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'ellefrn’ eitffept pas été conduites par les mêmes yeux.
Auffi Boerhaave ne manqua pas de perfectionner les
méthodes déjà établies.pour la distribution & la nomenclature
des plantes.
En 1 7.2.2 ., il fut attaqué d’une violente "maladie
dont il ne fe rétablit qu’avec peine. Il s’étoit expofé*
.pour herborifer, à la fraîcheur de l’air. & de la rofée
du matin, dans le tems que les pores étoient tout
ouverts par la chaleur du lit. Cette imprudence qu’il
recommandoit foigneulèment aux autres d’evite r,
penfa lui coûter la vie. Une humeur goutteul'e fu revint
, 6c l ’abattit au point qu’il ne lui reftoit plus de
mouvement ni prefque de ientâment dans les parties
inférieures du corps,; la force du mal étôit fi grande '9
qu’il fut contraint pendant long-tems defe tenir Couché
fur le dos, 6c de ne pouvoir changer de. pofture
par la violence du rhumatifme goutteux ,, qui ne s’adoucit
qu’au bout de quelques mois, julqu’à- permettre
des remedes. Alors M. Boerhaavepritdes potions
çopieiifes de lues exprimés de chicorée, d ’end
ive , de fumeterre , de crefl'on aquatique & de vé ronique
d’eau à larges feuilles : ce remede lui rendit
la fanté,comme par miracle. Mais ce qui marque julqu’à
quel point il étoit conlidéré & chéri, c’eft que
le jour qu’il recommença fes leçons, tous les étu-
dians firent le loir des réjouiflances publiques , des
illuminations 6c des feux de jo ie , tels que nous en
faifons pour les plus grandes victoires.
En 1725 , il publia , conjointement avec le pro-
jfelTeur Albinus , une édition magnifique des oeuvres
d e Véfale, dont il a donné la vie dans la préface.
En 1 7 2 7 , il fit paroître le Botanicon parifienfe de
-Sébalîien Vaillant. Il mit à la tête une préface lur la
vie de i’auteur 6c fur plufieurs particularités qui regardent
ce -livre. On y trouve un grand nombre de
choies-nouvelles qui . ne fe rencontrent point dans
l’ouvrage de Tournefort. On y voit les caraéteres
des plantes & les fynonymes marqués avec la dernière
exactitude. Il y régné encore une favante critique
touchant les deferiptions , les figures & les
noms que les auteurs ont donnés des .plantes ; enfin
la beauté des planches répond au relie.
En 17 2 8 , parut fon traité latin des maladies vénériennes,
qui fut reçu avec tant d’accueil en Angleterre
, qu’on en fit une traduction 6c deux éditions en
moins de trois mois. Le traité dont nous parlons,
iert de préface au grand recueil des auteurs qui ont
écrit fur cette même maladie, 6c qui elt imprimé à
Leyden en deux tom. in-fol.
Vers la fin de 1 7 2 7 , M. Boerhaave avoit été attaqué
d’une fécondé rechute prefque auffi rude que la
première de 17 2 2 , & accompagnée d’une fievre ardente.
Il en prévit de bonne heure les fymptomes
qui fe fuccéderoient, prescrivit jour-par-jour les
remedes qu’il faudroit lui donner, les prit 6c en réchappa;
mais cette rechûte l’obligea d’abdiquer deux
ans après , les chaires de Botanique & de Chimie.
En 1 7 3 1 , l’académie des Sciences de Paris le nomma
pour être l’un de fes affociés étrangers, & quelque
tems après, il fut auffi nommé membre de la
Société royale de Londres. M. Boerhaave fe partagea
également entre les deux compagnies, en envoyant
à chacune la moitié de la relation d’un grand travail
fur le vif-argent, fuivi nuit & jour fans interruption
pendant quinze ans fur un même fe u , d’où il réful-
toit que le mercure étoit incapable de recevoir aucune
vraie altération, ni par conféquent defe chanr
ger en aucun autre métal. Cette opération ne conve-
noit qu’à un chimifte fort intelligent, fort patient &
en même tems fort aifé. Il ne plaignit pas la dépenfe,
pour empêcher , s’il efl poffible , celle où l’on eft fi
Souvent 6c fi malheureufement engagé par les alchi-
miftes. Le détail de fes obfervationsàce fujet fe trouv
e dans Vhift. de Cacad. des Sciences , ann, ‘ J 3 4 > 6c
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dans les Tranf. pbilofop. n °. 43 o , année , Qn Y
verra avec quelle méthode exaCte , rigide 6c l'crupu-
leufe , ila fait fes expériences, & combien il a fallu
d’induftrie 6c de patience pour y. réuffir.
La même année 1 7 3 1 , Boerhaave avoit donné ’
avec le fecours de M..Grorenvelt, médecin 8c magistrat
de L e y d e , une nouvelle édition des oeuvres
d’Arétée de» Çappadoce; il avoit deffein de faire imprimer
en un corps 6c de la même maniéré, tous les
anciens médecins grecs ; mais fes occupations ne lui
permirent pas d’exécuter cet utile projet.
,;En 17 3 2 , parurent fes élémens de Chimie, Lusd.
Bat. ty3 z , in-40. -2 vol. ouvrage qui fut reçu avec
un applaudiffement univerfel. Quoique la chimie eût
déjà été tirée de ces ténèbres myflérieufes où elle fe
retrançhoit anciennement , il femblôit néanmoins
qu’elle ne le rangeoit pas encore fous les lois générales
d’une fcience réglée 6c méthodique ; mais M.
Boerhaave l’a réduite à n’être qu’une fimple phyfi-
que claire 6c intelligible. Il a raffemblé toutes les lumières
acquifes, 6c confufément répandues en mille
endroits différons , & il en a fa it, pour ainfi dire,
une illumination bien ordonnée , qui offre à l’efprit
un magnifique fpeCtaele. La beauté de cet ouvrage
paroit fur-tout dans le détail des procédés , par la
Sévérité avec laquelle l’auteur s’eft aftreint à la méthode
qu’il s’eft preferite , par fon exaftitude à indiquer
les précautions néceffaires pour faire avec fureté
& avec fuccès les opérations, 6c par les corollaires
utiles 6c curieux qu’il en tire continuellement.
Voilà les principaux ouvrages par lefquels Boerhaave
s’eft acquis une gloire immortelle. Je paffe
fous filence fes élégantes differtations recueillies en
un corps après fa mort ,6c quelques-uns de fes cours
publics fur des Sujets importans de Part, que les célébrés
dofteurs Van-Swieten & Tronchin nous donneront
exactement quand il leur plaira. Tous les élevés
de ce grand maître ont porté pendant fa vie dans
toute l’Europe, fon nom 6c fes louanges. Chacune
des trois fonctions médicinales dont il donnoit des
leçons, fourniffoit un flot qui partoit, 6c fe.renou-
velloit d’année en année. Une autre foule prefque
auffi nombreufe venoit de toutes parts le confulter
fur des maladies fingulieres, rebelles à la médecine
commune, & quelquefois même par un excès de confiance,
fur des maux incurables ; fa maifon étoit comme
le temple d’Efculape, 6c comme l’eft aujourd’hui
celle du profeffeur Tronchin à Genève.
Il guérit le pape Benoît X III. qui l’avoit confulté,'
& qui lui offrit une grande récompenfe. Boerhaave
ne voulut qu’un exemplaire de l’ancienne édition
des opufcules anatomiques d’Euftachi, pour la
rendre plus commune, en la faifant réimprimer a
Leyde. Enfin fon éclatante réputation avoit pénétré
juSqu’au bout du monde ; car il reçut un jour du fond
de l’Afie , une lettre dont l’adreffe étoit Amplement,
à monjieur Boerhaave, médecin en Europe.
Après cela, on ne fera pas furpris que des fouve-
rains qui fe trouvoient en Hollande, tels queleczar
Pierre I .& le duc de Lorraine aujourd’hui empereur,
Paient honoré de leurs vifites. Le czar vint pour
Boerhaave à Leyde en yacht, dans lequel il pafTa la
nuit aux portes de l’académie, pour être de grand
matin chez le profeffeur, avec lequel il s’entretint
affez long-tems. « Dans toutes ces occafions, c’elt
» le public qui entraîne fes maîtres, & les force a
» fe joindre à lui ».
Pendant que ce grand homme étoit couvert de
gloire au-dehors, il étoit comblé de confidération
dans fon pays & dans fa famille. Suivant l’ancienne
6c louable coutume des Hollandois, il ne fe détermina
au choix d’une femme, qu’après qu’il eût vu la
fortune établie. Il époufa Marie D rolenvaux, & vécut
avec elle pendant 28 ans daps la plus grande
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union. Lôrfcju'il fit réimprimer en 17 1 3 , fes ïntfilmions
de médecine , il mit à la tête une épître dé-
dicatoire à fon beau-pete, par laquelle il le remercie
dans les termes les plus vifs, de s’être privé de fa
fille unique, pour la lui donner en mariage-, C ’étoiï
au bout de trois années, dit joliment M» de Fonte-
nelle », que venoit ce remerciment, 6c que M. Boerhaave
faifoit publiquement à fa femme une déclaration
d’afflOuiV
Toute fa vie a été extrêmement laborieufe, & fo n
tempérament robufte n’y devoit que mieux fuccom-
ber. Il prenoit encore néanmoins de l’exercice, foit à
pié, foit à cheval fur la fin de fës jours. Mais depuis fa
rechute de 17 27,des infirmités différentes Paffoiblirent
&le minèrent promptement. Vers le milieu de 17 3 7 ,
parurent les avant-coureurs de la derniere maladie
qui l’enleva l’année fuivante, âgé de 69 ans, 3 mois
6c 8 jours.
M. Boerhaave étoit grand, proportionné & ro"-
bulle. Son corps aüfoit paru invulnérable à l’intempérie
des élémens, s’il n’eût pas eû un peu trop d’embonpoint.
Son maintien étoit fimple 6c décent. Son
air étoit vénérable , fur-tout depuis que l’âgè avoit
blanchi fes cheveux. Il avoit l’oeil v i f, le regard perçant
, le nez un peu re le v é , la couleur vermeille , la
voix fort agréable, 6c la phyfionomie prévenante.
Dans ce corps fain logeoit une très-belle ame, ornée
de lumières & dé vertus.
Il a laiffé un bien confidérable , plus de deux millions
de notre monnoie. Mais fi l’on réfléchit qu’il a
joui long-tems des émolumens de trois chaires de
profeffeur ; que fes cours particuliers produifoient
beaucoup ; que les confultations qui lui vénoiènt de
toutes parts étoient payées , fans qu’il l’exigeât, fur
le pié de l’importance des perfonnes dont elles ve-
noient, 6c fur celui de fa réputation ; enfin fi l’on
confidere qu’il menoit une vie fimple, fans faiitai-
fies , & fans goût pour les dépenfes d’oftentation,
on trouvera que les richeffes qu’il a laiflees font modiques,
6c que par conféquent elles Ont été acquifes
par les voies les plus légitimes. Mais je n’ai pas
dit encore tout ce qui eft à l’honneur de ce ofand
homme.
Il enfeignoit avec une méthode , une netteté &
une précifion fingulieres. Ennemi de tout excès , à la
teferve de ceux de l’étude , il regardoit la joie honnête
comme le baume de la vie. Quand fa lànté ne
lui permit plus l’exercice du cheval, il fe promenoit
a pié ; & de retour chez lu i, la mufique qu’il aimoit
beaucoup , lui faifoit paffer des momens délicieux,
■ou il reprenoit fes forces pour le travail. C’étoit fur-
tout à la campagne qu’il fe plaifoit. La mort l’y a
trouvé, mais ne l’y a point furpris. J ’ai vu 6c j ’ai
rççu de fes lettres dans les derniers jours de fa derrière
maladie. Elles font d’un philofophe qui envi-
lage d’un oeil fioïque la deftruâion prochaine de fa
machine. Sa vie avoit été fans taches, frugale dans
je lein de l’abondance, modérée dans la profpérité,
& patiente dans les traverfes.
Ilmeprifa toujours la vengeance comme indigne
e lui, fit du bien à fes ennemis, 6c trouva de bonne
eure le fecret de fe rendre maître de tous les mou- j
emens qui pouvoient troubler fa philofophie. Un |
jour qu fl donnoit une leçon de médecine, OÙ j'ètois *
P.rAe ent > f ° n garçon chimifte entra dans l’auditoire
P^lr J enouVeller le feu d’un fourneau ; il fe hâta
bord p nVe^ 3 coupelle. Boerhaave rougit d’a-
ÿ • ‘ » dit-il.en latin à fes auditeurs, une op'éen
u ° y vjngt ans fur le plomb, qui eft évanouie
déf.»r ' 1 tournant enfuite vers fon valet
„ Pere fe faute. « Mon ami, lui dit-il, raffurèz-
» unUS ’ CC ” en » jfeuroi's tort d’exiger de vôtis
» mn -at,tent*on perpétuelle qui n’eft pas dans l’hu-
nite Apres l’avoir ainfi confolé , il continua
a leçon avec le même fens-froid, que s'il eût perdu
le fruit d une expérience de quelques heures.
Il le mettoit volontiers à la.place des autres, ce qui
V comme le remarque très-bien M. de Fontcnelle 'J
produit l’équité 6c l’indulgence ; & il mettoit auffi
volontiers les autres en la place , ce qiiipfévïent OU
réprimé l’orgueil. Il défarmoit la latyfe 'en la négligeant
, comparant fes traits aux étincelles qui s’élancent
d’un grand feu, 6c s’éteignent auffi-tôt qu’on
ne louflie plus deffuS. ■ ■
Il fa voit par fa pénétration. démêler' àü premief
coup-d oeil le câradere des hommes , & perlonnë
n etoit moins, foupçonn-eux. Plein de gratitude
fut toujours le panégyrifte de fes bienfaiteurs , & ’ ne
croyoit pas s’acquitter en prenant foin de là vie de
toute leur famille. La modeftie qui né fe démentit
jamais chez lui , au milieu dés applaudiffeinéns de
1 Europe entière, auginentoit encore l’éclat.dè fes
autres vertus.
Tous mes éloges, n’ajouteront rien à fa1 gloire :
mais je ne dois pas fupprimer les obligations particulières
que je lui ai, II m’a comblé de bontés pendant
cinq ans , que j’ai eu l’honneur d’être fon difei-
pie. Il me follicita long-tems avant que je qùittaffe
l ’académie de Leyde , d’y prendre le degré de docteur
en Médecine , & je ne crus pas devoir me re-
fufer à fes defirs, quoique réfolu de né tirer de'cette
démarche d’autre avantage que celui que Phornme
recherche par humanité, j’entends de pouvoir fecou*
rir charitablement de pauvres malheureux. Cependant
Bperhaave^eftimanttrop une déférence, qui ne
pouvoir que m’ être honorable , Voulut la recbnnoî-
tre , en me faifant appeller par le ftàdhôuder à des
conditions les plus flatteufes , comme gentilhomme
& comme médecin Capable de veiller à la conlerva-
tion de fes jours. Mais la paffion de l’étude forme
naturellement des âmes indépendantes. Ëh ! que peuvent
les promeffes magnifiques des cours fur un
homme ne fans .befoins, fans,defirs, fâris ambition,
fans intrigue ; affez courageux pour pré'fenter fes
refpeâs aux grands, affez prudeftt pour ne les pas
-ennuyer , & qui s’eft bien promis d’aflurer fon repos
p arJ’obfcurité de fa vie ftudieufe? Après tout,
les fervices éminens que M. Boerhaave vôuloit me
rendre étoient dignes de lui, & font chers à ma mémoire.
Auffi, par vénération & par reconnoiffance,'
je jetterai toute ma vie des fleurs fur fon tombeau.
Manibus dabo lilia plenis.
Purpüreos fpargam fio n s , & fungar inani
Munere.
( Le chevalier D E J A U COU AT. )
VO ORN , (Géogr. mod.) île des Pays-bas, à l’embouchure
de la Meufe , dans la Hollande méridionale
, au nord des îles de Goerée 6c d’Ovef-Flalcée
dont elle eft féparée par l’Haring-Vliet. La Brille &
Helvoet-Sluys en font les principaux lieux. C’èft delà
qu’on s’embarque ordinairement pour l’Angleterre.
L ’ile de Voorn abonde en grains , & produit
naturellement une efpece de genêt à grandes racines
, par le moyen delquelles on maintient dans leur
force les digues & les levées. ( D . J . ')
VOPISCUS , f. m. ( Hifl. àrtc. ) terme latin ufi-
té pour lignifier Celui de deux enfans jumeaux qui
vient heureufement à.terme , tandis qtlé l’autre n’y
vient pas. Voye{ JUMê à UX & AvORTÈMEn t .
VO QUER , ce mot n’eft pasfrançois, quoiqu’il
fé life dans Trévoux ; c’eft voguer que difént les Potiers
de terre 6c autres ouvriers, Voyez Vorit/ER'.
VO R A C E , àdj, VO R A C IT É , f. f. (Gfatà.) qui
dévore , qui eft carnacier, qui ne fe donne pas lé
tems de mâcher. Cet épithete convient à prefque
tous les animaux. Il y a la voracité dë l’efpecè , & la
voracité de l’individu ; il y a des oiféàUX voraces. La