des .couleurs, & le brillant de la couverte. (Le chevalier
d e J a U C O U R T . ) ; ; ' ■
V e r r e y {.Lunetier.f comme la bonté deslunettes
d’approche dépend de celle des verres qu’on emploie
dans leur conftruâion, je vais parler du choix que l’on
doit faire , de la matière du verre , aufli-bien que de
;la maniéré de le préparer.
. On doit choifir le verre pur, net & bien égal dans
ta fub ftance fans flamofités ni bouillons confidéra-
b le s, le moins coloré qu’ il eft poflible, 6c fur-tout
fans ondes , finuofités, nuages, ni fumées, qui le
rendraient, quelque bien travaillé qu’il fu t, absolument
inutile à la conftru&ion de l’ oculaire. Mais ,
comme on ne peut connoître, fi le verre a les qualités
requifes lorfqu’il eft brut, l’artifte doit avoir foin
de le découvrir 6c de le polir au-moins grpflierement
-des deux c ô t é s s ’il ne veut s’expofer à un travail
inutile. ' •. .
Je fuppofe donc le, verre régulièrement tranfpa-
rent découvert & poli des deux côtés, comme font
les fragmens des miroirs de Venife ou autres, on les
examinera de la maniéré fuivante. Premièrement ,
on l’èxpofera au fo le il, recevant fes rayons au travers
fur un papier blanc , qui fera clairement paraître
les filets, les fibres finüeufes & les autres inégalités
qui peuvent y être. On regardera enfiiite au-
travers quelque objet médiocrement proche 6c élev
é fur l’horifon, comme peut être quelque pointe
de clocher ; hauffant 6c bàiffant le verre devant l’oeil
'6c confidérant avec attention, fi dans ce mouvement,
l’objet ne paraît point ondoyant au-travers du verre;
car fi cela étoit, il ne pourroit point fervir à l’oculaire
; & le verre pour être b on , doit nonobftant ce
mouvement, rendre toujours l’apparence de l’objet
parfaitement fiable & fans aucun mouvement. On
confidérera en fécond lieu, fa couleur, qui doit être
extrêmement légère Sc fans corps ; les bonnes couleurs
du verre font celles qui tirent fur l’eau vinée ,
fur le bleu, fur lé v è rd , ou même fur le noir ; mais
toujours fans .corps. Le verd ou couleur d’eau marine
eft la plus ordinaire : on connoît la bonté de toutes
ces couleurs, en mettant tous ces différens verres
fur un papier blanc ; car celui qui le repréfentera
bien nettement 6c naïvement, fans colorer fa blancheur,
fera le meilleur. Il faut enfuite examiner, fi
le verre qu’on veut travailler eft également épais par
tou t, ce que l’on connoîtra avec un compas à pointes
recourbées ; cette précaution eft fur-tout nécef-
faire aux verres dont on veut faire des objeâift , à
la préparation 6c au travail defquels on ne fauroit
apporter trop d’exaûitude. Suppofé- que le verre
n’ait pas une égale épaiffeur partout, il faut l’y mettre
avant que de lui donner aucune forme fpherique,
la chofe étant impoflible après, fur-tout lorfqu’on le
travaille à’ la main libre 6c coulante.
Aptès avoir examiné les -verres, comme on vient
de dire , on les coupera d’une grandeur proportion^
née au'travail qu’on en veut faire ; obfervant, s’il s’y
trouve quelques petits points ou foufflures , de les
éloigner toujours du centre le plus qu’ il fera poflible;
l’on mettra pour cet effet un peu de maftic fur ces
pièces'de Verre dans un lieu convenable pour y po-
ler la pointe d’un compas , avec lequel on tracera
une circonférence avec: une pointe de diamant pour
ler.couper enfuite plus rondement. L’on tiendra les
obje&ifs affez grands, -pour qu’ils aient plus de conduite
fur la forme. A l’égard des verres de l’oe il, il
faut en faire quelque diftinttion ; car pour les grands
oculaires-de deux v e r r e son les fera aufli larges, que
Pépaiffeur du verre 6c fa diaphanéité pourront le permettre
les plus larges font les plus commodes. Mais
pour le$ oculaires compofés de plufieurs convexes,
îa grande largeur n’y eft point utile, 6c encore moins
Pépaiffeur, fans laquelle on ne fauroit leur donner
une grande largeur; Il fuffira communément, feloit
la différente longueur des oculaires , qu’ils aient de
largeur en diamcttre, depuis 8 pour les petits , jufqu’à
i 8 lignes pour les plus longs, de io à 12 piés.
il, convient aufli de les rogner au grugeoir ou à la
pincette bien rondement fur le trait du, diamant fait
au, compas ; car cette rondeur feryant de première
conduite à l’ouvrage, eft le fondement dé l’efpéran-
cé qu’011 petit avoir de-bien réuflîr au travail.
La fécondé chofe dans laquelle confifte la prépara-
tioti dti verre au travail^ eft à le bien monter fur la
molette, voye[ M o l e t t e . Pour cet e ffet, on fera
fondre le maftic dont on veutfe fe rv ir; & pendant
ce tems-là, l’on mettra les molettes de cuivre ou de
métal fur le feu, pour leur donner quelque médiocre
degré de chaleur, afin que le maftic s’y attache plus
fortement. L’on dreffera enfuite ces molettes , leur
plate-forme en-deflus ; 6c l’on remplira leur canal
tout-à-l’entour de ce maftic fondu , qu’on y laiffera
à demi refroidir , pour y en ajouter de mol autant
qu’il fera néceflaire pour égaler la fuperficie de leur
plate-forme, fur laquelle il ne doit point y en avoir
du tout. On s’accommodéra donc proprement à la
main , à i’épaiffeur d’un demi pouce tout-à-l’entour ,
en y laiflant un efpace vuide, comme un petit foffé
d’environ deux lignes, tant en largeur qu’en profondeur
entre le bord de la plate-forme, pour empêcher
qu’il ne la touche. Le maftic doit cependant toujours
lurmonter la plate-forme de la hauteur d’une bonne
ligne. Pour y appliquer maintenant le verre -, on le
chauffera médiocrement, de même que le maftic, fur
lequel on l’affeoira enfuite bien adroitement ; l’y
preflant également avec la main, jufqu’à ce que 1a
fuperficie touche exactement celle du bord de la plate
forme de la molette, & qu’elle paroiffe bien jufi-
te. Cela fa it, on renverfera la molette fur une table
bien droite , 6c bn biffera refroidir le verre 6c le
maftic fous fon poids. On remarquera que la largeur
du verre peut bien excéder quelque peu celle du maftic
de la molette ; mais la molette ne doit jamais excéder
la largeur du verre au dedans de fon bifeau. Le
maftic doit aufli toujours recouvrir toute la circonférence
extérieure du verre bien uniment, afin que
le grès ou mordant ne puiffe point s’y arrêter , &
qu’on puiffe entièrement s’en débarraffer en la lavant.
Pour travailler néanmoins avec affurancë, & ne
point eXpofer les bons verres aux premières atteintes
trop rudes du mordant ; on préparera aufli des verres
de rebut, que l’on montera fur des molettes fembla-
bles de.cuivre ou de métal. Et quoique ces verres ne
doivent fervir que d’épreuve, comme pour égalée
le mordant fur la forme , avant que d’y expofer le
bon verre , 6c lorfqu’ayânt difcontinué pour un temS
l’on veut fe remettre au travail, pour connoître s’il
n’eft point tombé des faletés fur la forme, qui le pût
garer ; ils doivent cependant être montés proprement
fur leur maftic, pour qu’il ne s’y attache aucune
faleté que, l’eau ne, puiffe ôter ; car autrement,
loin de fervir à conferyer les bons verres, ils pour-
roient fouvent les gâter, en apportant des ordures
fur la forme ; c’eft pourquoi on doit les tenir aufli
proprement que Jes bons verres.
La troifieme chofe néceflaire pour préparer le ver*
re au travail, c’eft un bifeau qu’on doit y faire tout-
autour. Car quoique le verre, jufque ici préparé,
foit déjà rondement coupé au grugeoir fur le trait du
diamant, il a néanmoins encore befoin d’être exactement
arrondi, avant que d’être expofé fur la forme
qu’on veut lui donner.
Pour donner donc ce bifeairau verre, l’on prendra
la forme de la plus petite fphere appellée débor-
doir y repréfentée:, fig. PI. du Lunetier, dans laquelle
ce verre pourra entrer d’environ un demi pôii-’
ee Paffermiffant bien avec du maftic fur tin S -table
folide, qui ne doit point excéder la hauteur cônimo-
d e , pour avoir la liberté entière du mouvement du
corps dans le travail ; 6c ayant mis des grais du premier
degré de groflèur dans cette forme avec un peu
d’eau, on y travaillera les bords du verre, l’appuyant
d’abord ferme, 6c pbfervant de la main , s’il n’y porte
point en bafcule. On fera parcourir à ce verre,
le preflant en tournant contre la forme , toute fa fu-
perfide concave, pour ne la point décentrer, 6c Pu-
fer également 6c régulièrement ; & lorfqu’on verra
le bifeau approcher de la largeur qu’on veut lui, donner
on ne changera plus le grès de la forme pour
qu’il s’adouciffe , on en ôtera même peu-à-peu pour
l’adoucir plus promptement, car il n’eft pas necef-
faire de le conduire par cet adouciffement au p o li,
& il fuffit qu’il le foit médiocrement pourvu qu’il
ait l’angle bien vif. Ce bifeau acheyé , on lavera
bien ce verre aufli-bien que le maftic de la molette ,
l’effuyant d’un linge bien net 6c le mettant dans un
lieu propre 6c hors de danger. On remettra enfuite
d’autre grès dans la même forme, pour donner de
même le bifeau au verre d’épreuve ; on le lavera de
même , lé tenant aufli proprement que le bon, 6c
on nettoyera la forme dont on s’eft fervi.
Maniéré de travailler le verre , & de le conduire fu r
la forme à la main libre & coulante. Le verre étan t entièrement
préparé comme on vient de dire , jufqu’à
être monté fur fa molette , on affermira la platine
qui doit fervir à le former fur une table de hauteur
convenable 6c placée bien horifontalement ; 6c après
avoir mis deffus du grès de la première forme , peu
néanmoins à la fois , c’eft-à-dire autant feulement
qu’il en faut pour couvrir Amplement’fa fuperficie ,
6c l’avoir également étendu avec le pinceau ; on
commencera par y paffer le verre d’épreuve pour
l’égaler. On conduira fa molette en tournant, par
circulations fréquentes'; premièrement, tout-autour
, de fa circonférence ; puis en defcendant tout-autour
du centre, 6c fur le centre même ; 6c enfuite remon-
' tant de .même doucement, & par le même chemin
vers la circonférence. Ce w « d’épreuve ayant ainfi
parcouru toute la fuperficie de la forme , 6c tout le
grès ayant paffé deffous ; on l’ôtera pour y mettre
le bon verre 6c l’y travailler. J ’en fais voir la conduite
dans la figure par la defcription de plufieurs lignes
circulaires , qui fe tenant continûment, repré-
ientent affez bien l’ordre qu’on doit obferver,en donnant
le premier mouvement au verre fur la forme.
La circonférence a b c d repréfente la fuperficie
d’une forme de 10 pouces de dipmetre, qui peut fervir
pour les obje&ifs des oculaires de 2 0 , 2.5 6c 30
piés de longueur. Elle eft également divifée par 18
cercles , qui y marquent le chemin du verte par l’ordre
des caractères qui y font décrits. Ayant mis le
verre fur la partie fuperieure a de la forme, on le conduira
fur la demi-circonférence a e jufqu’à fon centre
f ; depuis lequel ; au-lieu de conduire le verre par
: 1 autre demi-circonference f 3 5 a du même cercle,
s’en éloignant un peu vers la gauche , on le conduira
par la demi-circonférence ƒ g h , recommençant un
autre cercle en ƒ , que l’on continuera par fon autre
demi-circonférence h i jufqu’au c en tre /, duquel on
recommencera de même une nouvelle circonférence
f k f que l’on continuera de/par;« en ƒ , pour de-là
commencer le cercle ƒ n o p , 6c. enfuite ƒ q r f , puis
J t u x-,6 c conduifant ainfi lé verre fucceflivement à-
peu-près par tous ces cercles, jufqu’à ce qu’on lui ait
tait parcourir toute la fuperficie de la forme ; on en
recommencera une nouvelle de la même maniéré
réitérant continuellement ce mouvement, jufqu’à ce
que le verre foit parfaitemeut formé. En travaillant
de meme , on confervera la figure fpherique de la
forme a qui fans cela fer-oit bientôt altérée.
. Le vitfir étant iuftfaffltfient preffé fufîa formé par
le poids de là, molette, il eft inutile de le prefferda*
vantage dé la main, 6c il fuffit dé lé conduire biéflt
egalement ■ & fermement d’un tfain continu U ftOft
entreçoupe.G eft pourquoi,il fuffit de Je diriger d*unô
feule main , tenant la molette de façon que tôus les
doigts appuyant fur la douicine de fa plate-bande bc±
le fommet ou globe de la. molette ^fe, trouve environ
fous le doigt du milieu. Voilà, ce qui concerne fort
premier mouvement ; mais il ne fuffit pas polir i&
former parfaitement, il faut encore lui en donner urt
autre qui ne-doit pas être-local comme le premier*’
mais fur l’axe, de fa molette. Conduifant donc celle*
ci circulairement, comme- j ’ai d it , il la faut encore
en même, tems tourner continuellement entre les
doigts-, comme fur un axe propre de la molette , .qu*
la traverfant, tomberait perpendiculairement fur la
forme; par le centre de fa .fuperficie & de la fphéricité
du verre ; afin q.ue fi la main, par quelque défaut na*
turel, prefloit la molette plus, d’un côté que de l’au*
tre , cet effort foit également partagé dans fon effet
fur toute la circonférence du verre ; 6c qu’étant fup-»
plée par ce fécond mouvement , il ne Gaufe aucun
obftacle à la formation parfaite du verrez
Comme le grès étant trop affoibli par le travail
n’agit plus que fort lentement fur le verre ; lorfqu’on
lefentira foible , l’on en changera , 6c y en mettant
de nouveau , on l’égalera de même que la premieré
fois avec le verre d’epreuve.. Continuant enfuite le
travail du bon verre fur ce nouveau grès , l’on réitérera
de le changer jufqu’à ce que le verre approche
d’être entièrement atteint de la forme. Car alors farçs
le plus changer 3 on achèvera de le former 6c de l’adoucir
avec ce- même grès, s’il y en afuffifamment \
finor» çn.y. en ajoutera d’autre du même degré de
force que l’on aura confervé. On l’égalera toujours
parfaitement avec le verre d’épreuve ayant d’y commettre
le bon’; pour éviter qu’il ne rencontre quelque
grain moins égal, qui pourroit le gâter lorfqu’il eft à
la veille d’êtrë entièrement formé ; on continuera
donc de travailler ce verre avec ce grès affoibli, qui
ne fera plus que. l’adoucir , jufqu’à ce qu’on fente à
la main qu’il, ne travaille plus : alors nettoyant le
verre, on examinera s’il n’a'point de défauts impor-
tans qu’il aitjpu contrarier dans le travail, comme
des filandres , ou des traits confidérables , ou des
flancs qui fe (oient ouverts dans un lieu défavanta*
geux, comme près du centre ; cardés qii’on apperçoit
de femblables défauts fans paffer plus avant , ce qui
ferait du tems 6c du travail perdu , il faut les ôter ,
remettant du grais fur la forme du degré de force qu’on
jugera néceffaife pour cet effet, & le retravailler
de nouveau , comme on a d it, jufqu’à ce qu’on
ait ôté le défaut, 6c qu’on piiiffe le reconduire de même
par l’adouciffement du poli.
Peu importe que l’on faffe ce travail à grès fec ou
humide ; mais fi l’on a travaillé, à / e c , il faudra poiu?
perfeéli.onner f adouciffement du verre, bien nettoyer*
la forme 6c les verres, tant le bon que celui d'épreuv
e , pour qu’il n’v refte ni grain, ni ordure, & mettre
enfiiite fur la forme un peu de grès delà derniere
fineffe, que l’on humeftera d’un peu d’eau, 6c fur*
lequel on travaillera d’abord le verre d’épreuve »
jufqu’à ce qu’on fente ce grès dans la douceur qu’il
doit avoir pour perfectionner l’adouciffement du boiri
verre qu’on mettra deffus pour l’achever avec attention
& patience * je dis avec patience , parce, que le
verre fe polit d’autant plus régulièrement, sûrement
6c promptement qu’il eft plus parfaitement adouci»
Il ne faut donc pas penfer qu’il foit fuffifamment
adouci, qu’il ne paroiffe à-demi poli en fortant de
deffus la forme.
Pour bien adoucir un verre , il faut avoir foin de
ne laifferfur la forme qu’ autant de grès qu’il en fau(
I