pierres calcinées, inconnues aux fiecles précédent
Arrêtons, c’ eft affez, j'ai moi-même befoin de
refpirer ; outre que d’autres fcènes d’horreur 6c d’e- ;
pouvante doivent entrer dans le. tableau des { ones
glaciales : lifez-en l’article. ( Le chevalier d e J a u -
C O U R T . )
Zones g l a c ia l e s , ( Géog. mod. ) les géographes
diftinguent deux {ones glaciales : elles font renfermées
entre les deux cercles polaires qui les embral-
fen t, l’une autour du pôle arétique ^ 6c l’autre autour
du pôle antarctique. On les appelle glaciales,
parce que pendant la plus grande partie de 1 annee il
y fait un froid exceflif, tant par les longues nuits de
plufieurs mois qui s’y rencontrent , qu à caufe de
l’obliquité des rayons du foleil quand il les éclairé.
Il y a dans ces {ones quantité d’étoiles qui ne fe
couchent jamais, 6c quantité d’autres qui font toujours
cachées au-deffous de l’horifon. Les habitans
ont une li grande inégalité de jours 6c de nuits, que
le foleil paroît fur l’horifon pendant plufieurs jours,
& quelquefois plufieurs mois ; les nuits y font aufli
de plufieurs jours 6c de plufieurs mois. Ils ont le foleil
très-éloigné de leur zénith , & ne voient qu’un
folftice, favoir celui de l’été, le folftice d’hiver étant
caché fous l’horifon. La lune s’y leve quelquefois
devant le fo le il, & fe couche quelque tems apres,
favoir lorfqu’elle eft au figne du taureau, & le foleil
au commencement du figne des poiffons ou du bélier.
. ,
Ceux qui font fous le cercle polaire, n ont qu un
jour de 14 heures, le foleil étant au folftice d’eté, &
ont aufliune nuit dei4heures,lefoleil étant au folftice
d’hiver. Les crépufcules y font fort grands le pôle
étant élevé fur l’horifon de foixante-fix degrés 6c demi
; & depuis le 5 d’Avril jufqu’au ÿd e Septembre
il n’y a point de nuits clofes. - - ■ -
Ceux qui habitent au milieu des {ones glaciales ,
e’ eft-à-dire fous les p ô le s, ont la fphere parallèle ,
& n’ont en toute l’année qu’un jour & qu’une nuit ,
chacune de fix mois. Les étoiles qui font dans 1 he-
mifphere fupérieur, ne fe couchent jamais, 6c celles
qui font dans l’hémifphere inférieur, ne fe lèvent
jamais, parce que les pôles font au zénith 6c au nadir.
Ils n’ont aucun orient ni aucun occident, parce
que le foleil fait toutes fes'révolutions parallèles à
l’horifon , 6c n’ont par conféquent qu’une ombre
circulaire. ,
Le cercle polaire arCtique paffe prelque par le milieu
de l’Iflande , la partie feptentrionale de la Norv
è g e , par l’Océan du N o rd , le pays de Laponie,
la baie de Ruflie, le pays des Samoyedes , la Tartan
e , l’Amérique feptentrionale 6c le Groenland.
Ce cercle polaire arCtique paffe par la terre du
Sud ou Magellanique dont nous ne connoiffons
rien. . . . ,
Il y a fous la {one glaciale feptentrionale , moitié
de l’Iflande , la partie feptentrionale de Norvège &
de Laponie, le Finmare, la Samogitie, la nouvelle
Zemble , le Groenland, le Spitzberg 6c quelques
pays feptentrionaux d’Amérique encore inconnus.
r II y a fous la {one glaciale méridionale, de la terre
ou de la me r; mais nousnefavons pas laquelle des
dCL e foleil ne fe couche ni ne fe leve pendant quelques
jours pour ceux qui font fous les {onesglaciales;
& plus il y a de ces jours, plus le lieu eft proche du
pôle , de forte que fous le pôle même , il ne fe couche
ni ne fe leve pendant fix mois entiers ; les lieux
fitués fous.les cercles arCtique 6c antarctique ont un
jour pendant lequel le foleil.ne fe couche point, 6c
un autre pendant lequel il ne fe leve point ; mais dans
les autres tems il fe leve 6c fe couche.
Pour démontrer cette propofition, choififfez un
lieu fous la {one glaciale, 6c élevez le pôle fuivant fa
latitude ; enfuite appliquant un morceau de craie ou1
un crayon au nord de i’horifon, c’eft-à-dire proche
du p ô le , décrivez un parallèle en faifant tourner le
globe ; ce parallèle coupera l’écliptique en deux
points, où le foleil arrivant, ainfi qu’aux points intermédiaires
, il ne fe couche point ; car tous les parallèles
qui paffent à-travers ces points dans la rotation
du g lobe, font au-deffus de l’horifon. Si on applique
le crayon au point oppofé, 6c qu’on décrive
un cercle parallèle, il paffera par deux points de l’écliptique,
où le foleil arrivant, ainfi qu’aux points
intermédiaires , il ne s’élève point au-deffus de l’horifon
; mais il en arrivera tout autrement fi on choifit
le lieu dans l’autre {ont glaciale. Ainfi par rapport aux
lieux fitués fous les cercles arCtique 6c antarâique ,
fi on éleve le globe à 66 degrés 30 minutes, 6c qu’on
le faffe tourner , le premier degré du cancer touchera
précifément l’horifon, êc ne fe couchera point;
de même le foleil ne fe lèvera point pour ce lieu,
étant au premier dégré du capricorne ; mais il aura
fon lever 6c fon coucher dans les autrés degrés de
l’écliptique.
Un lieu étant donné fous la {ont glaciale, voici
comme on peut déterminer quels font les jours où
le foleil ne s’y couche ni ne s’y le v e , 6c quand ces
jours commenceront 6c finiront.
Prenez un globe, mettez le lieu fous le méridien ,
6c élevez le pôle fuivant fa latitude ; enfuite faifant
tourner le globe » remarquez les deux points de l’écliptique
qui ne defcendent point fous l’horifon. Le
premier qui eft proche du bélier, montre le jour que
le foleil ne fe couche point, 6c celui d’auprès de la
balance indique le jour où il commence à fe lever ;
les deux jours dans lefquels le foleil eft dans ces
points , il ne fera que toucher l’horifon, 6c fon centre
fera un peu au-deffus ; c’eft ainfi qu’on trouve les
jours pendant lefquels le foleil fera fous l’horifon
dans la partie oppofée de l’année.
Les jours augmentent continuellement dans les
lieux feptentrionaux, tant que le foleil avance depuis
le premier degré du capricorne jufqu’au premier du.
cancer ; c’eft-à-dire depuis le 2 1 Décembre jufqu’au
2 1 Ju in ; mais il en arrive tout autrement dans les
lieux méridionaux ; c’eft-à-dire quand le foleil fe
meut depuis le cancer jufqu’au capricorne, ou depuis
le 2 1 Juin jufqu’au 2 1 Décembre.
Pour prouver cette propofition, prenez un lieu
quelconque au nord de l’équateur, 6c élevez le pôle
fuivant fa latitude ; prenez deux lieux ou plus dans
l’écliptique, 6c vous trouverez que le plus proche
du premier degré du cancer reliera le plus long-tems
fur i’horifon. La même chofe arrivera pour les lieux
qui font au fud de l’équateur ; fi on éleve le pôle du
fud à la latitude du lieu , les degrés les plus proches
du premier du capricorne feront ceux qui relieront
le plus long-tems fur l’horifon.
Les caufes des faifons 6c de la durée du jour font
les fuivantes, fous la {one glaciale.
i° . Le centre du foleil ne monte pas au-deffus de
l’horifon pendant quelques jours ou quelques mois,
félon que le foleil eft éloigné du pôle.
20. Quand le foleil eft au-deflus de l’horifon, fes
rayons tombent obliquement, pendant qu’il tourne
autour de l’horifon.
3 0. Le foleil ne va pas beaucoup au-deffous de
l’horifon, même pour les lieux fitués au pôle arctique
ou aux environs; 6c quoique fon centre ne monte
pas, une partie de ion difque paroît quelques jours
avant le centre ; car le demi-diametre du foleil fou-
tientun angle de 15 minutes. Par exemple, choififfez
un lieu près du pôle ar&ique, dont la latitude
foit de 67 degrés ; elevez le globe à cette latitude,
vous verrez qu’aucun degré de l’écliptique, depuis
le dix-neuvieme du fagittaire, jufqu’au onzième du
capricorne , où le centre du foleil à ces degrés ne
paroîtra fur la partie du nord de l’horifon pendant
23 jours, depuis le 30 Novembre jufqu’au 2 1 Dé cembre
, 6c que cependant une partie au foleil fera,
fur l’horifon pendant tout ce tems. Le 10 Décembre
le bord touche l’horifon, le 30 Novembre 6c le
3 1 Décembre la moitié du foleil fera au-defllis, 6C le
centre fera dans l’horifon; quand fon centre aura atteint
le quatorzième degre du capricorne, il fera
tout-à-fait au-defliis de l’horifôn, vers le 24 de Dé cembre
, 6c atifli quand il eft au feizieme degré du
fagittaire ou vers lë 26 Novembre.
Mais à 75 degrés de latitude ou même à 7 0 , la
différence entre le lever du centre 6c du bord fera
petite , 6c à peine d’un jour ou un jour 6c demi ; car
la déclinaifon du foleil commence alors à croître 6c
décroître fort vite.
Il s’enfuit de ce peu de dépreflîon qu’il doit y avoir
quelques jours de crépufcule avant le lever du foleil
& après fon coucher; 6c quand même le foleil feroit
un jour entier fans fe le v e r, cependant il y a de la
lumière à prefque toutes lés heures du jour. Une autre
caufe qui fait qu’on apperçoit le foleil avant qu’il
foit élevé au-deffus de l’horifon, eft la réfraction des
rayons. Non-feulement le foleil paroît plutôt, mais
le crépufcule arrive plutôt dans l’air qu’il ne feroit,
s ’il n’y avoit point de réfraftion.
40. La lune étant pleine ou prefque pleine , refte
plufieurs jours fur l’horifon, quand le foleil refte
deffous; 6c Ce tems eft d’autant plus long que le lieu
eft plus voifin du pôle ; cependant elle n’eft pas affez
haute pour pouvoir donner aucune chaleur ; mais
quand le foleil refte fur l’ horifon pendant toute une
révolution, la pleine lune n’eft jamais au-deffus.
50. Les mêmes étoiles fixes fe trouvent prefque
toujours fur l’horifon, mais non les mêmes planètes.
Saturne eft au-deffus de l’horifon pendant quinze ans
auprès du pôle 6c quinze ans au-deffous ; Jupiter en
eft fix au-deffus 6c fix au- deffous ; Mars un an ; Mercure
6c Vénus environ fix mois : ce qui met encore
beaucoup de différence entre les faifons.
6 °. La terre eft pleine de pierres 6c de rochers en
beaucoup d’endroits ; 6c dans cette {one il n’y a guère
de terre fulphureufe , graffe , bitumineufe. Dans
lé premier ca s, la terre eft un peu ftérile , 6c dans le
fécond, elle eft affez fertile.
70. Les lieux de la {one glaciale font entourés de
mers ; on ne connoit guère l’intérieur des terres.
8°. Il y a des pays fous la {ont glaciale oùfe trouvent
de hautes montagnes, 6c d’autres où il n’y a
que de vaftes plaines.
o°. Il fouffle du pôle des vents fort froids ; le Vent
d’ eft y eft ra re , 6c celui d’oueft encore plus ; mais
les vents du nord régnent fous la {one glaciale aréti-
que; 6c fous l’ antardtique ce font les vents de fud.
jj. io ° . On y voit des nuages 6c des pluies très-fréquentes.
On peut juger par ce détail quelles font les faifons
des {onçs froides ; l’air en hiver y eft obfcur, nébuleux
6c gelé : ces lieux ont cependant la lumière
de la lune qui refte long-tems fur l’horifon ; mais la
froideur du climat fait qu’il n’y croît rien du tout.
Au printems le froid eft plus modéré ; cependant le
pays n’ eft pas encore exempt de neiges, de pluies
6c des vents glacés qui viennent du nord. Le froid fe
ralentit lorfque le foleil paffe du premier degré du
bélier jufqu’au premier de l’écreviffe. Alors ' commence
là chaleur, chaleur qui cependant n’eft pas
affez forte pour fondre la neige. L’été arrive quand
le foleil entre dans le figne de l’écreviffe, 6c dure juf-
qu’à ce qu’il vienne au premier degré de la balance ;
mais cet été même eft quelquefois traverfé par la nei-
ge;de-là vient que leblénepeut pas mûrir,excepté en
quelques endroits yoifins du cercle polaire arétiqup.
Voilà diaprés Varenius, le tableau de la {one gla*
ciale; c’eft à M.Thompfon qu’il appartient de le colorier
; vous allez voir une fécondé fois comme il fait
peindre ; car je fuppofe que vous avez déjà lu la def-
cription de la {1one torride.
Notre hiver, quelque rigoureux qu’il fo it, dit cet
aimable poëte, feroit bien foible , fi nos yeux étonnés
perçoient dans la {ont glaciale, où durant les
triftes mois, une nuit continuelle exerce fur une im-
menfe étendue fon empire étoilé. Là le ruffe exilé
dans des prifons fans bornes, erre arrêté par la main
de la nature qui s’oppofe à fa fuite. Rien ne s’offre
à fa vue que des deferts enfévelis dans la neige, des
bois qui en font furchargés , des lacs gelés, 6c dans
le lointain , de ruftiques habitans, qui ne favent deS
nouvelles du genre humain, que quand les caravanes
dans leurs courfes annuelles tournent vers la côte
dorée du riche Cathay. Cependant ces peuples fourrés
vivent tranquilles dans leurs forêts; ilsfont vêtus
d’hermines blanches comme la neige qu’ils foulent
aux piés, ou de martres du noir le plus luifant, orgueil
fomptueux des cours !
Là les daims s’affemblent en troupe 6c fe ferrent
pour s’échauffer. L’élan avec fon bois éleve fa tête
de deffous la neige , 6c refte endormi dans l’abyfme
blanc. L’ours difforme, fauvage habitant de ces lieux
eft encore défiguré par les glaçons qui pendent autour
de lui. Il marche feul, 6c avec une patience fie-
r e , dédaignant de fe plaindre , il s’endurcit contre
le befoin preffant.
Dans les régions fpatieufes du No rd , qui voient
le bouvier célefte conduire fon char à pas lents une
race nombreufe en butte aux fureurs du Caurus glacial
, ne connoit point le plaifir , 6c ne craint point
les peines. Ce peuple ralluma une fois la flamme du
genre humain éteinte dans un efclavage policé ; il
chaffa courageufement 6c avec une rapidité terrible,
L s tribus errantes de la Scythie, les pouffa fans qu’*
elles puffent réfifter, jufqu’au fud affoibli, 6c donna
une nouvelle forme à,l’uni vers vaincu.
Les fils de Lapland méprifent au contraire le métier
barbare 6c infenfé de la guerre ; ils ne demandent
que ce que la fimple nature peut leur donner ;
ils aiment leurs montagnes, 6c jouiffent de leurs
orages. Les faux befoins, enfans de l’orgueil, ne troublent
point le cour* paifible de leur v i e , 6c ne les
engagent point dans les détours agités de l’ambition.
Leurs rennes font toutes leurs richeffes ; ils en tirent
leurs tentes, leurs robes, leurs meubles, une nourriture
faine, une boifion agréable. La tribu de ces
animaux débonnaires , docile à la voix du maître ,
tend'lis col au harnois qui l’attache à la voiture, &
ils l ’emportent rapidement à-travers les collines 6c
les vallons, qui ne font qu’une plaine endurcie fous
Une croûte de glace bleuâtre.
Ces peuples trouvent même dans la profondeur
de là nuit polaire un jour fuffifant pour éclairer leqï
chaffe, 6c pour guider leurs pas hardis vers les belle-s
plaines de Finlande ; ils font conduits par la clarté vacillante
des météores, dont la lueur réfléchit fansceffe
fur ies cieux, 6c par des lunes v iv e s, & des étoiles
plus lumineufes, qui brillent d’un double éclat dans
le firmament. Le printems leur arrive du fud rembruni.
L’aurore obfcure s’avance lentement ; le foleil ne
fait d’abord que paroître ; il étend enfuite fon cercle
enflé , jufqu’à ce qu’il foit vu pendant des mois entiers
; toujours faifant la ronde, il continue fa courfë
fpirale ; Ôc il eft prêt à fubmerger fon orbe enflanv»
mé, il tourne encore, 6c remonte âu firmament.
Dans cette joyeufe faifon, les habitans tirent leur
pêche des lacs 6c des fleuves aux lieux où s’élèvent
lès montagnes de Néemi fréquentées par les fées,
6c où le Tenglio, orné de quelques rofes, foule les
flots argentins : ils retournent gaiement le loir char*