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URABA , ( Géog. mod.') province de l’Amérique ,
dans la Terre-ferme, audience de Santa-Fé, 6c gouvernement
de Carthagène, au levant de celle de Da-
rien. Les forêts y font remplies de gibier, & les ri*
vieres, ainfi que la mer voifine,abondent en poiffon.
Les montagnes Cordilleras ne font pas éloignées
de cette province. ( D . J . )
U r a b a , golphe, ( Gcogr. mod.y autrement &
plus, communément le golphe de D arien; c’eft Un
golphe célébré de l’Amérique, à l’extrémité orientale
del’ifthme de Panama, fur la mer du nord. Son
entrée a fix lieues de large, & plulieurs rivières fe
déchargent dans ce golphe. ( D . J . )
V R A I , V ÉR ITA B LE , (Synon. ) vrai marque
précifément la vérité obje&ive; c’eft-à-dire, qu’il
tombe direttement fur la- réalité de la chofe; 6c
il lignifie qu’elle eft. telle qu’on l’a dit. Véritable
défignë proprement la vérité expreffive, c’e ft-à -
d ire , qu’il fe rapporte principalement à l’expôfi-
tion de la chofe, & lignine qu’on l’a dit telle qu’ elle
eft. Ainfi le premier de ces mots aura une grâce
particulière, lorfque, dans l’emploi, on portera d’abord
fon point dé vue fur le lujet en lui-m ême ;
6c le fécond conviendra mieux, lorfqu’on portera le
point de vue fur le difcours. Cette différence qu’ établit
M. l’Abbé Girard , eft extrêmement métaphyfi-
que ; mais on ne doit pas exiger des différences
marquées oîi l’ufage n’en a mis que de très délicates.
L’exemple fuivant qu’apporte le même auteur ,
peut donner jour à fa diftinétion, 6c faire qu’on la
lente mieux dans l’application que dans la définition.
\ Quelques écrivains, même proteftans, Soutiennent
qu’il n’eft par vrai qu’il y ait eu une papeffe
Jeanne , ce que l’hiftoire qu’on en a faite, n’eft pas
véritable.,Girard. (Z). J . )
Vrai , adj. ( Alg. ) une racine vraie eft une racine
affe&ée du ligne -1-, ou autrement une racinepo-
Jifive y par oppofition aux racines fatijjes, qui font
des racines négatives ou affeûées du ligne —. Foyer
R acine & E quation. (£ )
Vraies côtes. Voyez Côtes.
Vr a i, ( Poéjie. ) Boileau dit après les anciens,
Le vrai feu l ejl aimable l
I l doit regner pat tout, & même dans la fable.
Il a été le premier à obferver cette1 loi qu’il a
donnée : prefque tous fes ouvrages refpirerit le vrai ;
c’eft-à-dire qu’ils font une copie fîdele de la nature.
Ce v r a idoit fe trouver dans l’hiftorique, dans la
morale, dans la fi&ion, dans les fentences, dans
les defçriptions, dans l’allégorie.
Racine n’a prefque jamais perdu le vrai dans les
pièces de théâtre. Il n’y a guere chez lui l’exemple
d’un perfonnage, qui ait un fentiment faux , qui
l’exprime d’une maniéré oppofée à fa fituation ; fi
vous en exceptez Théramène, gouverneur d’Hippo-
lite , qui l’encourage ridiculement dans fes froides
amours pour Aricie.
Vous-même^ oit feriez-vous^ vous qui la combattez,
S i toujours Antiope à fes lois oppofée ,
D'une pudique ardeur n'eût brûlé pour Thèfée.
Il eft vrai phyfiquement qu’Hippolite ne feroit pas
venu au monde fans fa mere. Mais il n’eft pas dans le
vrai des moeurs, dans le cara&ere d’un gouverneur
f?g e , d’infpirer à fon pupille, de faire l’amour contre
la défenfe de fon pere.
C ’eft pécher contre le vrai, que de peindre Cinna
comme un conjuré timide , entraîné malgré lui
dans la confpiration contre Augufte, & de faire en-
fuite confeiller à Augufte, par ce même Cinna,
de garder l’empire, pour avoir un prétexte de l’af-
faffmer. Ce trait n’eft pas conforme à fon carafere.
V R A
11 n’y a rien de vrai. Corneille peche fôiivent contre
cette loi dans les détails.
Moliere eft vrai dans tout ce qu’ il dit. Tous les
fentimens de la Henriade, ceux de Z a ïre , d’Alzire
de Brutus, portent un cara&ere de vérité fenfible.
Il y a une autre efpece de vrai qu’on recherche
dans les ouvrages ; c’eft la conformité de ce que dit
un auteur-avec fon âge , fon caractère & fon état
Une bonne régie pour lire les aütèurs avec fruit
c’eft d'examiner fi ce qu’ils difent-eft vrai en général
s’il eft vrai dans les occafions où ils le difent, enfin
s’ il eft vrai dans la bouche des perfônnages qu’ils font
parler; car la vérité eft toujours la première beauté
& les autres doivent lui fervir d’ornement. C’eft la
; pierre de touché dans toutes les langues & dans tous
. les genres d’écrire. ( D . J . ) <
V R A IS EM B LA N C E , f . f. (Métaphyjique'.) la vérité
, dit le P; Buffier, eft quelque chofe de fiimpor-
« tant pour l’homme, qu’il doit toujours Chercher des
■ moyens sûrs pour y arriver ; 6c quand il ne le peut
il doit s’en dédommager en s’attachant à ce qui en
approche le p lus, qui eft ce qu’on appelle vraiffem•
| blance.
Au refte, une opinion n’approche du vrai que par
certains endroits ; car approcher dii vrai , c’ eft refléta*
bler au v r a i, c’eft-à-dire être propre à former ou à
rappèller dans l’efprit l’idée du vrai. O r , fi une opinion
par tous les endroits par lefquels on la peut
confidérer , formoit également les idées dit vrai, il
n’y paroîtroit rien que de v r a i, on ne pourroit juger
la chofe que vraie ; 6c par-là ce feroit effe&ivement
le v r a i, ou la vérité meme.
D ’ailleurs, comme ce qui n’ eft pas vrai eft faux,'
&■ que. ce qui ne reflemble pas au vrai reflemble au
faux, il fe trouve en tout ce qui s’appelle vraisemblable;
quelques - endroits qui reffemblent au faux;
tandis que d’autres endroits reffemblent au vrai. II
< faut donc faire la balance de ces endroits oppofés,
pour reconnoître lefquels l’emportent les Uns furies
autres, afin d’attribuer à une opinion la qualitéde
' vraiffemblable , fans quoi au même tems elle feroit
vraiffemblable 6c ne le feroit pas.
• En effet,, quelle raifon y auroit-il d’appeller femblable
au vrai, ce qui reflemble autant au faitx qu’au
vrai ? Si l’on nous demandoit à quelle couleur ref-
femble une étoffe tachetée également de blanc & de
noir., repondrions-nous qu’elle reflemble au blanc
parce qu’il s’y trouve du blanc ? On nous dëmande-
- roit en même tems, pourquoi ne pas dire âufli qu’elle
reflemble au noir, puifqu’elle tient autant de l’un
que de l’autre. A plus forte raifon ne pôurroit-on
pas dire que la couleur de cette étoffe reflemble au
blanc , s’il s’y trouvoit plus de noir que dé blanc. Au
contraire, fi le blanc y dominoit beaucoup plus que
le n o ir, en forte qu’elle rappellât tant d’idée du
blanc, que le noir en comparaison ne fît qu’une im-
preflïon peu fenfible, on diroit que cette couleur ap*.
proche du blanc, & reflemble à du blanc.
Ainfi dans les occafions où l’on ne parle pas avec
une fi grande exaôitude, dès qu’il paroît un peu
plus d’endroits vrais que de faux, on appelle la choie
vraiffemblable ; mais pour être abfolument vraiffemblable
, il faut qu’il fe trouve manifeftement &
fenfiblement beaucoup plus d’endroits vrâis que de
faux , fans quoi la reflèmblance demeure indéterminée
, n’approchant pas plus de l’un que de l’autre.
Ce que je dis de la vraifemblance, s’entend âufli delà
probabilité; puifque la probabilité ne tombe que fur
ce que l’efpnt approuve, à caufe de fa rèflemblance
avec le v r a i, fe portant du côté où font les plus
grandes apparences de vé r ité , plutôt que du côte
contraire, fuppofé qu’il veuille fe défefminer. Je dis,
fuppofé qu'il veuille f e déterminer y caf l’ èfprit ne fe
portant néceffairement qu’au v ra i, dès qu’il ne l’ap.'
V R A
perçoit point dans tout fon .jour, il peüt fufpendre
fa détermination ; mais fuppofé qu’il ne le fufpertde
pas, ü ne fautoit pencher que du côté de la plus
grande apparence de vrai.
& On peut demander, fi dans ufte opinion, il ne
pourroit pas y avoir des endroits mitoyens entre le
vrai 6c le faux, qui feroient des endroits où l’efprit
ne fauroit. que penfer. O r , dans les hypothefes pareilles,
on doit regarder ce qui eft mitoyen entre la
vérité & la fauffete, comme s’il n’étoit rien du tout ;
puifqu’en effet il eft incapable de faite aucune im-
preffion fur un efprit raifonnable. Dans les occafions :
mêmes où il.fe trouve de côté 6c d’autres des raifons
égales de juger, l’ufage autorifè le mot de vraiffemblable;
mais comme ce vraiffemblable reflemble autant
au menfonge qu’à la vé r ité , j ’aimerois miëüx
l’appeller douteux que vraiffemblable.
Le plus haut degré du vraiffemblable, eft celui qui
approche de la certitude p h y fiq u e laq u e lle peut
fubfifter peut-être elle-même avec quelque foupçon
ou poflibilité de faux. Par exemple, je fuis certain
phyfiquement que le foleil éclairera demain fhorifon;
mais cette certitude fuppofé que les chofes demeureront
dans un ordre naturel, 6c qu’à cet égard il ne fe
fera point de miracle. La vraiffemblance augmente,
pour ainfi dire, 6c s’approche du vrai par autant de
degrés, que les circonftanees,fuivantes s’y rencontrent
en plus grand nombre, 6c d’une manière plus
expreffe.
i ° . Quand ce que nous jugeons Vraiffemblable
s’accorde avec des vérités évidentes.
z°. Quand ayant douté d’une opinion nous ve nons
à nous y conformer, à méfure que nous y fai-
fons plus de réflexion, & que nous l’examinoriS- de
plus près;
3q. Quand des expériences que nous ne favions
pas auparavant,furviennent à celles qui avaient été
le fondement de notre opinion. -
40. Quand nous jugeons en coftféquenCe d’un plus
grand, ufage des chofes-que nous examinons;
5°. Quand les jugemens que nous avons portés'
fur des chofes de même nature, fe -font vérifiés dans
la fuite. Tels font à-peu-près les divers cara£tèrés‘
qui félon leur étendue ou leur nombre plus confidé-
rable, rendent notre opinion plus femblablé àla vé*- :
rite ; en forte que fi toutes ces circonfiances fe ren- ;
contrôlent dans toute leur étendue, alors comme 1
ï’opimon feroit parfaitement femblable à la vérité, i
elle pafferoit non-feulement pour vraiffemblable, j
mais pour vraie, ou même’ elle le feroit en effet.
Gomme une étoffé qui par tous les endroits reflem-
bleroit à du blanc , non feulement feroit femblable à
du blanc, mais encore feroit dite abfolument blanche.
Ce que nous venons d'obferver fur la vraiffcmblàn-
« en général, s’applique, comme de foi-même à la
vraisemblance; qui fe tire de l’autorité & du tém o ignage
des hommes. Bien que les hommes en général
puiffent mentir, & que même- nous. ayons l’expé*
nence qu’ils mentent fôuvent, néanmoins la nature
ayant infpiré à tous les hommes i’amour du v r a i, la
prefomption eft que celui qui nous parle fuit cette
inclination ; lorfquë nous n’avons aucune raifon de
Ju8er> ou de foupçonner qu’il ne dit pas vraiv
Les raifons que nous en pourrions a voir, fe tirént
ou de fa perfônne, ou des chofes qu’il nous d it; de'
lon^,r^°nne’ Pa rraPPor£ ou à fon efprit, oùà fa vo-
1 . Par rapport à fon efprit, s’il eft peu capable de
*|le,n UJ 6r -ce rapporte-; z°. fi d’autres fais
1 s ? mépris ; 3°'. s’il eft d’une imgination ombra-
geule ou échauffée : cara&ere très-commun mêmè
parmi des gens d’efprit, qui prennent aifément l’om-
re oui apparence des chofes pour les- chofesmêmes;
fome X V I L M
V R Â 4S3
oc le phan tôme qu’ils fe forment, pour là vérité qu’ils
croient difcerner.
Par rapport à la volonté ; i° . fi c’eft un homme
qui fe fait une habitude de parler autrement qu’il ne
penfe ; 20. fi 1 On à éprouvé qu’il lui échappe de ne
pas dire exactement la vérité ; 30. fi l’on apperçoit
dans lui quelque intérêt à diffimuler ; on doit alors
être plus réfervé à le croire.
A l’égard des chofes qu’il d it; i ° . fi ellés ne fé
fuivent & ne s ’accordent pas bien ; z ° . fi elles conviennent
mal avec ce qui rtous a été dit par d’autres
perfonnes âufli dignes de foi ; 3 0. \ ' éfiles font par
elles mêmes difficiles à c ro ire , ou en\ • fujets où il
ait pii aifément fe méprendre.
Ces Circonftanees contraires rendent VraiM Mablt
ce qui nous eft rapporté : fa vo ir , i ° . quand nous
connoiffons celui qui nous parle pour être d’un efprit
jufte 6c droit, d’une imagination réglée , & nulle*
mentombrageufe , d’une fincérité exade Sc conftan*
te ; i ° . quand d’ailleurs les circonftanees des chofei
qu il dit nèfedementerit point entre elles ; mais s ’accordent
avéc des faits ou des principes dont nous né
pouvons douter. A mefure-que ces mêmes cllbfés
font rapportées par un plus grand nombre de per-
fonnes, la vraifemblance augmentera auffi ; elle pour*
ra même de la forte parvenir à un fi haut degré ;
qu’il fera impoffibie de fufpendre notre jugement,
à la vue de tant de circonftanees qui feflèmblent au
vrai. Le dernier degré de la vraijeniblancé eft certitude
, commefon premier degré eft doute ; c’efbà*
dire qu’où finit le doute , là èommence là •vraifem*
blatïciy 6c où elle finit, là commence la certitude-,
Ainfi les deux extrêmes de la vraifemblance font Iê
dôùte 6c la certitude ; elle occupe tout l’intervallé
qui les fépare, 6c cet intervalle s’accroît d’autant plus
qu’il eft parcouru par des- efprits plus fins & plus
pénétfâris. Pouf des efprits médiocres^Ôc vulgaires;
cet efpace eft toujours fort étroit ; à peiné favent-ilÿ
difcerner les nuancès-'du vrai & dit vraifemb'lâble.
L ’ufage le plus naturel & le plus général dû vrai*
femblable eft dé füppiéer pour le vrai ; enforte qué
là où notre efprit ne fauroit atteindre le v fa i , il a ri
teign:e dirmoins lè vràifemblàblé , pour s’y rèpofef
comme dans la fituation la plus voifine du vrai,
i ° . A l’égard des chofes dé pure fpéculation , il
eft bon d’être réfervé à ne porter fon jugement dans
les chofes vraifemblables , qu’après une grande att
tention : pourquoi ? parce que l’apparence du vrai
fubfifte alors avec uàe apparence de faux , qui peut
fufpendre notre jugément jufqti’à ce que la volonté
le détermine. Je dis le fulpendfè , car elle n’a pas la
faculté de déterminer l’efprit à éè qui parole le moins:
vrai. Ainfi dans les chofes de pure fpéculation, c’eft
très-bien fait de ne juger que lorfque lés ; degrés de
vraifemblance font très-confidérables , 6c qu’ils font
préfquè difparoître les apparénees du faux , & le
danger de fe tromper.
En effet dans lès chofes de pure fpécülàtiôh, i l ne fe
rencontre nul inconvénient à ne pas porter fon ju<ye**
ment, lorfque l’on court quelque hafard de fe tromper
: or pourquoi juger, quand d’un côté ôn peut s’eii
difpenfer, 6c que d’un autre côté èri jugeant ,on s’êx-
pofe à donner dans le faux ? i l faudroit donc s’àbfte-
nir déjuger fur la plûpart des chofës ? n’éft-ce pas le
caraftere d’un ftupide ? tout-aü-contralre, c’ éft le ca-
raûëre d’ün efprit ferifé , 6c: d’un vrai' philofophe ,
de né juget des objets qüe par leur é vidëhté, quand
il ne fe trouve nulle raifon d’en uier aütrénient : or
il ne s’en trouve aucune dé juger danslës'Chôfës de
pure fpéculation, qüarid elles ne font qüë vraïfem*'
blables.
Cependant cette réglé fi judiciëufe dans les chofes dé
pure fpéculation, n’eft: plus’la même dans les chôfeS’
dé pratique & dêconduite, oùii faut-par néceffité agiif
f p p ÿ