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placés à l'intérieur,. & attachés' par une de
leurs extrémités' à la furface interne de la
co iffe, par [’autre à la furface interne de la
jambe. Cette différence eft en apparence très-
grande , cependant elle ne change tien au
réfultar & au mécanifme ; car le mufcïé érant
une corde , tendue entre deux points auxquels
il eft fixé & capable de fe raccourcir
dans fon milieu ; qu’il foie fitué en dehors
ou en dedans , fou raccourciffement rapprochera
également le point le plus mobile de
celui qui l’eft moins. Il étoit cependant d ’autant
plus important de faire connoîrte au
lecteur cette différence entre les infeétes &
les autres animaux „ qu’au premier apperçu
elle femble devoir influer beaucoup fur le
mécanifme. Continuons de fuivre notre
objet.
Les infefles dans les différens éta ts, de
larve , de nymphe , d’infeéte parfait fuf-
pendent leurs mouvemens pendant plus on
moins de tems ; ils n’en exécutent aucun
dans l’état de chryfalide la plupart font
en action pendant le jou r, fans mouvement
pendant la nuit ; d’autres au contraire paf-
fent le jour fans faire de mouvemens, .& ils en
exécutent pendant la nuit; mais il y a pour
tous en vin g t-q u a tre heures un iurervalle
d’aétion & de tranquillité , &; pendant celui
d ’action , il y a des momens de fufpen-
fion. C e ne font que des motifs de croire
que les infeétes connoiffertc, comme les autres
animau x, l’état d ed ation ; & quecomme
eux ils jouiffent du fommeil ; mais comme
leur organifation eft la même , que leur exif-
tence & fon entretien occafionnent le's'mêmes
pertes , le même befoin de réparer, il parole
évident qu’ils doivent jouir des mêmes
feco u rs, réparer de même par le moyen de
la dation & du fommeil. Nous en ferons
encore plus convaincus en obfervant les
mouvemeus, la d a tio n , le fom m e il, les
befoins des infeétes à ces divers égards dans
leurs différens états.
Dans le dernier.état des in feétes, celui
de perfe& ion, leurs mouvemens font plus
fréqnens , plus prompts , la fufpenfion
en eft plus rare & moins longue ; mais leurs
mouvemens font plus faciles, ils coûtent &
dépenfent moins : les infeétes s’épuifent donc
moins , ils jeanfervent plus loug-tems leur
fo rce, ils ont moins befoin de- réparer; d’ailleurs,
leur accroiffement eft alors com p let,
leur fibre a toute la tenfion & la rigidité
dont elle eft fufceptible; elle eft trop folide
pour que le foi b le cours des fluides lui enlève
quelque ch ofe; elle n’a ni befoin d’addition
, ni elle ne peut rien admettre de
plus. T o u t le principe de l’aétivitc eft donc
réfervé pour le mouvement mufculaire &
fuffit à l’entretenir long tems ; une fufpenfion
courte le répare affez pour fournir à une
nouvelle aétivité , & le fommeil , pendant
la nuit ou durant le jo u r, fournit à une réparation
capable d’entretenir les mouvemens
qui pourront le fuivre.
Dans l’état de la rv e, les mo'uvemens font
plus len ts, mais ils font plus longs, & fur-
tout ils fout bien plus pénibles; ils exigent
la contraétion d’un bien plus grand nombre
de mufcles , & ils èn mettent en mouvement
d’une extrémité du corps à l’au tre:
c’eft ce dont on peut juger en voyant une
Ch en ille , par exemple , marcher , ou un
vers de Mouche fe traîner. Le partage d’un
lien' à un autre eft effeétué en un inftanr
& par le mouvement facile des a llés, de
la part du Papillon ou de la Mouche ; la
C h en ille ou le ver mettent un tems fort
long à parcourir un efpace beaucoup plus
court. Le ver, en contraélant alternativement
Sc avec peine chaque aniïeau de fon corps,
la Chenille , en avançant fucceflivemenr
chaque paire de Tes pieds. L ’adion même
de prendre des alimens eft une fatig u e, par
la pofition qui eft fouvent néceffaire félon
les efpèces & les circonftances, .par la difficulté
de divifer la fubftance alimentaire ;
c ’eft fur-tout un travail pour ces vers qui
creufenc le bois , qui s’en nourriffent §: qui
s’y forment un logement. Cependant dans
l’état de la rv e , il ne fufEr pas de réparer,
il faut encore fournir à raccroiffement ; le
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befoin eft donc plus grand en raifon d ’une
perte plus forte de la part des mouvemens
& d’un emploi plus grand pour l’accroirte-
menc ; les larves doivent donc fe fentir p'u-
tôt ép uifées, recourir a la d a tio n , meme
au fommeil, plus fréqu em m ent,& demeurer
plus long-tems dans 1 un ou 1 autre-de ces
deux états. Ici l’obfervation fe trouve d accord
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faire pour ces rep as, foit pour trouver des
alimen-s ; quand ils ceflent d en prendre,
leur-dépenfe eft encore, beaucoup plus con-
fidérable, par la longueur & la promptitude
de leurs courfes. Ils paroîrrpient donc avoir
plus befoin de repos, & ils en prennent au
contraire moins : mais dans l’un ou l’autre
cas , Eaccroiffemenr des larves eft complet ;
il ne s’agit plus que de réparer la. perte occa-
fionnée par les mouvemens néceffaires pour
prendre des alimens, ou choifir une retraite ,
& d’amaffer une fubftance nutritive dont la
là larve n ’a plus b efo in , qui furabonde en
e lle , qui ne lui eft pas deftiné.e s mais à la
chryfalide prête à lui fuccéder. Lorfque la
larve celle de manger, l’amas de cette fubftance
avec la-.théorie. En e ffe t, une C h e nille
ou un ver , que j ’ai déjà pris pour
exemples , après avoir avoir parcouru un certain
efpace , après avoir pris des alimens ,
s’arrêtent, relient dans une inaétion totale,
qui eft au moins un état de dation & peut-
êue de fommeil : ils y demeurent fort loug-
tems. C ’eft ainfi que certaines C h en illes,'les
procejjionnaires-, par exemple, ne fe mettent
en mouvement que deux fois par jour pour
prendre des alimenï , & qu’elles partent
le relie du tems fans tfftion dans leur nid.
Qui fait fi la longueur du chemin qu ’ elles
fonc pour prendre leurs repas , fi la fatigue
que leur caufe fa d u rée, ne contribuent pas
à leur faire prendre un long repos. On en voit
d’autres demeurer long - tems immobiles fur
utie feuille ou une branche, ne changer de
place & ne prendre des alimens que par
intervalle. -
Cepen dant, lorfque les larves font prêtes
de palïer à l’état de chryfalide , leurs repas
font beaucoup plus longs, plus fréquens,leurs
ehangemens de places plus habituels , leurs
dations plus rares & plus courtes, leur
fom m e il,o u l’état qui y relfemble, .moins
| long; il y en a q u i, comme le V er a fo ie ,
ne ceflent pas de manger jour & nuit ; la
plupart, quand ils celfent pour tout à-fait
de prendre des alim en s, qu’ils s’éloignent
des lieux où ils fe font nourris, font dans
une forte d’agitation qui femble tenir de
l’inquiétude; ils font ou de longues courfes ,
ou des tours fur eux - mêmes , dont le bue
eft de chercher une retraite convenable pour
y être en ffireté pendant le tems qu ’ils paf-
feronc fous la forme de chryfalide. Lorfque
leurs repas font plus longs qu’ils n’étoient,
■ ils dépenfeuc plus, foit pour l’aélion nécef-
eft complet & fuffifant pour fournir
à Ces mouvemens & aux befoinsde la ch ryfalid
e ; auflî parte-1-elle bientôt à cet état, fi
elle eft lib r e , dans la retraite qu’elle s’eft
ch o ifie, & où elle ceffe. de fe donner du
mouvement, après avoir fait dans certe retraite
les difpofitions néceffaires', comme de
s’y filer une coque , ou d’en couvrir l’entour
d’un (impie tiffii de fo ie , & c. Mais fi
la larve eft troublée dans fa retraite, fi elle
-eft o b lig é e , par les incommodités qu’elle
y éprouve, d’en fortir , fi on l’en retir
e , enfin fi elle eft forcée de commencer
de nouvelles courfes pour chercher une
nouvelle retraite , d’y faire de nouveaux préparatifs
dans lefquels elle eft encore interrompue
, & de recommencer de nouvelles tentativ
es, il arrive fouvent qu’ép u ifée, ou elle
ne peut paffer à l’état de ch ryfalid e, ou la
chryfalide eft chétive , & linfeéte qu ’elle
contient , auquel elle ne fournit pas tonte
la fubftance néceffaire, parce qu’une portion
en a été dépenfée, ne prend qu ’un accroif-
femen.r incomp let, & ne fe développe qu’im-
parfaitement. C e que je viens d ’avancer
pourra être ailément vérifié par ceux qui
nourriffent des Chenilles pour avoir des Papillons
mieux confervés ; iis concevront pourquoi
les Chenilles-fphinx , par exemple ,
qui ont entré plufieurs fois en terre, & qui eu
-font refforties , parviennent rarement à feroé-
tamorphofer, pourquoi on en obtient difficile