
P p ».jr
xlvj D I S C O U R S
La même action a-t-elle lieu dans tous les
animaux , même dans les infe&es , pendant
qu’ils prennent des alimèns ; ou tous les animaux
même les infedes, ont-ils de la fa-
live ? Le fait eft trop évident par rapport aux
quadrupèdes , à plufieurs quadrupèdes ovi^
pares 8c différens reptiles pour s'arrêter à'le
•• prouver : il ne paroît pas que les oifeaux
aient de falive , s’il né faut donner ce nom
qu’à un fluide qui hume&e les alimens dans
la bouche ou dans la partie qui y répond ;
l ’intérieur même du bec des oifeaux ne
paroît point humedé par un fluide qu’on,
puiffe appeller de la falive , jii même comparer
à cette humeur ; mais ces animaux ont
un vifcère intermédiaire entre l ’afophage, ou
conduit des alimens de la bouche à l’efto-
mac, qu’on ne trouve pas dans les autres
animaux ; fa forme, fa fubftance membra-
lieufe, l’ont fait appeller la poche. Ce vifcère
abonde en une férofité qui l’humeéjte , qui
découle de fes membranes , qui s’amafledans
fa cavité; les alimens qui y féjournent s’a-
molliflent ; il y a lieu de croire que c’eft par
Tadion du fluide qui y abonde , que ce fluide
eft analogue à la falive qu’il a , fur les alimens
pendant leur féjour dans la poche
la même adion que la falive fur la nourriture
dans la bouche pendant la mafti-
çation ; il paroît donc que les oifeaux ont
réellement de la falive, & qu’ils en ont en
aufîi grande abondance que les quadrupèdes.
Les infedes en ont-ils aufli ? Plufieurs de
ceux qui ont une bouche 8c des mâchoires,
proprement dites , ont fouvent ces parties
humedées d’un fluide qui s’amafle & tombe
en goutte à l’extrémité de la bouche , ceux
qui fe nourriflent par une trompe , en font
fortir une liqueur qui ferr à délayer les fucs
trop épais , qu’ils- ne pourroiene afpirer autre*-
ment. Il y a toute apparence que dans ces
deux cas , les liqueurs exprimées par les infedes
font vraiment de la falive , & qu’elles
en ont l’ufage 8c les propriétés. Lorfqu‘,on inquiète
certains infedes , ils répandent la liqueur
que nous fuppofons être leur falive,
comme plufieurs quadrupèdes lancént la leur
en pareil cas contre leur ennemi. C ’eft un
rapport de plus.
Nous ne nous fommes encore occupés que
du premier tems de la digeftion ou du choix
des alimens , de la manière de les prendre,
de l’adion qu’ils fubiflent dans la bouche ,
des parties qui fervent à ces deux objets, des
rapports encre cçs parties, la nature des alimens
, 8c celle des vifeères qui en opèrent la
digeftion. Nous allons palfer au fécond tems
de cette fondion , au féjour des alimens
dans Peftomac 8c les inteftins, à la compa-
raifon de ces vifeères entre les différens animaux
8c les infeétes , & à l'examen de leur
adion fur les alimens
De la digejlion proprement dite, ' .
J’appePe digeftion proprement dite , les
changemens que les aliipen-s fubiflent dans
l’eftomac 8c les inteftins ; ils pa fient de la
boucheà l’eftomac par un canal membraneux,
qu’on nomme æfophage, & qu’on peut re-
connoître dans les infedes même ; leur trajet:
à travers ce canal eft déterminé par la con-
traélion de quelques fibres mufculaires qui
entrent dans fa compofition. .
L’eftomac eft placé dans la capacité du bas-
ventre ; il eft membraneux 8c fortifié par une
couche mufculaire ; nous favons déjà qu’il eft
plus ample, que fes membranes , la couche
mufculaire , font plus fortes , plus épaifles
dans les animaux frugivores que dans les carnivores
; que dans les. oifeaux qui font granivores
, il eft à proportion plus petit que dans
les autres animaux , &c qu’il eft entièrement
formé par des couches mufculaires : ajoutons
que la membrane interne de leftomac eft la
plus mince, qu’elle eft beaucoup plus ample1
que celles qui l’enveloppent , qu’elle forme-
des plis nombreux ? qu’on lui donnede nom
de membrane veloutée, & qu'il en découle ,
eh grande abondance , un fluide qu’on nomme
fuc gajlriquç,
P R É L I M I N A I R E . x ! V if
Les inteftins font un long canal qui , prenant
fon origine à l’eftomaç, fe termine a 1 a-
nus. Ce canal a la même ftrudure que 1 efto-
mac ; on le divife idéalement en deux portions
qu’on fubdivife chacune en trois :-on
nomme la première les intejlins greles ; la fécondé./
« gros 'inteftins ; 1 es premiers ont
beaucoup plus de longueur 8c moins de diamètre
ou de capacité , & c’eft cette différence
qui eft exprimée par celle des noms des
deux portions ; l’une & l’autre forment un
orand nombre de circonvolutions , & leur
longueur totale furpaffe d’un plus ou moins
grand nombre de fqis celle du corps, félon
les efpèçes ; à l'intérieur de ce canal font
placées en différens endroits des glandes
lymphatiques ; ce canal a dès pores qui s’ouvrent
dans les vaiffeaux lymphatiques , ou
ces vaiffeaux naiffent de l’intérieur de ce canal
; plufieurs, fe réunifiant en s’éloignant
du canal;, forment des vaiffeaux plus ouverts
, qu’on nomme vaiffeaux lactés , ils
aboütiffent tous vers le bas de la colonne
épinière , à un réfervoir membraneux qu’on
nomme réfervoir de pecquet, de ce réfervoir
naît un canal afcendanr, qui vient fe terminer
à la veine louclavière gauche.
Les inteftins ont un. mouvement qui leur
eft propre ; il corififte en une force d’ondulation
, il réfulte de la eontraéHon des fibres
mufciilaires circulaires qui reflerrent le canal ,
& de celle des fibres longitudinales qui le
raccourci fient ; on le nomme mouvement pè-
rlfialuque, & aufiî ventriculaire de la ref-
femblance qu’on a cru trouver entre ce mouvement
& celui des vers.
A l’intérieur du canal inteftinal s’ouvrent
deux .conduits, l’un placé peu au-deffous de
fon origine , & l’autre au-deflbus du premier
; l’un vetfe dans fon panai la bile qui
coule inceffamurent du fo ie , & celle qui , de
ce vifcère , a paffe en réferve dans lavéficule
du fiel pour ne couler qu’en un certain tems ,
& particulièrement pendant la digeftion ; par
l’autre canal, coule un fluide qu’on croit analogue
à la falive', & qui eft extrait &. fourni
pat un vifcère qu’on nomme le pancréas, & le
fluide qui en découle ,fu c pancréatique. Tels
font,en général, les objers qu'il étoit néceffaire
de remarquer par rapport à l’eftomac & aux
inteftins avant d’examiner leur aétion & d'en
chercher les caufes ; je ne fuis point entré
dans l’énumération des fubdivifions du canal
inteftinal, parce que ces fubdivifions ne fau-
roiçnr Être fumes dans les infeéles ; il fuffit
de remarquer ici , en général, qu’on recon-
noît dans les infeétes , comme dans les autres
animaux , un eftumac , un canal inteftinal ,
nous examinerons leurs rapports & leurs différences
avec les mêmes 'vifirères des autres
animaux , après nous être,occupés de la manière
dont fe fait la digeftion , de l’aélion
des. agens qui l’opèrent fur les alimens.
Les alimens parvenus à l’eftomac fous la
forme d’une mafle dont les parties font di-
vifées , broyées , pénétrées par un fluide qui
les humpéte, & contenues par les feuls parois
du vifcère où ils font reçus , y éprouvent
i° . la chaleur du vifcère ; r ° . l'action du
fluide qui tranfude.de fa membrane interne ;
3?. celle des fibres de fa couche mufculaire
dont la ptéfence & le contait des alimens
excite l'irritabilité & détermine la contraction.:
L’air contenu dans les alimens eft raréfie
pat la chaleur de i’eftomac ; il écarte, en
' fe raréfiant , il fépare & défunit les. parties
des' mofécules qui le contenoient , il augmente
la divifion de la mafle alimentaire.
Le fuc gaftrique ou le fluide qui coule
de la membrane interne d e ,l’eftomac pénètre,
les alimens, augmente leur défunion, &
.excite dans leur mafle un mouvement intef-
tin, une fermentation d’un genre particulier
& encore peu connu. En effet, fi quelque
tems après qu’un animal a pris des alimens
' & pendant qu’ils font encore contenus
dans l’eftomac, on le tue, on feue
à l'ouverture de leftomac une odeur analogue
à celle que répandent les fubftances
qui commencent à fermenter, & qui approchent
de celle du moa ou du vin nouveau