répétée fouvenr &
fuffifamment conftatée. Des fragmens d’ali-
mens ont été enfermés dans des tubes de
métal ou de bois ; on a bouché les deux ouvertures
de ces tubes ; leurs parois écoienc
bradent l’eftomac-en tout feus, les unes de
l’une à l'autre de fes extrémités, les autres
circulairetnenr, fous toutes fortes d’angles ,
conclurent que la contraéliôn de cette cou-
1 che étoit le moyen employé par la nature
pour opérer la digeftion; qu’elle fe faifoic
par la trituration ; que les alimens contenais
entre des membranes rapprochées, mues en
cour fens, en fuivoient les mouvemens,
croient broyés, mêlés aux fluides, dillous,
& fe changeaient en une forte de pulpe ,
ou de liquide qui eft en effet le produit de
fa digeftion quant à la confiftance desfubf-
tances digérées. Cette opinion a long-rems
prévalu , & elle a eu des partifans zélés ,
qui , appliquant mal - à - propos les calculs
géométriques à l’économie animale^ élevèrent
percés de trous trop petits pour donner paf-
fage aux alimens , & qui permettoiem à un
fluide d’entrer dans les tubes; ils ont été
avales j & quelques heures après, fott qu’on
les air retirés de l’eftomac dés animaux, foit
que des hommes courageux ( M. Spalanzani),
qui avoient formé le delfein de fervir eux-
mêmes à l’expérience, les aient rendus par
le vomiffement, les tubes fe font trouvés
vuides, les alimens qu'ils contenoient diffous
& changés eu un produit femblable à cehti
de la digeftion , qui avoir palfé dans l’efto-
mac pat les trous pratiqués fur les parois .
des tubes.
Quelques anatomiftes ne confidérant dans
l’cftomac, par rapport à la digeftion, que
l ’sétion de la couche mufculaire ,& faifam
attention que les fibres de cette couche em- !
la force de concraélion des fibres mufculaires
de l’eftomac de l’homme a une puif-
fance de plufieurs milliers. Mais ce lenti-
ment n’a pu fe foyitenir contre -l’exemple
des tubes que j’ai cités, a l'intérieur def-
' quels les alfmens cchappoient à la force de
conttaélion des fibres mufculaires & n’en
étoient'pas moins digérés ; d’ailleurs les
tubes auraient dû être broyés par une force
aufîi gra nde que celle qu’on fuppofoit, Si
ils ont été ou trouvés , ou rendus entiers;
leur futface étoit feulement polie, ou même
un peu ufée & appiatie dans quelques animaux;
c’étoic dans les oifeaux granivores
dont l’eftomac, fi différent des autres animaux,
n’eft en quelque forte qu’un mufcle
très-épais & très-fort : ces oifeaux avalent
leurs alimens fans les broyer, ils ne font
qu’amollis dans le jabot ou la poche ; l’eftomac
plus fort fupplée , par la contraélion de
fes fibres, aux préparations que les alimens
n’ont pas éprouvées; mais la membrane interne
de l’eftomac de ces oifeaux, eft , comme
la membrane interne de l’eftomac des
antres animaux , d’un riffu particulier ; elle
eft la plus ample, elle forme dés plis & il
en tranfude un fluide ; il paraît donc que
dans ces oifeaux la trituration ou la con-
traélion des fibres mufculaires de l’eftomae,
contribue plus à la digeftion que dans les
autres anitpaux ; qu’elle remplace l’aéïion
des
P R É L I M x!:x
des parties qui manquent aux oifeaux , &
fupplée aux préparations que le grain n’a pas
éprouvées; mais,, que dans les animaux en
général, dedans les oifeaux granivores même
en particulier, la digeftion eft le produit
d’une fermentation d’un genre particulier,
déterminé par le fuc gaftrique qui en eft
le principe ; St comment, fans cela , le grain
contenu dans les tubes , fe feroit-il trouvé
diftous & digéré, ainfi que les autres alimens?
Il n’en faut pas conclure que les fibres
mufculaires n’ont pas d’aétion relativement
à la digeftion ; -il eft probable que leurs con-
traitions , que le mou veulent qu’elles communiquent
aux membranes du vifeère & aux
alimens,-qu’il contient, favorifent la diflblu-
tion des alimens , Jeut mélange avec les fluides,
&»’;>!eur converfion en- une fubftance
pulpeufe ; c’eft un troifième agent, mais
Secondaire, comme la ra refait ion de l’air par
la chaleur du lieu. L’agent principal eft le
fuc gaftrique qui excite le mouvement in-
teftin des .parties alimentaires & la fermentation';
celle ci opère un changement dans
la maftè alimentaire, St c’eft en ce changement
que la digeftion confifte proprement;
l’effet qui. en réfulte eft la converfion des
alimens en une fubftance liquide qui paffe
dans le canal inteftinal, & que nous allons
fuivre dans, fon trajet à travers ce long canal.
Les -alimens réduits en une fubftance pulpeufe
, après un féjour de quelques heures
dans l’eftômac, paflent par fon orifice inférieur
dans le-canal inteftinal qui prend fon
origine à cet orifice ; ils font entraînés par
leur poids, l’eftomac fe trouvant plus élevé
que l’entrée des inteftins,& ils y font fur-
tout pouffes par la contraélion de la couche
mulculaire de l’eftomac.
La pulpe alimentaire paffée dans le canal
inteftinal, y éprouve i ° . l ’aélion de ce canal,
z°. celle de différens fluides qui s’y déchargent.
Oa fe forment que le canal inteftinal a
lamême ftruéture que l’eftomac , & qu’il a
un mouvement d’ondulation : la contraélion
Hj/loire Naturelle, infectes, Tojne J.
1 N A 1 R E.
de fes fibres mufculaires continue de favo-
tifer la dilfolution des parties de la pulpe
alimentaire & leur mélange avec les fluides;
fon mouvement ondulatoire détermine leuc
trajet à travers le canal. En effet, qu’on en
fuppofe la longueur de deux travers de doigt,
remplie par la pulpe alimentaire, fon con-
taéf excite dans cette longueur l'irritabilité
du canal, & détermine la contraétion des
fibres mufculaires dans la même,étendue;
la portion de pulpe preffée entre les membranes
du conduit, s’échappe du epeé où elle
ne trouve pas de réfiftance, & c’eft; vers les
parties inférieures du canal; car vers le haut,
ou il eft encore contraâé par l’aétion de la
pulpe, qui vient d’y paffer , ou il eft rempli
par une nouvelle pulpe qui y a defeendu ,
ou enfin la pulpe éleveroit des valvules dif-
pofées à différentes diftances dans différentes
portions du canal , qui s’oppoferoient à fon
retour; mais la route eft ouverte par le bas ,
où aucune caufe n’a encore déterminé la contraélion
, le refferretnent & Je mouvement
du canal; c’eft donc de ce côté & par cette
voie que la pulpe alimentaire s’échappe ,
s’avance à travers lé canal. Ce que j’ai dit
fur deux travers de doigt de long, peut s’appliquer
à toute l’étendue du canal , & faire
concevoir comment la inaffe des alimens le
traverfe.
Les fluides qui fe répandent dans le canal
inteftinal , font i°. un fluide féparé par des
glandes placées de diftance en diftance. •
i ° . Le fuc pancréatique.
3°. La bile.
Le fuc filtré par les glandes des inteftins
paraît être lymphatique; on croit qu’il 1ère
à augmenter la fluidité de cette partie hourrif-
fante, extraite des alimens par la digeftiou
qu’on nomme le chyle.
Le pancréas eft un vifeère affez volumineux
, formé par la réunion de plufieurs
glandes ; il eftoblong, applati & a.quelque
chofe de la forme.d’une langue ; les glandes