penfes en quelque façon. Ce qu’ils prouvent par des
paffages de ( i ) la G enèfe, de l’Exode & du Léviti-
que, où Dieu ordonne .des peines contre les bêtes.
Quelque hardie que foit cette penfée, elle ne tient
point au fond de l’héréfie focinienne. En raifonnant
co-nféquemment, les Unitaires dont nous ne fournies
que les hiftoriens, dévoient dire avec Salomon : « Les
» hommes meurent comme les bêtes, & leur iort eft
» égal ; comme l’homme meurt, les bêtes meurent
» auflï. Les.uns & les autres refpirent de même, &
» l’homme n’a rien <le plus que la bête, tout eft fou-
» mis à la vanité. Ils s’en vont tous au même lieu,
» & comme ils ont tous été formés de la terre, ils
» s’en retournent tous également en terre. Qui fait
» fi l'ame. des enfans d’Adam monte en-haut, & fi
» l’ame des bêtes defcend en-bas » ? Eccléjiafl. c. iij.
■ p. ic). & fu iv . Cet aveu devoit leur coûter d'autant
moins qu’ils foutiennent la mortalité des âmes, ou
leur dormir jufqu’au jour du jugement, & l’anéantif-
fement de celles des méçhans, &c.
Voila ce que j’ai trouvé de plus curieux & de plus
digne de l’attention des philoiophes , dans les écrits
des Unitaires. J ’ai tâché de donner à cet extrait analytique
toute la clarté dont les matières qui y font
traitées font fufceptibles ; & ' je n’ai pas craint de
mettre la doârine de ces feriaires à la portée de tous
mes le&eurs ; elle eft fi impie & fi infeâée d’hér éfie ,
qu’elle porte Jurement avec elle fon antidote & fa réfutation.
D ’ailleurs j’ai eu foin pour mieux terrafîer
l ’erreur, de renvoyer aux articles de ce Diriionnai-
re, où toutes les hétérodoxies des Unitaires doivent
avoir été fondement réfutées , & où les vérités de
la religion, & les dogmes de la véritable églife
ont pu être éclaircis & . mis par nos théologiens
dans un fi haut degré d’évidence & de^ertitude, qu’il
faudroitfe faire illufion pour n’en être pas frappé , &
pour n’en pas augurer l’entiere deftruftion de l’incrédulité.
Par le moyen de ces renvois , des efprits
foibles, ou quine s’étant pas appliqués à fonder les
profondeurs de la métaphyfique , pourroit-nt te laif-
ier éblouir par des argumens captieux , feront à l’abri
des féduûions, & auront une réglé iïire & infaillible
pour juger du vrai & du faux.
Je finirai cet article par une réflexion, dont la vé rité
fe fera fentir à tout lecleur intelligent.
La religion catholique , apoftolique & romaine
eft inconteftablement la feule bonne, la feule fûre,
& la feule vraie ; mais cette religion exige en même
tems de ceux qui i’embraflent, la foumiflion la plus
entière de la raifon. Lorfqu’il fe trouve dans cette
cpmmunion un homme d’un efpritinquiet,remuant,
&L difficile à contenter, il commence d’abord par
s’ établir juge de la vérité des dogmes qu’on lui pro-
pofe à croire , & ne trouvant point dans ces objets
de fa foi un degré d’évidence que leur nature, ne
comporte pas , il fe fait proteftant ; s’appercevant
bientôt de l’incohérence des principes qui caracté-
rifent le proteftantilme, il cherche dans le focinia-
nifme une folutionà fes doutes & à fes difficultés , &
il devient focinien : du focinianifme au déïfme il n’y
a qu’une nuance très-imperceptible, & un pas à faire
, il le fait : mais comme le déïfme n’eft lui-même ,
ainfi que nous l’avons déjà dit , qu’une religion in-
conféquente , il fe précipite infenfiblement dans le
pyrrh.onifme ,. état violent & auflï humiliant pour
l’amour propre, qu’incompatible avec la nature de
l ’efprit humain : enfin il finit par tomber dansl’athéïf-
me, état vraiment cruel, & qui aflùre à l’homme (i)
(i) Foyq;la Genèfe ch. ix. v- 5. Exod. xij . v- 2.8- Levitique
xx. v. 15.16-& notez ces paroles de Franzius. Quari auum
pojjèt an non poncndafit raiïonalis anima in brutis. . .. eu ni, Ge-
nef.Çv5.: Deits ipfi velit vindicare fanguincm hominis in brutis
■ Jîquando effiiderunt fanguincm humanum , Lift, animal, lacra ,
part. L.cap* ij. p. 16,
une malheureufe tranquillité à laquelle on ne peut
guere elpérer de le voir renoncer.
^ A u relie quoique le but de l’Encyclopédie ne foit
pas de donner l’hiftoire des hérétiques * mais celle de
leurs opinions , nous rapporterons cependant que[.
ques. anecdotes hiftoriques fur ce qui concerne la
pérfonne &c les avantures des principaux chefs des
Unitaires. Cçs ieétaires ont fai{<rop de bruit dans le
monde, & s’y font rendus trop célébrés par la har.
diefi’e de leurs fentimens, pour ne pas faire en leur
faveur une exception.
Lélie Socin naquit à Sienne en 15 15 , & s’étant
laiflé infeéler du poifon des nouvelles erreurs que
Luther &. Calvin répandoient alors comme à l’envi
il quitta fa patrie en 15 4 7 , voyagea pendant-quatre
ans tant en France & en Angleterre que dans les
Pays-bas ôç en Pologne ; s’étant enfin fixé à Zurich
il commença à y répandre les fémences de l’héréfie
arienne & photinienne,, qu’ il vouloit • introduire •
& mourut en cette ville à l’âge de 3 7 ans, l ’an 1562
laiflant fes écrits à Fau(ie Socin fon neveu.
Celui-ci né à Sienne en 15 3 9 , & déjà féduit par
les lettres de fon Oncle, fortit de l’Italie pour éviter
les pourfuites de l’Inquifition, & fe hâta de fe
mettre en poflèflion des. écrits de Lélius* qu’il négligea
pourtant après les avoir recueillis ; étant reparlé
en Italie, où il demeura douze ans à la cour du
duc de Florence , mais Payant quitté tout-à-coup,
il fe retira à Bâle où il s’appliqua à l’étude , revit les
ouvrages de fon oncle, & y compofa en 1578 , fou
livre de Jefu Chrijlofervatore , qui ne fut pourtant imprimé
qu’en 1595 . De Suifle il fut appelle par George
Blaudrata , autre anti-trihitaire, enTranfilvanie,
où il eut des difputes fort vives avec François David
, héréfiarque encore plus décidé que Socin &■
Blaudrata , contre la divinité de Jefus-Chrift. De-là
il pafla en Pologne, où les nouveaux ariens étoient
en grand nombre, &fouhaita d’entrer dans la communion
des Unitaires ; mais comme il différoit d’eux
fur quelques points , & qu’il ne vouloit pas garder:
lefilence, on le rejetta afîez dufement: il ne laifl’a
pas d’écrire en leur faveur contre ceux qui les atta-
quoient, & vit enfin fes fentimens approuvés par-
plufieurs miniftres ; mais il éprouva de la part des
catholiques des perfécutions fort cruelles pour s’en
délivrer il fe retira à un petit village éloigné d’envi-;
ron neuf milles de Cracovie. Ce fut là que fuivi d’un
afîez petit nombre de difciples, & protégé par quelques
grands feigneurs, il employa vingt-cinq ans à
compofer un grand nombre de petits traités, d’opui-
cules, de remarques ,. de relations de fes différentes
difputes, &c. imprimés en différens tems , foit de.
fon vivant, foit après fa mort , & qu’on trouve recueillis
en deux tomes in-fol. à la tête de la bibho--
theque des freres Polonois.
Ce patriarche des Unitaires mourut en 1604. « Sa
» fe â e , comme le dit très-bien B a y le , bien-loin.
» de mourir avec lui -, fe multiplia dans la fuite 1con-
» fidérablement ; mais depuis.qu’elle fut chaffée de
» Pologne, l’an 16 5 8 , elle eft fort déchue & fort
» diminuée quant à fon état vifible : car d’ailleurs,
» il n’y a guere de gens qui ne foient perfuadés qu’-
» elle s’eft multipliée invifiblement, & qu’elle de-
» vient plus nombreufe de jour en joijr : &, l’on croit
» qu’en l’état où font les chofes, l’Europe s’étonne-
» roit de fe trouver focinienne dans peu de, tems, h
» de puiflans princes embraffoient publiquement
» cette héréfie, ou fi feulement ils donnoient ordre
»„ que la profeflion en fut déchargée de tous les de-
» favantages temporels qui l’accompagnent ». Voyt{
notre introduttion à la tête de cet article.
Ce qu’il y a de lûr c’ eft que les Unitaires, étoient
autrefois fort répandus en Pologne ; mais en ayant
été chaffés par unarrêt public de la diete.générale
du
royaume» ils fe réfugièrent en Pruffe, & dans la
marche de Brandebourg , quelques-uns pafferent en
Angleterre , & d’autres en Hollande , où ils font
tolérés, & où l’on débite publiquement leurs livres,
quoi qu’en dife Bayle. ........................
Outre les deux Socins, leurs principaux écrivains
font Crellius, Smalcius, V olkélius, Schlitingius, le
chevalier Lubinietzki, &c. On foupçonne auflï avec
beaucoup de raifon, Epifcopius, Limborg, deCour-
celles, Grotius, Jean le C le rc , L o ck e , Clarke &
plufieùrs autres modernes , d’avoir adopté leurs
principes fur la divinité du Verbe , l’incarnation,
la fatisfa&ion de Jefus-Chrift, &c. & fur quelques autres
points de théologie & de philofophie. Voye^ la
bibliothèque des anti-trinitaires ; Crellius , de uno
J)to pâtre y deDeo & attributis , & c . Volkélius , de
yerâ religione ; Micrælii, hiß. ecclef. NataliS Alexander
, hiß. eccléf. adfec. x v j. Hoornbeeck, in apparatu
adcontrovcrf.Joçinianas ; le cathéchifme de R acov ie ,
& les ouvrages des Unitaires modemes ", d’où cet article.
a été tiré en partie. Article deM. Na ig e o n .
U N IT É , f. f. ( Math. ) ê’eft ce qui exprime une
feule chofe ou une partie individuelle d’une quantité
quelconque. Quand on dit individuelle, ce n’eft pas
que l'mite foit indivifible, mais c’eft qu’on la confi-
dere comme n’ étant pas divifée, & comme faifant
partie d’un tout divifible. Voye^ Nom b re.
Quand un nombre a quatre ou cinq chiffres, celui
qui eft le plus à la droite, c*eft-à-dire le premier en
allant de droite à gauche, exprime ou occupe la place
des unités. Voye{ Numération. Et félon Eucli-
de, on ne doit pas mettre au rang des nombres l 'u-
niti ; il dit que le nombre eß une collection £ unités ;
mais c’eft-là une queftion de mots.
Unité en Théologie, eft un des caraéteres diftinc-
tifs de la véritable Eglife de Jefus-Chrift.
Par unité, les Théologiens catholiques entendent
le lieu qui unit les fideles par la profeflion d’une même
doftrine, par la participation aux mêmes Sacrè-
mens, & par la foumiflion au même chef vifible. La
multitude des églifes particulières qui font répandues
dans les differentes parties du monde ne préjudicie
en rien à cette unité ; toutes ces églifes reunies en-
fîmble ne formant qu’un feul & même tout m oral,
qu’un feul & même corps ; en un mot, qu’une feule
& même fociété, qui profefle la même fo i , qui participe
aux mêmes facremens, qui obéit aux mêmes
pafteurs & au même chef. Or cette unité, félon les
catholiques, eft reftrainte à une feule fociété, de laquelle
font exclus les hérétiques qui profeffent une
101 différente , les excommuniés qui ne participent
plus aux facremens, les fehifmatiques qui refufent de
fe foumettre à l’autorité des pafteurs légitimes. Or,
cette fociété c’ efl: l’Eglife romaine, comme l’ont prouve
nos controverfiftes dont on peut confulter les
écrits.
Les proteftans conviennent que l’ églife doit être
Une , mais ils prétendent que cette unité peut fubfif-
*er, fans que fes membres foient réunis fous un chef
vifible, & qu’il fuffit que tous les chrétiens foient
unis par les liens d’une charité mutuelle, & qu’ils
loient d’accord fur les points fondamentaux de la
religion. On fait que cette derniere condition eft
de 1 invention du miniftre Jurieu , & qu’elle jette
es proteftans dans llmpoflïbilité de décider , de
combien ou de quelles fe â e s l’Eglife pourra être
compofée, parce que chacun voulant ou prétendant
^terminer ^ ^on quels font ces points fondamen-
,‘?ux » les uns ouvrent la porte à toutes les feâes, tan-
que d’autres la leur ferment. D’ailleurs, ces ca-
- .e.res d’unité qu’aflignent les proteftans font, ou
neurs & invifibles, ou équivoques. Et pour difi
^erner l’unité de l’Eg life , il faut des caraôeres vifi-
' es > extérieurs, & de nature à frapper vivement
Tome X V I I%
les plus fimples, & à leur montrer quelle eft la fo-i
tiété à laquelle ils doivent s’attacher.
U n it é , {Belles Lettres.') dans un ouvrage d’éloquence
ou de poéfie. Qualité qui fait qu’un ouvrage
eft partout égal ôc foutenu. Horace, dans fon art poétique
, veut que l’ouvrage foit un :
Denique f it quod vis fimpleoc duntaxat & unum,
EtDefpréaux a rendu ce précepte par celui-ci :
I l faut que chaque chofe y foit mife en fon lieu
Que le début y lu fin réponden t au milieu.
Art poçt. ch. J .
Il n’ y a point d’ouvrage d’efprit, de quelqu’éten-*
due qu’on le fuppofe, qui ne foit fujet à cette réglé.
L’auteur d’une ode n’eu pas moins obligé de fe lou-
tenir, que celui d’une tragédie ou d’un poème épi-,
que , & fouvent même on exeufe moins aifément ce
défaut dans un petit ouvrage que dans un grand. Cet-!-
te unité confifte à diftribuer un ordre général dans la
matière qu’on traite, & à établir un point fixe auquel
tout puifle fe rapporter. C’eft l’art d’ affortir les di-.
verfes parties d’un ouvrage, de ne choifir que le né-*
ceflaire, de rejetter le fuperflu, de favoir à propos
facrifier quelques beautés pour en placer d’autres qui
feront plus en jo u r , d’éçiaircir les vérités les unes
par les autres, & de s’avancer infenfiblement de de*
grés en degrés vers le but qu’on fe propofe. Enfin ,
I*unité eft dans les arts d’imitation, ce que font l’ordre
& la méthode dans les hautes feiences; telles
que la Philofophie, les Mathématiques, &c. La feien*
c e , l’érudition, les penfées les plus nobles, l ’élocution
la plus fleurie, font des matériaux propres à produire
de grands effets ; cependant fi la raifon n’ en
réglé l’ordre & la diftribution, fi elle ne marque à
chacune de ces chofes le rang qu'elle doit tenir, fi
elle ne les enchaîne avec jufteffe , il ne réfulte de
leur amas qu’un cahos, dont chaque partie prife en.
foi peut être excellente* quoique l’aflbrtiment en foit
monftrueux. Cette unité néceflaire dans les ouvra-*
ges d’efprit, loin d’être incompatible avec la variée
t é , fert au contraire à la produire par le choix, la
diftribution fenfée des ornemens. Tout le commen*»
cernent de l’art poétique d’Horace eft confacré à prefi
crire cette unité, que les modernes ont encore mieux
connue & mieux obfervée que les anciens.
Unité, dans la poéfie dramatique, eft une réglé
qu’ont établie les critiques, par laquelle on doit ob-
flerver dans tout drame une unité d’a â io n , une unité
de tems, & une unité de lieu ; c’ eft ce que M. D é fi
préaux a exprimé par ces deux vers :
Qu’en un lieu, qu’en un jo u r , un feul fa it accompli
Tienne jufqu’à la fin le théâtre rempli.
Art poët. ch. iifi
C ’eft ce qu’on appelle la réglé des trois unités y fur
lefquelles Corneille a fait un excellent difeours, dont
nous emprunterons en partie ce que nous en allons
dire pour en donner au leâeur une idée fuflifante.
Ces trois unités font communes à la tragédie & à
la comédie; mais dans le poème épique, la grande
& prefque la feule unité eft celle d’aaion. A là vérité
, on doit y avoir quelqu’égard à l’unité des tems,
mais il n’y eft pas queftion de M unité de lieu. U unité
de cara&ere n’eft pas du nombre des unités dont
nous parlons ici. Voye[ C aractère.
î ° . Uunité d’aftion confifte, à ce que la tragédie
ne roule que fur une aâion principale & fimple , autant
qu’ il fe peut : nous ajoutons cette exception ;
car il n’eft pas toujours d’une néceffité abfolue que
cela foit ainfi, & pour mieux entendre c e c i, il eft à
propos de diftinguer avec les anciens deux fortes de
fujets propres à la tragédie; favoir le fujet fimple,
& le fujet mixte ou çompofé ; le premier eft celui,