trois états , qui font d’abotd Vers ou larves ,
enfuite chryfalides , Si. enfin infectes parfaits ,
parodient ne voir que dans ce dernier état ;
leurs yeux ne font pas apparens dans le premier
, mais cachés fous les tégumens de larve.
Il eft au moins douteux qu’ils voient ; ils ont,
à la vérité , des yeux dans le fécond état,
mais qui leur font inutiles, qui demeurent
fans aétiun ; qui ne leur appartiennent pas ,
mais à l’infeéte qui doit paraître fous une
dernière forme. Par exemple, la Chenille pa-
roît n’avoir pas d’yeux, Si fa peau cache
ceux du Papillon, il paroît encore plus certain
que les vers des différentes mouches
en font dépourvus ; & le même doute que
pour les Chenilles , a lieu pour les vers des
Scarabés ; ces vers , ceux des Mouches , la
Chenille, parvenus à l’étar de Chryfalide, ont
des yeux ; mais ce font ceux de l’infeéte en
fermé fous l’enveloppe de Chryfalide, qui n’a
pas fon degré de perfection, & qui l’acquiert
fous cette enveloppe, ainfi que les yeux l’acquièrent
auffi ; ils feroient fans aétion & inutiles
dans cet état, que les chenilles & les vers
patient fous une enveloppe opaque , fouvent
dans une coque , le plus communément dans
une retraite obfcure , & quand , malgré ces
raifons , les yeux .auraient une aétion , de
quoi ferviroit de voir à une Chryfalide qui ne
peut fe mouvoir, changer de place , éviter
l’atteinte des objets qu’elluclécouvriroit ?
i ° . Les infedes n’ont ni paupières , ni
cilles ; ces parties fervent à arrêter , à détourner
les atomes qui fë porteraient fur les yeux ;
à modifier l’avion d’une lumière trop vive :
les inleétes font dépourvus de ces avantages ;
mais leurs antennes placées au - deffus des
yeux , peuvent fuppléer, en général , aux paupières
& aux cilles en modifiant la lumière ,
en écartant ou arrêtant les atomes ; leur atteinte
d’ailleurs eft moins à craindre, les yeux
des infedes ayant une furface lèche , plus
réfutante , fur laquelle ils peuvent moins
s’arrêter & y exciter une fenfation auffi forte ;
dans les infedes que leur manière de vivre
expofe , en particulier à des rifques que les
yeux auraient à courir , ils font couverts &
protégés par des poils courts , forts , qui permettent
le pafTage aux rayons de lumière ,
& s’oppofenr à l’approche des corps qui bleffe-
roient les yeux ; c’eft ce qu’on peut obferver
fur ceux de l’A b eille , qui , en s’enfonçant
dans le calice desfleurs, rifqueroit-que les parties
qu’ elle y rencontre ne blefTaffent fes yeux.
La plupart des infed es en qui l’on peut
découvrir des yeux , en ont deux , placés un
de chaque côté de la tête , à fa partie- antérieure
& latérale ffipérieure ; dans quelques-
uns les deux yeux font fi rapprochés , qu’ils
femblent fe confondre & n’en former qu’un ,
comme dans le M onocle ; mais outre les
yeux , qui fe trouvent dans le' plus grand
nombre des infed es , beaucoup d’efpèces ont
encore , & de p lu s, des yeux placés en diffé-
rens endroits, fur le deffus de la tête ; qu elques
uns , comme les Araignées , n’ont que
des yeux de ce dernier genre ; les premiers
ont plus de volume ; ils font arrondis
en-deffus , Si forment à-peu- près une demie-
fph ère, on les nomme yeu x à facettes ou d
réfeau ; les féconds font plus p e tits , d’ une
forme ordinairement un peu oblongue ; leur
arrangement fur la tête forme fouvent une
forte de couronne , on les appelle p etits y ejtx ,
& plus communément yeu x liffes. O n apper-
çoit ordinairement les premiers allez facilement
à la vue fimple , mais on a befoin, de
loupe pour découvrir les féconds ; les uns
& les autres , au lieu d’être fitués dans une
cavité , à -fleur de tête , tranfparens & b ril-
lans , aifémeiM compreffibl.es fous le doigc qui
les to u ch e, mobiles .comme dans les autres
anim au x, font laillans, ne font engagés avec
la tête que par Une légère dépreffion qui loge
fuperficiellement leur furface inférieure, fo n t,
le plus fou ven t, ternes, opaques ou très-peu
tranfparens , oppotent au doigt qui les preffie
une forte réfiftance , & font rixes. Les yeux
à réfeau vus au microfcope ou à la ïouppe,,
au lieu de préfenter une furfacelifTe fir p o lie ,
en offrent une fillonnée par une infinité de
raies ; ces raies forment des lozanges, & laiffent
entr’elles des efpacès ou facettes liftés; celles
ci font de grandeur différente félon la
place quelles occupent ; les plus grandes font
vers le centre de l’oeil , leur nombre furpaffe
ce qu’on pourrait imaginer. Lewenhoclc en a
compté 3181 , fur 1 oeil dunScarabe, 8000
fur celui d’une mouche ; un autre obferva-
teur , M. Puget ,1 7 3 1 5 fur l ’oeil d'un Papillon
, &c. On n’apperçoit point de pareilles
lignes fur les petits yeux, qui ne préfen-
tent qu’ripe furface unie , & c’eft par cette rai- ■
fon qu’011 leur a donné l’épithète de liffes.
30. Il n’entre dans la compofition des yeux
des infedes qu’une membrane Si qu’une humeur
; la membrane répond à la cornée tranfparente
; elle a ordinairement beaucoup d’é-
paiffeur , elle eft très-forte , & quoiqu’elle
laide pafler la lumière , elle paroît à l’obfer-
vateur , dans la plupart des efpèces , plutôt
opaque que tranfparente ; à fa furface interne
eft étendue une humeur vifqueufe qui remplit
une partie de la cavité de l’oeil ; cette humeur
eft diverfement colorée dans les différentes
efpèces ; mais le plus ordinairement
elle eft; d’une couleur terne & fombre, &
c’eft par cette raifon. que là cornée , qui la
couvre , paroît opaque ; dans quelques efpèces
cette humeur eft’ rougeâtre ou verdâtre,
& alors la cornée paroît moins opaque,
plus tranfparente. Quand 011 écrafe entre les
doigts la tête d’une mouche, ils font tâchés
de rouge par l’humeur que fes yeux conte-
noient , & non pas par du fang , comme
ceux qui ignorent ce fait, l’imagiifent.
Au fond de l’oeil aboutiffient les nerfs optiques
, un de chaque côté ; ils viennent de
la portion du cerveau contenu dans le crâne,
deftinée uniquement à leur donner naif-
fance ; l’extrémité de ces nerfs s’épanouit,
au fond de l’oeil,* en un faifceau de fibres
divergentes en-forme de cône oude'pinceau
renverfé ; chaque fibre fe prolonge au-deflous
d’une facette de la cornée, & ou s’alonge juf-
qu’à être en conraét de l’humeur qui en couvre
la furface, ou fe termine, avant d’atteindre
cette humeur, en laiflant un vuide
I N A 1 R E.
entre fon extrémité & l’humeur. Il y a donc
autant de lignes nerveufes émanées des nerfs
optiques que de facettes fur les yeux à réfeau.
Quant aux yeux liffes, je ne trouve
pas de quelle manière ils communiquent
avec les nerfs optiques, mais on peut les
regarder comme une facette des yeux à
réfeau, St il y a apparence que les nerfs
envoient une fibre à chacun de ces yeux.
I.es infeétes diurnes, ou qui voient &
font en mouvement pendant le jour , fonc
ceux en qui les fibres nerveufes ne s’alon-
gent pas jufqu’en contaét de l’humeur qui
lapide la cornée ; & les infeétes qui fe cachent
le jour, qui voient & fe mettent en
mouvement la nuit, font ceux en qui les
fibres fe prolongent, jufqu’à être en contact
des facettes ou de l’humeur qui les tapiffe.
II s’enfuit que l’impreffion de la lumière fur
les fibres eft moins immédiate ■ dans les
premiers ; que les rayons réfraétés font plus
écartés quand ils en touchent la pointe ; que
le foyer qu’ils forment a moins de force, Sc
la lumière une aétion moins vive fur les" nerfs;
ainfi ces infeétes ont befoin de plus de lumière
pour être éclairés, d’une lumière plus
vive ; les féconds, qui éprouvent une aétion
immédiate de la part de la lumière, en qui
les rayons touchent l’extrémité des fibres
dans toute la force de leur' foyer, feroient
bleflés par une lumière convenable aux premiers
, ils en feroient éblouis, & ils voient
à un degré de clarté qui ne ferait pas affiez
d’impreffion fur,les premiers, C ’eft donc
d’après la conformation différente des yeux
qu’il y a des infeétes de jour & des infeétes
de nuit, comme il y a , d’après la même
conformation, des oifeaux diurnes & des
oifeaux noéturnes; comme il y a de même ,
& par la même -raifon, quelques quadrupèdes
noéturnes, tels que la Gerboife, Ldi,
Luneau.
Mais il y a quelques quadrupèdes , comme
les Chats, les Souris , les Mulots , &c. , qui
voient auffi bien de nuit que de jour ; cet
avantage eft dû, dans ces animaux, à la faculté