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mende ; mais s’il n’ avoit pas féjourné trois jours, le
maître en étoit quitte en fe purgeant par ferment,
avec deux de fes voifins, qu’il n’avoit aucune part à
la faute commife.
Quand la divifion dont on vient de parler fut faite,
& qu’on eût par-là un moyen fur de découvrir les
coupables, lé roi abolit les vidâmes ou vicedomini,
qui étoient comme les lieutenans des comtes, ôc il
établit à leurs places les grands shérifs des provinces,
qui ont toujours fubfifté depuis, d’abord en
qualité de députés ou de lieutenans du comté, ôc
dans la fuite , en qualité d’officiers de la couronne.
Il établit auffi dans chaque comté, outre le sh é r if,
des jugés particuliers , dont on ignore à préfent le
nom ôc les fondions ; Spelman croit que c’etoit comme
Palderman du ro i, ôc l’alderman du comté, lef-
quels, à ce que prétend M. Hearne, éfoient ceux
qui font nommés dans les lois faxonnes wites, ou
fages. G’étoient les premiers juges , ou préfidens
dans les shiregemot, ou cours de la province , où
l’on cônnoiffoit des caufes qui n’avoient pu être terminées
dans le cours des centaines. Ainfi la jurifdic-
tion des vidâmes fut partagée entre le juge ôc le shér
i f , le premier ayant dans fon reffort tout ce qui re-
gardbit là juftice , ÔC l’autre n’étant proprement que
miniftre.
Après avoir ainfi réglé ce qui reeardoit les officiers
qui dévoient adminiftrer la juftice, Alfred régla
la police. Ces réglemens produifirent un changement
fi furprenant dans le royaume, qu’au-lieu
qu’auparavant on n’ofoit aller d’un endroit à un autre
fans être armé , la fureté devint fi grande, que le
roi ayant fait attacher des bralfelets d’or fur un chemin
de traverfe, pour voirce qui arriveroit, perfonne
n’y toucha; les filles n’eurent rien à appréhender de
la violence ôc de la brutalité.
Ce monarque pour empêcher que le royaume ne Î>ût être troublé par les ennemis du dehors, dipofa
à milice d’une maniéré propre à réfiftët à toute in-
vafion, divifu cette milice en deux corps , ôc établit
des gouverneurs d’un rang diftingué dans chaque
province , où ils réfidoient conftamment dans le lieu
qui leur étoit affigné. Ces précautions jointes à une
nombreuïe flotte toujours prête à fe mettre en mer,
ou croifant fans celle autour de l’île , tinrent les fu-
iets dans le repos, ôc les Danois étrangers dans une
telle crainte , que pendant le refte de fon régné , ils
n’olèrent plus tenter aucune defcente.
Dès qu’Alfred eut ainfi pourvu à la fureté de l’état
, il nt goûter à fon peuple les fruits de la paix ôc
du commerce. On confiruifit par fon ordre un bon
nombre de vaiffeaux propres à tranfporter des mar-
chandifes , ÔC le roi voulut bien les prêter aux principaux
négocians, afin d’animer le commerce dans
le s pays éloignés. On a dans la bibliothèque cotto-
nienne la relation d’un voyage d’un danois ôc d’un
anglais, fait par les ordres d ’A lfred, pour découvrir
un palTage au nord-eft.
Ce prince confidérant en même tems la difette où
fon roya-ume étoit d’artifans dans les arts méchani-
cn é s ôc dans les métiers, il en attira un grand nombre
es nays étrangers , qu’il engagea à.s’établir en Angleterre
; enforte qu’on y v it aborder de toutes .parts
des gaulois, des francs, des bretons de l’Armorique
, des germains, des friions, des écoflois, des
. gallois , & d’autres,, qu’il encouragea de la maniéré
! du monde la plus généreufe par fes libéralités.
L’ignorance universelle où l’Angleterre étoit plongée
quand Alfred monta fur le trône , 'de voit fon origine
gux ravages des Danois. Ces barbares avoient
.' détruit les fciences en brillant les maifons, les mo-
’ Haltères, & les livres, ôc en s’emparant de tous les
lieux où il.y avoit des établiffemens pour la culture
des arts. Mais quoique la difette des gens de lettres
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en Angleterre obligeât le roi d’en chercher dans les
pays étrangers , ils ne laiflbient pas d’y être auffi fort
rares , du-moins en-deçà des Alpes; ce malheur ve-
noit de la même caufe, je veux dire des irruptions
fréquentes des peuples du nord dans les parties méridionales
de l’Europe, qui avoient produit par-tout
des effets prefqu’ également finiftres.
Cependant le roi trouva le moyen par fes foins,
fes recherches, ôc fes réeompenfes, de raffembleren
Angleterre piufieurs hommes diftingués dans tes lettres
, entre lefquels il y en eut dont là réputation fub*
fifte encore aujourd’hui. De ce nombre étoient Jean
Erigena ou S co t, irlandois , -qui entendoitle grec,
le chaldéen ôc l’arabe : Affer furnommé Menevenfis,
du monaftere de faint D avid , où il avoit été moine,
ôc qui écrivit l’hiftçire d’Alfred, que nous avons encore
: Jean le Moine , habile dans la d ialeâique, la
mufique ôc l’arithmétique, &c.
Il rappella auffi dans le royaume quelques hommes
de lettres originaires du pays , qui s’etoient retirés
en France ôc ailleurs pendant le cours des diver-
fes invafions des Danois. Le roi les employa les uns
ôc les autres à inftruire fes fujets, à diriger leurs
confciences, Ôc à polir leurs moeurs. Enfin, pour
prévenir que par les malheurs des tems les lumières
du clergé d’alors ne mouruffent avec ceux qui les
poffédoient, Alfred prit des précautions en faveur de
la poftérité. 11 fit traduirè piufieurs excellens livres
de piété , montra lui-même l’exemple , infiitua des
écoles , Ôc obligea tous les Anglois tant-foit peu ai-
fés , de faire apprendre à lire l’anglois à leurs en-
fans y avant que de les appliquer à aucune pro-
feffion.
Il fit p lus, il fut le fondateur de l’univerfité d’Ox-
fo rd , au rapport de Spelman. Cambden rapporte
qu’il y fonda trois colleges, l’un pour les humanités,
l’autre pour la philofophie, ÔC'le troifieme pour la
théologie. Il établit en même tems un fonds pour l’entretien
de 80 écoliers , auxquels il prefcrivit certains
ftatuts.
Il avoit mis un tel ordre dans les affaires politiques
ôc civiles, que toutes les réfolutions qu’il prenoit à
l’égard des affaires étrangères ôc du pays paffoient
par deux différens co nfeils. Le premier étoit le confeil
privé, où perfonne n’étoit admis qui ne fût bien avant
dans l’eftime ôc dans la faveur du roi. C’étoit-là
qu’on agitoit premièrement les affaires qui dévoient
être portées au fécond confeil, qui étoit le grand-
confeil du royaume, compofé d’évêques, de comtes
, dé vicomtes ou préfidens des provinces, des juges.,
ôc de quelques-uns des principaux thanes, qu’-
ou nomma dans la lui te barons. Ce grand-confeil du
royaume , ou confeiLgénéral de la nation , s’appel-
loit en faxon wittenagemot, ôc on le nomme à préfent
parlement, mot françois. On a difputé avec beaucoup
de chaleur fur la queftion, .fi le peuple avoit droit
d’envoyer des députés à cette affemblée ? Mais quoi
qu’il en fo it, on voit dans ces confeils l’origine du
confeil fecret, auffi-bien que l’antiquité du parlement.
La vie privée de ce monarque n’a pas été moins
remarquable que fa vie publique ; c’étoit un de ces
génies heureux qui femblent nés pour tout ce qu’ils
fo n t, ôc qui par le bon ordre qu’ils mettent dans
leurs affaires, travaillent continuellement, fans pa-
roître occupés. Il diftribua fon tems en trois parties,
donnant 8 heures aux affaires publiques , 8 heures au
fommeil, ôc 8 heures à l’étude, à la récréation & au
culte religieux. t
Comme l’ufage des montrés ôc des clepfydres n e-
toit pas encore connu en Angleterre, il mefuroitle
tems avec des bougies, qui avoient i l pouces de
long, & fur lefqueiles il y avoit des lignes tracées »
qui les partageoient en douze portions. I l y en avoit
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fix qu’on allUmôit les unes après les autres , ÔC qui
brûloient chacune quatre heures , trois pouces par
heure, enforte que les fix duroient précifément 14
heures. Les gardiens de fa chapelle en avoient le
foin Ôc étoient chargés de l’avertir combien il y
avoit d’heures d’écoulées. Pour empêcher que le
vent ne les fît brûler inégalement, on prétend qu’il
inventa l’expédient de les mettre dans des lanternes
de corne. " ^
Il compofa divers ouvrages en tout’ genre , dont
vous trouverez le catalogue dans Spelman. Afferius
affure qu’il n’étoit pas feulement grammairien, orateur,
hiftorien , archite&e ôc philofophe, mais qu’il
paffoit encore pour le meilleur poète faxon de fon
fiecle.
Au milieu de fon refpeft pour le fiege de R ome, il
confervoit une pleine indépendance dans l’exercice
de fon autorité royale. Auffi laiffa-t-il pendant trois
ans piufieurs évêchés vacans, fous la feule direftion
de l’archevêque de C antorbery, ôc le pape n’ofa pas
s’en plaindre.
U n’attaqua pas moins la puiffance des pontifes de
Rome, qui commençoient à dominer dans ces fiecles
de ténèbres , en rétabliffant le fécond commandement,
qu’ils avoient fait ôter du décalogue, fous
prétexte de fuivre les décifions du fécond concile de
Nicée. ?
Il n’eft parlé fous fon régné d’aucun envoi de légats.
Oh ne voit point que Rome ait eu aucune part
aux réglemens de l’églifo du royaume. Il tfeft point
queftion de bulles ou de privilèges pour les nouvelles
abbayes de Wincefter ôc d’Athelney qu’Alffed fonda.
Ce qu’il y a de remarquable encore, c’eft qu’il
accueillit, ôc qu’il entretint Jean S c o t, quoique ce
dotteur fut très-mal avec le pape, pour avoir écrit
quelque chofe de contraire aux fentimens du fiege de
Rome.
Enfin, Alfred avoit toutes les vertus les plus efti-
mables ; & les qualités les plus aimables. Son courage
qui fe déployoitau beioin, ôc à-proportion que
les circonftance le demandoient, cédoit tranquillement
à la pratique des autres vertus. Quoiqu’il eût
été élevé pour les armes, & prefque toujours occupé
des exercices tumultueux de la guerre , la dureté
ordinaire de ce genre de vie rie put altérer la
douceur de fon caraâere ; ni les plus fanglans outrages
des barbares ne purent fermer fon coeur à la pitié
; il ne fit fervir fes vi&oires qu’au bonheur de fes
ennemis, à leur offrir d’embraffer le chriftianifme, ou
d’abandonner le pays. Il employa fon économie ôc fes
revenus à lafubuftance des ouvriers, à des penfidns,
à des aumônes, ôc à des charités auX'églifes des pays
étrangers. Quand nous parlons de fes revenus, nous
entendons ceux de fon propre domaine ; c a r , comme
le remarque un hiftorien moderne, ce n’étoit
pas la coutume en ce tems-là de charger le peuple
d’impôts, pour fournir au luxe des fouverains.
Il mourut comblé de gloire , le z8 d’Oûobre de
l’an 900, dans la 5 1e année de fon âge , après avoir
régné 28 ans ôc 6 mois ; ôc c’e ft, je penfe, le fouve-
rain le plus accompli qui ait paru dans le monde. Il
eu piufieurs enfans. Edouard fon fils lui fuccéda.
Ethelvard, autre de fes fils, mourut en 922 , âgé de
4° ans. Elftede, fa fille aînée, époufa Ethelred, roi
de Mercie. A lfv ith e , autre fille de ce monarque,
epoufa un comte de Flandres. Ethelgithe, religieufe,
lut abbeffe du couvent de Schaftsbury, fondé par
Alfredfon pere. Il faut lire fa vie en latin par Afferius,
& la même, par Spelman, publiée en anglois à Oxford,
en 17 0 9 , avec les notes de Thomas Hearne.
Afferius a été réimprimé à Oxford, en 17 2 2 . (Le chevalier
DE J AV COURT 1)
WAQUE , f. f. ( Mefure. ) forte de mefure dont
on fe fert pour mefurer le charbon de terre dans les
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houilheres dü Hainault. La waque de charbon revient
à quinze fols , dont douze font pour le marchand,,
deux fols fix deniers pour le droit des états
de Morçs , ôc fix deniers pour de petits droits établis
fur les bateaux , pour la conftruétion ôc entretien
des éclufes. (D . J . )
V A R A D IN , LE p e t i t , ( Géog». mod. ) petite
ville de la haute Hongrie, aucomté de Zemplin fur
la T e iffe , au-deflùs de Tokay. (D . 7.)
Wa r a d in l e g r a n d , ( Geog. modi ) ville de la
haute Hongrie., capitale d’un comté de même nom,
fur la riviere de Keuvrès , ou Sebesrkerds, avec
une citadelle ôc un évêché fuffragant de Colocza. Les
Turcs la prirent en 16 9 1. Longitude ?n . G. latitude
4 6 . J / . ( D . J . )
W AR AGES , l e s , ( Hijl. de RuJJie.) c’eft le nom
collectif d’hommes célébrés, qui donnèrent desfou-
verains à laRuffie. M. B a y e r , dans une differtatiori
inferée dans les mémoires de Pétersbourg , foutient
que les Warages étoient des guerriers Suédois, Norvégiens
, ôc Danois , qui commencèrent par s’engager
au fervice des Ruffes , ôc qui exercèrent quelquefois
chez eux des charges civiles, & fur-tout des
emplois militaires. L’auteur prouve fon opinion par
les noms Warages qui fe trouvent dans les annales
de Ruffie, depuis Ru ric , un des trois freres Warages
, qui devinrent fouverains en Ruffie au neuvième
fiecle : ces noms font tous des noms danois, fué-
dois, ou norvégiens ; mais ce qu’il y a de plus curieux
dans le mémoire de M. B ayer , c’eft qu’il prétend
y prouver que les Baranges, ouWaranges, fi
célébrés dans l’hiftoire Byzantine , ne font autres
que les Warages. (JD. 7.)
W A R AN G E R , m e r de , ( Géogr. mod. ) nom
qu’on donne à un golfe fur la côte feptentrionale de
la Laponie danoife, dans le gouvernement de AVar-
dhùs , aux confins de la Laponie. On trouve War*-
dhus à la droite en entrant dans ce golfe, dont l’embouchure
qui eft fort large , eft formée par la pref-
qu’île de Diel-holm, ôc par l ’île des pêcheurs. On
voit quelques îles dans la mer de Waranger, & i l s’y
décharge trois rivières,Lavoir celle deNeudomarki ,
de Paetz, ôc de Petzinka. (D . 7.)
"NVARASDIN , (Géog. mod.') ville de l’Efclavonie
hongrôife, capitale d’un comté de mêmenomfurla
droite de la D ra v e , à dix lieues au fud-oueft de Canifca
, avec une fortereffe. Longitude 3 4 . 3 8. lad- ,i t
tude 4 6 .16 . (D . J . )
W A R B ERG , ou ^ÎV^ARBORG , ( Géogr. mod.')
petite ville d’Allemagne , en W eftphalie , dans l’évêché
de Paderborn, fur la riviere de Dymel. Elle
a été impériale, ôc appartient aujourd’hui à l’évêque
de Paderborn. (D . 7.)
Wa r b e r g , (Géog. mod.) petite ville de Suede,
dans la province deHalland, fur la côte de la Manche
de Danemarck, entre Elfsborg ôc Falkenberg.
Cette ville a un port & un château pour fa défenfa.
Long. J j . 2 o. latit. 63. 10 . ( D . 7. )
WARD E , ( Géog. mod.) ville du royaume de
Danemark, dans le Jutland ; au diocèfe de Rypen,
à fix lieues au nord de cette v ille , vers l’embouchure
d’une riviere qui lui donne fon nom , ôc qui fe
jette dans la mer par une longue ôc large embouchù-
r e , vis-à-vis l’île deFanoë. Longitude 2 6 .19 . latitud
e 55. 2.4. (D . J . )
W ARDHUS, (Géog. mod.) gouvernement d e là
Norvège ; il comprend la partie feptentrionale de ce
royaume, depuis le golfe Oftrafior, jufqu’aux confins
de la Laponie mofcovite ; c’eft proprement ce
qu’on appelle la Laponie danoife : fa côte eft prefque
toute couverte d’île s , grandes ôc petites, qui forment
une infinité de golfes. Quoique ce pays foit
fort étendu, il n’a qu’une bourgade de fon nom , ôc
il ne produit que quelques pâturages. (D . J . )