Tifque à courir, ayant pouffé moins loin le premier
attrempage , ils ont perdu moins de teirîs, & le four
a été en un moindre danger. A la vérité leur four
■ eft moins bien réparé & à un plus grand feu , il fe
■ déclare des gerfures qui n’avoient encore pu paroî-
tre-; mais c’eft une croix du métier qui eft bien plus
aifée à fupporter que les maux auxquels s’expofent
les premiers. Le fécond parti eft donc le meilleur:
il n’eft cependant qu’un palliatif, il laiffe fubfifter les
mêmes inconvéniens, & ne fait que les diminuer.
On éviteroit tous les inconvéniens de la première
méthode par une troifieme, qui conferveroit à la vérité
le delagrément de la fécondé. Ce feroit de prendre
pour chanvrer le moment de l’attrempage oii un
ouyrier pourroit encore entrer & fe tenir dans le
fo u r , & oit il ne pourroit fouffrir le moindre degré
de chaleur de plus. On chanvreroit fans ceffer d’at-
tremper, on ne courroit rifque ni de deux attrempages
, ni de diverfes températures, & on ne per-
•droit aucun tems («).
J ’ai vu des maîtres de verrerie s’avifer de mettre les
pots verds dans le four avant la recuiffon de celui-ci,
& de les attremper & recuire en même tems qu’ils
attrempoient & recuifoient leur four. Cette méthode
a réulïià quelques-uns ; conféquemment il n’y a pas
moyen de douter qu’elle nefoit pratiquable, mais
elle expofe à des dangers. Lorfque le pot a reçu un
certain degré de fe u , une diminution de chaleur qui
ne feroit rien au four à caufe de fon épaiffeur, caufe-
roit la perte totale du pot. Au refté, quand cette maniéré
de recuire les pots feroit prouvée être la meilleure,
comme on ufeplus de pots que l’on ne recuit
de fours, on feroit forcé d’en mettre une autre en
pratique. Voici l’ordinaire. On place les pots dans
l’arche , comme on le voit dans la fig. z . PL V I. en
faifant attention que les pots foient bien fe c s, l’arche
froide, & la lunette bien bouchée ; la difpofition &
l’arrangement des pots dans l’arche dépendent de la
connoiffance qu’on a de la manoeuvre ufitée, pour
tirer les pots de l’arche après leur recuiffon. La feule
obfervation que font ceux qui les placent, c’eft de
ne pas gêner cette manoeuvre , &"en même tems de
ne pas approcher les pots de la clairèvoiê, de peur
que le premier coup de feu fortant de la lunette ne
les touche & ne les endommage ( o).
Lorfque les pots font placés dans l’arche , on la
laiffe quelque tems ouverte ; en cas que fa température
ne foit pas femblable à celle de laquelle for-
tent les pots. On bâtit enfuite le devant de l’arche,
ce qu’on appelle en terme de métier, faire Carche ,
faire la glaie de C arche. On laiffe feulement un efpa-
ce ouvert au haut de la gueule de l ’arche pour établir
le courant d’a ir , Jorïqu’on la chauffera : on dif-
pofe le bas de la glaie de l’arche, de maniéré qu’on
puifl'e aifément y pratiquer une petite ouverture pour
voir l’état des pots, lorfqu’on le defire. Après que
les pots ont été quelque tems dans l’arche faite, on
démarge la lunette ; mais il faut le faire avec beaucoup
de précaution. On fe contente de faire tomber
par le bonnard, avec l’inftrument qu’on appelle grand
mere ( PL X IX . fig. I. ) un peu du mortier qui retient
l’efpece de plateau nommé margeoir , qui bou-
(«) On fera peut être étonné que ce foit de filaffe qu’on fe
ferve pour raccommoder l'intérieur d’un four. 11 paroit im-
poflible qu’une matière auffi cotnbuftible puiffe fubfifter dans
un milieu autïi ardent, mais la terre dont elle eft enveloppée
fe cuifant autour d’elle , elle ne fait que charbonner, ne fe
çonfuine pas., & on la retrouve dans cet état à la démolition
d’un four. Quelques fubîiftances minérales qu’on mît à cet
ufage, elles n’y feroient pas à beaucoup-près fi propres : il
feroit difficile d'en trouver qui ne fuffent détruites par la calcination
ou par la fufion..
| (o) On éleve les pots lur des briquetons > pour que le feu
puiffe toucher le cul en-dehors, , comme la fléché, & d’ailleurs
pour pouvoir, en ôtant un des briquetons, faire pencher
le pot du côté qu’on le veut.
che la lunette ; à une autre occafion, on en fait tomber
une plus grande partie. On opéré de même juf-
qu’à ce que rien ne retienne le margeoir, & l’on donne
par ce moyen le feu le plus doucement qu’il eft
poffible ; lorfque le margeoir eft tout-à-fait décollé
de la lunette, on l’en écarte de maniéré, qu’il y ait
environ trois lignes entre la lunette & lu i, ce qu’on
appelle détacher le margeoir. On l’écarte toujours de
meme, par gradations infenfibles, jufqu’à ce qu’il
touche la clair-voie ; alors on repouffe le margeoir
plus loin que la lunette, de devant laquelle on l’ôte,
c’eft à compter de ce moment que la lunette fait fur
les pots, tout l’effet qu’on peut en attendre. Lorfque
fon feu a commence à faire changer de couleur à
l’arche , on allume le bonnard. D ’abord on y jette
une bûche de gros bois , qu’on y laiffe prendre feule
; on augmente le feu peu-à-peu, & enfin on le
pouffe le plus fort qu’on peut. On doit avoir attention
de fuivre le bonnard avec régularité, & de ne
pas laiffer tomber le feu ; encore moins, fi par ha-
fard il tombe, doit-on le remonter trop précipitamment.
Pendant toute la recuiffon des pots, les ferraffes
que nous avons dit s’abaiffer fur le devant de l’arche
, reftent abattues. La recuiffon totale dure environ
fept jours , on peut même la faire en cin q,
mais il faut alors des pots bien fecs, & beaucoup
d’exa&itude. La recuiffon eft d’autant plus parfaite,
que la chaleur de l’arche, lorfqu’on en retire les pots,
eft plus approchante de celle au four ; ils s’apperçoi-
vent moins du changement de température en entrant
dans le fo u r, fur-tout fi on a pris la précaution
de diminuer un peu le feu de celui-ci. La recuiffon
fe termine en rechauffant le four avec précaution ,
& le remontant par degrés.
Tous les pots de quelque terre qu’ils foient conf-
truits, ont befoin de fouffrir un très-grand feu avant
qu’on les rempliffe de matière vitrifiable : il eft bon
qu’ils prennent, fans être gênés, la retraite dont ils
font fufceptibles. Si on rempliffoit le p o t, avant qu’il
eût pris fa retraite, il ne tendroit pas moins à la prendre
, il ne pourroit le faire avec régularité, & également
empêché par le verre qu’il contiendroit, &C
cette retraite gênée occafionneroit fans contredit,
dérangement de parties, déchirement, défunion.
Lorfque les pots font recuits, on ne fait guere leur
bon ou mauvais état, que par l’infpe&ion. On cherche
cependant à en juger par le fon en frappant légèrement
le haut de la fléché, avec le crochet à tirer
les larmes (P I . X X I I .f ig . /. ) ce qu’on appelle
fonder les pots ; c’eft ainfi qu’on juge au fon, fi une
cloche eft félée ou non. Rien n’eft fi équivoque que
cette indication ; des mauvais pots fonnent quelquefois
très-bien, & il arrive que des bons pots lon-
nent mal.
Il en eft de la recuiffon des cuvettes, comme de
celle des pots ; on la conduit de même, & elle eft
fujette aux mêmes inconvéniens. On pratique en
faifant la glaie de l’arche à cuvette, une ouverture
femblable- aux ouvreaux à cuvette, on la tient mar-
■ gée avec une tuile, & c’eft par-là qu’on tire les cuvettes
de l’arche.
Il faut trois chofes pour une bonne recuiffon, le
ménagement du feu, la féchereffe de l’arche, & la
féchereffe des pots.
Le ménagement du feu. On en a déjà vû les rai-
fons.
La féchereffe de Ü arche. Lorfqu’elle eft humide, les
vapeurs qui s’élèvent du pavé frappant le cul du pot,
déjà chaud, le détériorent néceffairement, le font
gercer, & vont quelquefois même jufqu’à le détacher
de la flèche.
La féchereffe des pots. Un pot peu fec peut à toute
rigueur fe recuire à force de précautions : mais il eft
cbrtfinueîîemeht eh danger. J ’en ai vû q tii paroîfe
foient très-bien recuits , .& dont l'intérieur h’a voit
feulement pas change de couleur. Lesfurfacesétoieilt
recuites , &■ l’humidité s’étoit trouvée retenue dans
le milieu & comme concentrée. O r , qu’arrive-t-il ?
A quelque coup de feu un peu plus v io len t, ellè
cherche à forcer les barrières qui la retiennent , &
le pot périt.
Lorfqu’un pot eft manqué à la recuiffon, je ne lui
connois que deux fortes de défauts, les gerçures &
les calcinures, à-moins que par un coup de feu trop
fubit, il n’ait éclatté en nombre de morceaux. Les
gerçures font de deux fortes ; les unes vont de haut
en-bas , & les autres parallèlement au çul du pot.
Elles font toutes les effets d’une humidité trop promptement
diflïpée : mais les fécondés, qui fe trouvent
dans le fens des patons, joignent à cette raifon celle
de la mal - façon dans la conftriiâion du pot ; c’eft
une preuve que le potier n’a pas fait tout ce qu’il
auroit dû, pour joindre bien parfaitement fes patons.
Les gerçures font quelquefois occafionnées par l’air,
qui eft refté entre les patons & que l’ouvrier a négligé
d’en faire fortir.
Les gerçures attaquent toute l’épaiffeur du p o t ,
& conféquemment un pot gercé eft abfolument hors
de fervice. Il n’en eft pas de même de ce que j ’appelle
calcinures ; elles n’ont point de route fixe fur
la furface du pot ; elles ont l’a i r , fi l’on me permet
la compa raifon, des lignes qui défignent une carte
géographique. Elles ne touchent ordinairement que
la fuperficie , & ne pénétrent que très-rarement l ’intérieur.
Il eft imprudent de s’ expofer au fervice de pareils
pots ; mais dans de grands befoins j ’ai yû des pots
attaqués de calcinures durer long-tems.
Je regarde les calcinures comme l’effet d’un corps
froid, qui a touchéle pot lorfqu’il étoit chaud, mais
qui ne l’a pas touché affez long-tems pour nuire aux
parties du milieu.
On conferve des pots ou des cuvettes tous recuits
dansles arches, mais on s’expofe à un nouveau danger
en ramenant l’arche par degrés, de fa grande chaleur
au fimple'feu de la lunette. On pourroit s’en garantir
en iaiffant toujours le bonnard allumé, ce qui
feroit une dépenfe de bois trop confidérable, fi l’on
étoit obligé de l’entretenir long-tems.
Choix des matières < vitrifiables, 6* leur préparation.
A l’exception des chaux métalliques, aucune fubf-
tance ne fe vitrifie feule &c fans mélange, par la (impie
a&ion du feu. Le fable lui-même qu’on regarde
communément comme la bafe du verre , ne change
point de nature par l’aétion du feu le plus violent,
lorfqu’il eft pur. Des expériences occafionnées par
le hafard ont appris, que le fable mêlé à des fubftan-
ces alkalines fondoit, & faifoit du verre. Les cendres
des végétaux, qui contiennent beaucoup d’alkali
fixe , ont fervi de fondans ; la foude a été employée
de préférence, comme la cendre qui contient
le meilleur a lk a li, & elle a été la feule en ufa-
. ge dans les glaceries. Le mélange du fable & de la
loude faifant un verre verd qui colore de même les
objets qu’on regarde au-travers ; on y a additionné
de la manganèse, fubftance minérale , dont la propriété
eft de colorer le verre en rouge & d’être vo- -
latile. Elle aide par fon évaporation à la diflipation
du principe colorant, & lorfque la dofe n’en eft pas
affez forte pour qu’il en refte trop , après la fufion
& l’affinage, elle donne au verre un oeil diaphane &
animé, forragréable.
Ayant une Fois déterminé quelle fubftance devoit
entrer dans la confection du v e r re , il a fallu fe décider
par les obfervations des phénomènes , fur les
meilleures efpeces de ces fubftances.
On a remarqué que le fable coloré donnoit au verre
Une Couleur defagréable : oh a ô b fe rv é , cjue le fa->
pie fin fondoit avec plus de facilité que lé gros. Par
çe.s confidérations, on s’ eft déterminé pour le fable
fin 61 blanc. Celui qui en un certain volume préfen*
te un oeil azuré, n’eft pas moins boni
Lorfqu on a ete déterminé pour les qualités dù
fable , on a cherché les moyens dé lui donner ces
qualités, ou du-moins de les lui procurer à un degré
plus éminent. Le fable ne peut êcrç coloré que^de
deux maniérés, ou par le mélange d’argilleimpure*,
ou dans les parties propres qui le condiment. Les
parties argilleufes font affez bien emportées par là
lotion : voici comme on s’y prend popr iayjer le fable
; on remplit un baquet d’e au, & on paffe du fable
dans l’eau avec le tamis (p ) fig . | f PL X . garnie
de poignées de fer. Par ce moyen le fable reçoit en
tombant dans l’eau une agitation affez confidérable;,
& tres-propre à en favorifer la lotipn, Lorfqu'il y a
une certaine quantité de fable dans le baquet, on
l’agite & on la retourne avec une palette, exprimée
(fig. i. P l. X ) & emmanchée d’un manche de boi«*
L ’eau fe colore en fe chargeant des parties argilleufes
, qui étoient auparavant combinées avec le fable
; on la verfe & on la renouvelle ; on remue de
même le fable dans la nouvelle eau , qu’on renouvelle
encore , lorfqu elle eft faïie , & on en agit de
la forte jufqu’à ce que l’eau refte claire. Alors le
fable eft fuffifamment lavé. Les dimenfions des outils
propres à cette opération n’ont rien qui les dé-r
eide exactement ; il faut feulement qu’ils foient d’une
longueur commode pour le fervice. Quant à la palette
, elle reffemble fort à'une petite bêche de jar-f
din , & n’eft pas mal dans les proportions de la figure.
Lorfque. le fable eft coloré dans fes propres parties,
la lotion n’y remédie pas. Alors, on difftpefe
principe colorant, en expofant le fable à l’aftion
d un feu capable de l’évapprer. Communément on
ne fait fubir cette opération au fable, que.quand ii
eft mélange avec la.foude; nous en dirpns un mot
en parlant des frites. .
Les foudes n’ont d’autre qualité défirabje, que celle
de contenir beaucoup d’alkali, & de le contenir
d’une bonne nature. Celles d’alicante font les meilleures
qu’on connoiffe , & les plus en réputation*
Celles de Sicile en approchent beaucoup ; celles de
Carthagene font moins bonnes, en çe qu’elles contiennent
des fels neutres, non-feulement inutiles ,
mais même nuifibles à la fufion, & à l’affinage. CeL
les de Languedoc qu’o n cultive aux îlçs Sainte-Marie
, & dans le diocèfe de Narbonne, font affez bonnes.
Elles font connues dans ce pays fous le nom de
falicor. Le verre qui en réfulte parvient rarement à
un affinage bien parfait; il eft cependant marchand.
On entend communément par foude, la cendre du
kali majus cochleato, plante marine la plus propre à
être brûlée pour l’ufage des verreries. On cultive
cette plante avec grand foin dans les pays de bonne
foude, & on lui fait recevoir autant de façons qu’au
froment.
II eft inutile d’entrer dans la defeription de là
plante; elle ne peut feryir au maître de verrerie, que
lorfqu’elle eft brûlée, & il lui fuffit d’en connoître la
bonne qualité dans cet état. Nous dirons cependant
un mot de la maniéré dont on fait l’incinération des
plantes.
On a obfervé que les cendres des plantes feches
ne contiennent pas autant d’alkali , que celles des
plantes qui ne le font qu’autant qu’il le taut pour pou*
Çp) Le tamis peut être de crin ou de fils d’archal très-
ferrés. Il eft intéreflant qu’il (oit affez fin » pour que les parties
; hétérogènes, qui pourroient être mêlées au fable, reftènt dans
| le tamis, ayant moins de difpofition que le fable , à paffer au-
travers.