
On prépare encore une huile qu’on ap-
pc 11c hu! le de Scarabes, oleum Scaràbxorum.
On ecrafe une demi - livre d’in feétes dans
une livre d’huile de laurier ; on mêle bien
le tout : au bout de quelques jours on.fait
fondre l’huile à un feu fort doux , .& on la
conferve pour s’en lervir. Mais on ne dé-
ligne pas quelles efpèces de Scarabés il faut
choifir. Ce mot générique jette une grande '
incertitude fur la propriété du remède & fur
celle des préparations qu’on peut en faire,
qui peuvent être fort différentes fuivant les
efpèces de Scarabés.
On vient de voir qu’il n’y a qu’un petit
nombre d infeéles même réputés utiles , que
ttes-peu le font réellement, mais que ceux-
là nous procurent de grands avantages. La
tics infeéfes mal • faifans*, ou par eux-
memes, ou par leurs dégâts, eft au contraire
très-longue.
J’appelle infectes mal-faifans par eux-
memes, ceux qui, s attachant â l ’homme ou
aux animaux , les incommodent & les tourmentent,
ou leur caufent différens maux;
i cl cotes mal-faifans par leurs dégâts , ceux
qui gâtent ou détruifenf les fubftances qu’il
nous elt utile ou agréable de conferver. Je
corn menee par les infeéfces mal - faifans par
eux-mêmes, qui incommodent ou tourmentent
l’homme ; ce font, fuivant le degré
d’incommodiré qu’ils caufent, le Stomox.
C ’eft un infeéte à deux ailes fi femblable"
* H Mouche commune , qu’on le confond
ordinairement avec elle; il n’en diffère qu’en
ce qu’au lieu d’une trompe à greffes lèvres,
comme la Mouche , il en a une acérée dont
il fe fert pour piquer & fucer le fang : c’eft
le Stomox qui nous pique & qui nous tourmente
a la fin de l’été & au commencement
de l’automne; il eft fur - tout incommode
quand 1 ait eft chaud & humide ; fa piquure
excite une douleur affez vive, mais pafîà-
gere.
Le Coujîn, quoique beaucoup plus petit
Je Stomox , pique de même la peau
qui eft nue ou couverte d’un vêtement , lé-
S>er 3 & en tire du fang ; il fe répand partout,
mais il abonde fur-tout dans les lieux
bas, humides, fur les terres qui bordent les
.eaux ftagnantes : fon efpèce eft beaucoup
plus moleftante que celle du Stomox, parce
qu elle eft infiniment plus nombreufe en individus
, parce que les Coufins paroiffent
beaucoup plus tôt , difparoiflcnt beaucoup
plus tard , parce que leur piquure, peu ou
point douloureufe par elle-même , 1 aille plus
fouvent des fuites défagréables : celle de l’un
& de l’autre infeéte n’en a point, fi après
avoir enfoncé fa trompe , il l’a retire en entier.
8c fans qu il en demeure aucune partie
dans la plaie. Mais fi quelque circonf-
rance l’effraie & lui fait retirer précipitamment
fa trompe, il eft très-ordinaire quelle
fe rompe & qu il en relie une portion engagée
dans la plaie ; cet accident arrive
plus fouvent au Coufin, parce que fa trompe
eft plus compofée, moins facile à retirer :
c’eft la partie rompue & reliée engagée dans
la peau, qui, devenant un corps étranger ,
y excite de la démangeaifon, de la rougeur,
un léger gonflement, & tous les fymptômes
dune tres-foible inflammation. Cependant,
fi les piquures font exceflivemem multipliées,
fi elles font tellement près les unes des autres
que la plus grande partie de la peau en foie
couverte, alors il réfulre des piquures particulières
une plaie prefquegénérale; les points
inflammatoires & les mouvemens fébriles
locaux, peu graves chacun féparément,
caufent, par leur nombre, une inflammation
de tout le tiffu de la peau, une fièvre
générale & des fymptômes qui peuvent devenir
tres-fâcheux. C ’eft ainfique fur les terres
, incultes, dans les forêts qui bordent de
grands fleuves ou la mer, fur les lifières
defquejles il y a des eaux épanchées, fur les
bords des lacs ; circonlfances qui ont four
vent lieu fut les terres nouvelles & non défrichées
de 1 Amérique ; il eft dangereux de
s’expofet à la piquure des.Coufins, auxquels
on donne , dans ces contrées , le nom de
Maringouins ; on court fur-rout de grands
rifques en s exp'ofant a dormir dans des lieux
où
P R É L IM
où l’on peut en être affailli. Leur multitude
les rend formidables, & contraint de prendre
des précautions pour les écarter ; elles confident
à allumer & entretenir dans les endroits
où l’on veut féjourner des feux qui
répandent beaucoup de fumée ; fon aétion,
toute incommode qu’elle eft , ne l’eft pas
autant en plein air que les piquures multipliées
des Maringouins, on fe couvre en
outre, ou plutôt on s’entoure d’étoffes légères
, dont le tiffu lâche lailfe un paffage
à l’air, & défend l’accès aux Coufins. C ’eft
ainfi que les Européens, dans les voyages
dans l ’intérieur des terres de l’Amérique ,
pendant les nuits qu’ils font obligés de paffer
a l’air dans des hamacs, fe garantiffent des
piquures des Coufins. Quant aux naturels du
pays , ces nommes, habitués à être nuds ,
ont aufli recours, dans les lieux où ils paflent
la nuit, à des feux qu’ils entretiennent, tant
pour fe garantir de l’humidité pat la chaleur
de ces feux, que pour écarter les Maringouins
par la fumée ; c’eft en grande
partie pour éloigner ces fâcheux infeétes
que ces hommes font dans l’habitude de fe
frotter tout le corps de rocou ou d’autres lini-
mens , dont le goût ou l’odeur déplaifent
aux Maringuoins.
Dans les habitations, ces infeétes moins
nombreux ne font pas aufli redoutables,
mais ils le font encore beaucoup, & ils
obligent les blancs à ne dormir qu’entourés
de ces voiles légers, qu’on appelle couji-
nières ; les nègres, qui ne manquent pas
d’allumer & d’entretenir du feu dans leur
café ou à i’entour , qui ne fe trouvent pas
trop mal au milieu de la fumée, parce
qu’il y a toujours des enurans d’air dans
leur hute , préviennent à la fois, par ces
feux , les inconvéniens de la fraîcheur Si
de l’humidité de la nuit, & les piquures'
des Coufins. Ces chétifs infeétes qui ne
font qu’incommodes dans nos contrées' trop
cultivées pour que leur efpèce s'en empare,
font donc un fléau très fâcheux d ins beaucoup
de pays ; dans ceux qui font peu habités,
par conféquent incultes ; ils le font
Hiftoire Naturelle, Injectes. Tome J.
I N A I R E. cclvîj
non-feulement dans les contrées du midi,
mais dans celles du nord ; car leur efpèce
robufte eft répandue par-tout, une de celle
qui réfifte le plus au froid & des dernières
qu’on trouve en avançant vers les Pôles.
Ainfi pour pofleder les terres de l’Afrique
8c les riches contrées des Indes, il faut les
conquérir fur les Lions , les Tigres , les
Panthères, & pour habiter les marais du
~ nord , il faut., en les défrichant, en chaf-
fer les Coufins. Quelque légère incommodité
qu’ils caufent dans nos contrées,
on s’en plaint, & on me reprocheroit de
n’avoir pas parlé des moyens de fe garantir
de leur piquure ou de remédier â fes effets.
Voulez-vous diminuer le nombre des Coufins
dans vos jardins, dans les campagnes
qui environnent votre habitation , &' par
conféquent dans votre habitation même ;
faites deflecher toutes les flaques d’eau ,
toutes" les marres ; ne confervez pas d’eau
ftagnantes, n’ayez point de pièces d’eau ,
ni de baflîns"7 ne confervez que des eaux
courantes , ou donnez un cours à celles qui
n’en ont pas. Les Coufins ne multiplieront
pas dans vos environs , & ceux qui s’approcheront
de plus loin feront en petit nombre.
Ils ne fauroient introduire leur trompe à
travers les vêtemens un peu épais ; ainfi il
n’y a rien à en craindre pour la plupart
des parties du corps , mais celles qu’on
couvre" peu , comme les jambes , ou celles
qui reftent nues, comme le vifage & les mains,
font- expofées â leur infulte. Une matière
d’un tiffu denfe , comme la peau , garantira
les jambes, des gants de même matière,
les mains, & une gaze, le vifage qu’elle
entourera ; mais fi vous négligez ces précautions
, & que vous fentiez ou que vous
appeteeviez un Stomox , ou un Coujîn vous
piquer endurez patiemment la très-courte
douleur que le premier vous fera éprouver,
& laiflez lé fécond exécuter, fans trouble,
fon opération un peu plus longue, mais qui
ne caufe aucun mal ; l’un & l’autre retireront
cômpletcement leur trompe ; vous en
ferez quitte pour avoir perdu une goutte dq_
fang , & pour éprouver, ce qui eft rare, ce
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