
les organes de la génération ne font ni développés
, ni en état d’exercer leur fond-ion. La
dernière forme des infedes eft proprement
le terme de leur accroiifement : dans les états
précédera , il s’eft fait en eux un développement
fucceflif , & non interrompu ; mais
au!ii tôt qu'ils font parvenus au dernier , il
n’y a plus pour eux aucun développement,
aucun accroiifement : ainfi les infedes rentrent
dans l’ordre général , en ce qu’ils ne
• fe reproduifent que quand l’accroilfement de
l'individu eft complet. Mais ii y a entr’eux &
les autres animaux une différence bien grande.
Quelque courte que foit la durée de la vie
des différens animaux , ils fe reproduifent
plufieurs fois ; ils ne font pas bornés à un feul
ade ; ils continuent de vivre même après le
dernier. Tous les infedes, au contraire, qui
fübiffent desmétamorphofes, ne s’accouplent
ôc ne multiplient qu’une fois. Aucun mâle
ne furvit à fon union avec la femelle & aucune
femelle au dépôt de fes oeufs. Cette
différence eft une fuite de lorganifation.
Parmi les différens animaux , le mâle ne
dépenfe dans, chaque ade qu’une petite quantité
de fucs vivihansj il ne s’épuife pas ti
les ades ne font pas trop répétés 5 fes organes
réparent la perte qu’il a faite, ôc ceux de la
génération féparent de nouveaux fucs} ceux
qu'il a répandus n'ont communiqué la vie qu’à -
un nombre limité des germes contenus dans les
organes de la femelle; celle-ci conferve encore
des germes qui peuvent être fécondés
par une autre approche d’un mâle de fon
efpèce 3 & elle ne ce (fera d’être féconde que
quand tous les germes qu’elle porroit auront
été fuccelfwement vivifiés, qu’il en fera fur-
venu des embrions qu’elle aura nourris & mis
bas ; -alors elle fer-a ftérile parce qu’elle ne renfermera
plus de germes ^ ou que s’il en r eft oit
-encore j fes organes, parce qu’elle aura vieilli,
ne pourront plus fournir à leur développement
& à leur entretien. Il n'y a donc pour les animaux
en général qu’une dcpenfe partielle &
-fuccelfive, tant de la part du mâle que de la
femelle, dans chaque ade & dans chaque
portée j une dépenfe que le mâle eft en écat
de réparer pour la partie qu’il fournit, &
que la femelle répare également quant aux
fucs neèeffaires pour le développement &
1 entretien des germes : mais les infeâes,
en arrivant à leur dernier état , font non-
feulemen au terme de leur accroiffement,
ils touchent auffi à celui de leur vje ; leur
fibre à acquis toute la rigidité dont elle eft
fufceptible, leurs organes nutritifs font rapetif
fes ; les fucs que des organes plus fouples, plus
amples, plus propres à leur fonction avoienc
préparés dans les deux premiers états , ont
ete tous accumulés dans les organes de la
génération du mâle, beaucoup plus amples
à proportion que dans aucun autre animal :
ces fu.cs, donc il repompoit une partie,
l’animoienc, lui donnoient de l’aâivité dans
fon aernier état ou dans fa vieillelfe, tems
où il n’â plus que des organes nutritifs foi-
bles , où il en manque quelquefois tout-à-
faic, où il ne peur à peine fournir à fon
entretien, loin d’avoir de l’excédent. Mais
il dépenfe tous ces fucs furabondans , il
les répand fans réferve dans le feulj a&e
auquel il fe livre ; il eft donc épuifé à la
fin de cet atfte, il eft lourd ôc lâriguiftanr,
d’adlif & d’animé qu’il étoit : il eft accablé
du poids de la vieillelfe, & il périt, parce
que fes organes nutritifs , dans les efpèces
qui en ont , ne fourmlfenc 'qu’une quantité
infumfance de nourricure , parce que . dans
celles qui manquent' de ces organes le mâle
n’a plus de reflource en lui - même , & ne
cdncienc plus de fucs qui puilfent être repompés.
Quant à. la' femelle, fes organes
de la génération font , comme ceux du
mâle , beaucoup plus amples que ceux d’aucun
autre animal ; ils contiennent un nombre
de germes infiniment plus grand, tous ces
germes ont été fécondés en même-tems par
l'abondante liqueur donc le mâle'les a ar-
rofés ; les fucs nutritifs qui avoient été dé-
pofés dans les organes de la femelle , qui
fervoiem en partie ou en totalité à l’alimenter
elle-même, font confommés pour le déve-
loppement des germes, pour la formation
des oeufs, pour leur dépôt. Quand la femelle
s’en eft déchargée, elle tombe donc aulîî
dans
dans l’engourdiftemenr, elle s’affoiblic &
meurt, parce quelle eft épuifée, parce que
ou elle n’a que des organes nutritifs infuf-
fifans pour l'alimenter-, ou parce quelle n’a
pas même de pareils organes , & qu’il ne
lui refte point de fucs qui fourniffent à
fon entretien. Les infeétes meurent donc
d’épuifement & de vieillelfe ; le mâle,
prefqu’aulïi- tôt après s’être accouplé , &
1^ femelld après avoir dépofé fes oeufs :
un feul a£te les conduit au terme fatal,
& 'lès y fait toucher précipitamment ; les
autres animaux y font conduits de même
par la vieillelfe, le delféchement de la fibre
& 1 epuifement -, &, chaque atfte de la génération
qu’ils répètent accélère en eux le terme
de leur vie.- Car tout animal , foir male,
foit femelle, qui multiplie, ne communique
l’exiftence qu’aux dépens de la fienne ; il
s’affoibli: en partageant le principe de fa
force, l’agitation violente qui accompagne
l’atfte qu’il exécute, hâte le delTéchement de
fa fibre & l’arrivée de la vieillelfe, il s’approche
de la mort en donnant la vie. Mais,
les animaux, en général, ne parviennent que
lentement & par degrés à ce terme fatal ,
les infeétes y touchent, en un inftanr. C e pendant
tous les animaux, les infeâtes comme
les autres, fe portent vers fade de l’accouplement
avec un emprelfemenc, une ardeur,
une fureur même qu’ils n’ont pour aucune
autre de leurs adions. Soumis tous à la loi
de ne fe reproduire qu’à leurs dépens, de
ne communiquer la vie qu’en prenant fur
la leur, un atcrait irréfiftible les entraîne
&• les précipite. C ’eft que leur fenfation la
plus vive eft le defir qu’ils éprouvent de fe
reproduire, leur jouiffance la plus exquife,
celle qu’ils goûtent pendant l’ade au moyen
duquel ils fe multiplient, que la fenfation
qu’ils éprouvent avant &>pendam l’ade leur
fait oublier toute autre imprelfion, & s’abandonner
fans réferve à celle-là feulement.
Que! autre fait pourrait préfenter l’idée d’une
légiflarion plus parfaite, & dans laquelle
l’accomplilfement de la loi ferait plus certain
? Les individus doivent perpétuer les ef-
peces, ils ne fauroient communiquer l’exif-
Hijloire Naturelle, Infectes. Tome 1$
tence qu’au détriment de la leur; cependant
l’accomplilfement de la loi leur eft confié, &
elle ne fauroit manquer d’étre ^exécutée,
parce que le defir le plus ardent des individus,
eft de la remplir, & qu’ils gourent,
pendant qu’ils s’y foumettent ,1e bonheur le
plus vif dont ils jetoiffent. Toute loi à l’ac-
compliffenient de laquelle celui qui y eft
fournis trouvera un attrait puilfaiit & un
dédommagement qu’il eftime plus que le
facrifice qu’il fait, fera exadement exécutée',
& ne fera- jamais éludée : mais ce
n’eft peut - être qu’au légïflateur fiiprême
qu’il appartient de concevoir & de^ dider
de pareilles loix.
Des différens tems de [ année dans lefquels
les animaux multiplient.
Il n’y a point de femelles qui éprouvent
des defirs continuels ; toutes ne fentent le
befoinde multiplier que par intervalles, mais
ces intervalles font fouvent répétés dans certaines
efpèces , leur retour a lieu indifféremment
dans les divers tems de l’année ;
ils font plus éloignés dans d’autres efpèces,
& ils n’arrivent , chaque année , qu’à un
époque fixe, dans laquelle toutes les femelles
de même efpèce fentent à -peu-près en même
tems le .même befoin , tandis que dans les
autres" efpèces il y a des femelles qui ont
des defirs pendant que d’autres n’en éprouvent
pas. Il n’y a que les quadrupèdes parmi
lefquels il y ait des femelles qui fentent
indifféremment dans tous les tems de l’année
le befoin de fe reproduire ; tous les
autres animaux ne font fournis à ce befoin
qu’à certains tems qui font toujours les
mêmes chaque année par rapport aux individus
de même efpèce : car le retour périodique
du befoin de fe multiplier arrive a
différens tems de l’année fuivant les efpèces.
Dans celles où les femelles fentent indifféremment
des befoins dans tous les tems de
l’année , les mâles ne ceffent pas d’être en
aétiviré, ou ils s’animent à l’approche d’une
femelle de leur efpèce qui éprouve le befoin
de multiplier ; dans les autres efpèces, les
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