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ces feuilles qui fervent en même-tems à les
cacher.
M. de Réaumur diftingue dans les Ar-
penteufes du fécond genre une efpèce remarquable
par le pert des ailes du Papillon
qu’elle produit; c’eft une Phalène à antennes
en barbe, qu i, contre la coutume des Papillons
de nuit, porte fes ailes relevées à
la manière des Papillons diurnes. Cette Chenille
vit fur le genet; elle eft d’un vert
brun,/
M. de Réaumur comprend dans le troi-
fième genre» les Arpenteufes qu’il nomme
Arpenteufes en bâton , expreflion qui donne
une idée fort jufte d’une manière d’ctre qui
leur eft très ordinaire, 8c dans laquelle leur
corps eft auffi roide qu’un bâton ; elles ont
le plus fouvent une couleur brune; ce qui
achève de les faire prendre pour un vérira-
ble morceau de bois ; il entre enfuire dans
les détails nombreux des variétés de grandeur,
de formes des différentes parties &c.
qui peuvent fervir à diftingüer les diverfes
efpèces d’Arpenteules.
Les Chenilles de cette nombreufe claffe
entrent la plupart en terre , où elles deviennent
chryfalides dans une coque qu’elles
fe font préparée. Quelques-unes cependant
filent une coque’ entre des feuilles qu’elles
ont phées, roulées, ou fimplement raffem-
blées ; d’autres tendent feulement d’une
feuille à une autre des fils qui fuffifent pour
retenir la chryfalide ; enfin il y en a qui fe
fufperidenr pour fe métamorphofer. D ’une
Chenille de cette efpèce naquit un Papillon
nodfurne ; obfervation importante ,' en
ce qu’elle détruit une loi qu’on avoir cru
fans exception , favoir que toutes les Chenilles
qui fe fufpendent fe changent en Papillons
de jour; mais les exceptions'à cette
loi font rares. Ce qui eft fott ordinaire c’eft
que les femelles nées d’Arpenteufes font
dépourvues d’aîles , ce qui les rend très-dif.
féreuces de leurs mâles.
O U R S
Lorfqu’on inquiète une Chenille, arpen-
téufe, ou qu’ou agite feulement les feuilles
fur lefquelles elle eft pofée, elle cherche à
éviter le danger en fe laiiïant defcendre à
la faveur d’un fil de foie qu’elle alonge
a fon g ré , tantôt plus promptement ,
tantôt plus lentement, Sc fouvent à plu-
fieurs reprifes ; elle remonte aufti pat le moyen
du même fil, en le pinçant entre fes mâchoires,
en attirant fon corps, & le recourbant
vers fa tête & en renouvellant cet
exercice.
I o 6. M E M O I R E.
Des Chenilles aquatiques.
M. de Réaumnr penfe qu’on peut trouver
dans les eaux tous, ou ptefque tous les
genres d’infeéfes qu’on voit fur la terre.
Quoiqu’il foit certain qu’on y en trouve beaucoup
, cette propofition nous paroît trop
étendue. L’auteur, pour la confirmer, ajoute
que les infe&es aquatiques font plus difficiles
à trouver que les terreftres , & que ,
quoiqu’il n’ait obfervé que deux Chenilles
d’eau dont j l donne l’hiftoire , il ne s’enfuit
pas qu’il n’y en ait un beaucoup plus grand
nombre ; que l’hiftoire des deux efpèces dont
il parle eft au moins une preuve qu’il y a
des Chenilles qui vivent dans l’eau. La première
eft une Teigne, c’eft-i-dire, une Chenille
qui vit à 1 intérieur d’un fourreau quelle
fe conftruit ; elle vit fur le potamogeton,
plante aquatique dont les feuilles , auffi larges
& plus épaifles que celles de l’oranger,
s’étendent fur la furface de l’eau; elle coupe
des pièces d’une feuille, donc elle fe forme
un fourreau , compofe de deux parties roulées
l’une fut l’autre ; elle a feize jambes ,
& elle eft de la première claffe, blanche
& rafe. Quoique cette Chenille vive dans
l’eau, elle ne refpire pas cet élément â la
manière des poiffons, mais l’air, comme les
infeétes terreftres ; elle eft même toujours à
fec dans fa coque plongée dans l’eau ; la
Chenille alonge fa tête hors du fourreau &
de l’eau, la retire fans que l’eau s’introduife
dans le fourreau que le corps remplit &,
p r é l i m i n a i r e . ecv,
bouche à fon extrémités. Mais comme la
Chenille change de coque & qu’elle en conftruit
une nouvelle à mefure qu’ellegrandit, la
difficulté eft de conftruire une nouvelle coque .
qui ne contienne pas d’eau;,il faut lire,
dans le mémoire même, les détails de cette
opération.
Toutes les fois que la> Chenille veut manger
, elle alonge fa tête hors du fourreau,
8c elle ne ronge que le parenchime d un des
côtés de la feuille ; elle fe porte d’une place
à l’autre en alongeant fes premiers anneaux,
en fe cramponnant & en attirant^ fa coque
retenue pat les pattes membraneufes ; lorf-
qu’elle eft prêre de fe métamorphofer elle
tapiffe de foie l’intérieur de fa coque,, &
après avoir paffé pat l’étar de chryfalide, elle
devient une Phalène à antennes à filets gre-
nés, tachetée de brun feuille morte fur un
fond gris de perle , plus,colorée en-deffous
qu’en-deffus : cette Phalène dépofe fes oeufs
fur les feuilles du potamogeton. Cette plante
nourrit encore une fécondé efpèce de Chenille
de la grandeur à-peu près de la précédente
, mais d’un brun verdâtre. C ’eft auffi
une Teigne , mais dont le fourreau eft beaucoup
plus groflâèremenc travaillé. La lentille
deau, cette plante fi commune dans les eaux
ftagnantes , nourrit auffi une Chenille ; elle
èft d’un brun olive, avec quelques teintes
de biftre, elle a feize jambes, elle s’enferme
dans une coque formée de plufieurs feuilles
rapprochées & liées enfemble ; elle devient
une Phalène à antennes à filets grenés.
I Ie. M É M O I R E.
Des différentes efpèces d'ennemis des
Chenilles.
Les Chenilles ont un grand nombre d’ennemis,
dont les uns les dévorent toutes entières,
les autres les dépècent ou les rongent par parties
, plufieurs ne font que les piquer & fu-
cer leurs humeurs ; un grand nombre dépofe
à leur intérieur des oeufs dont naiffenc des
larves qui les dévorent. Les infeétes font de ces
différens ennemis ceux à l’hiftoire defquels
M. de Réaumur s’arrête particulièrement dans
ce mémoire. Il obfetve d’abord que les Chenilles
trouvent un ennemi dans leur propre
efpèce. C ’eft une Chenille rafe qui vit fur
le chêne, elle eft de la première claffe ,
d’un brun noir , rayée de trois' bandes
d’un beau jaune fur le dos, & d’une pareille
raie de chaque côté. Cette Chenille faific
celle de fes femblables qui fe trouve à fa
portée, la bleffe avec les mâchoires vers les
premiers anneaux , fuce.enfuite fes humeurs
& dévore fes parties internes ; elle laifle
la peau, les dents & les mâchoires. Vingt
Chenilles de cette ëfpèce enfermées dans un
poudrier où l’on renouvelloit les feuilles de
chêne au befoin , furent dans peu réduites
à une feule qui dévora la dix-neuvième. Cet
exemple eft encore unique,dans fon genre.
Mais fi ce n’eft pas dans leur claffe que les
Chenilles rencontrent de nombreux ennemis ,
c’eft dans celle des autres infedes. ’
Les uns entament la peau & fucent la
Chenille, les autres pénètrent à fon intérieur
& le dévorent. Ce font des vers de
différens infeétes. On les peut, fuivant notre
auteur, divifer en folitaires 6c en Vers qui
vivent en fociété. Les premiers ne fe trouvent
qu’au nombre d’un ou deux à l’intérieur
d’une Chenille , les féconds y font en grand
nombre ; les uns & les autres ou fe méta-
morphofent fous la peau de la Chenille, ou
la percent pour fortir avant leur changement,
ou ils ne forcent que de la chryfalide : plufieurs
fe filent des coques à côté les uns
des autres, foit à l’intérieur, foit au dehors
de la Chenille. Ces Vers font produits par
des oeufs que des femelles de leur efpèce ,
pourvues d’une carrière, dépoferit deffous la
peau des Chenilles en la piquant. Ils fe
nourriffent principalement du corps graiffeux
qui occupe la plus grande capacité du corps
de la Chenille ; ils épargnent les organes
■ néceffaires à fon exiftence & à fon entretient
; ainfi ils croiffènt à fes dépens fans
lui caufer d’abord la mort, ils'périroient eux-
mêmes ; mais le corps graiffeux eft deftiué