petits morceaux, ou même se dissout entièrement dans l’eau, d’où vient
que tous ces lieux sont profondément sillonnés par les pluies, qui, les
ruinant de plus en plus, les ont ravinés et creusés d’une multitude de
valloncules bleuâtres, qu’on me passe cette expression, à laquelle je ne
saurais trouver d’équivalent pour donner une idée des lieux. Le schiste
et le grès sont traversés en divers sens et souvent en grande quantité
par de petits liions de chaux carbonatée grise ou blanchâtre. La multitude
des petits torrens variables et des monticules de cent mètres tout
au plus, qui se voient dans cette partie du pays, donnent aù canton
un aspect alpin, où se reconnaissent en petit des pics, des cols, des
plateaux, des contreforts, des arêtes, des escarpemens, des pentes adoucies;
en un mot, tous les accidens de forme qui se rencontrent dans les
plus hautes montagnes. Tous ces torrens en miniature finissent, en se
réunissant, par former un cours d’eau, dont le thalweg se dirige
d’abord du sud au nord, l’espace d’une demi-lieue environ, puis qui
tourne brusquement au sud-ouest en entrant dans la plaine, à travers-
des maisons ruinées, dés moulins et autres établissemens qui dépendirent
du village de Métaxidi. Sous le nom de Silozo, ce torrent se jette
bientôt dans la partie occidentale de la baie, à l’entrée du faubourg de
Modon, où il traverse près de son embouchure ce ponfcde deux arches,
dont nous avons dit plus haut (p. 74) que ses fondations étaient antiques,
M.Blouet, qui paraît penser de même, en a donné une figure1,
qu’on pourrait bien aujourd’hui ne plus reconnaître sur les lieux, parce
que des maisons en planches y ont été bâties et encombrent les environs,
mais qui n’en est pas moins aussi exacte qu’élégante. La section d’architecture
a également représenté un pont du même genre qui ekiste à Métaxidi9;
mais je doute que ce dernier soit de la même époque, malgré la
nature de ses fondemens d’apparence hellénique. Le cours du torrent a
dû Varier trop de fois et même trop récemment pour que les ponts qu’on
y aurait jetés, il y a seulement dix siècfes, pussent servir encore à le
traverser, surtout à sa partie supérieure, où les ponts doivent nécesi
. Section d’architecture, pl. i 4> fig.
a . id em , p l . 8 , fig . 3. ,
sairement changer de place comme le Silozo lui-méme, et selon la direction
que prennent ses eaux. Les raines de l’église et de tout le village
de Métaxidi n’indiquent d’ailleurs rien qui remonte au-dessus des temps
de la domination vénitienne.
Dans la carte d’Arowsmith et dans celle de M. Barbié du Bocage
l’embouchure du Silozo est exactement à sa place, mais son cours est
très-mal figuré, et sa longueur cinq ou six fois plus considérable qu’elle
n’est réellement. On le fait descendre tout droit de montagnes anonymes,
qui semblent répondre a ce Lycodima que nous traverserons bientôt,
en lui faisant arroser du nord-est au sud-ouest un grand vallon qui
n$xiste point. Cette erreur est copiée des anciennes cartes vénitiennes,
oh le torrent est regardé, je ne sais sur quel fondement, comme le
Balyra de l’antiquité. Ces cartes grossières ont donné lieu à une erreur
non moins grave, où pourtant M. Barbié du Bocage n’a pas donné;
elles placent l'embouchure de leur Silozo, olim Balyra, à l’ouest
de Modon, entre cette ville et Navarin. Il en est résulté que sur d’autres
cartes modernes, où ce cours d’eau fut au contraire transporté
beaucoup trop au levant et très-loin de sa, véritable place, on a supposé
qu’il avait dû exister une ville à chaque bord, et, en reportant
Modon sur le côté que celle-ci occupe réellement, on a supposé que
l’antique Méthone fut de l’autre, c’est-à-dire, au fond de la baie et
vers l’est, où l’on a même prétendu retrouver les ruines d’une antique
cité. Bien ne justifie cette manière de voir, qu’on trouve cependant
consignée sur la meilleure des cartes de Morée. L’auteur de cette carte
remarquable fut évidemment induit en erreur par G«U, qui suppose
« à deux riiille sept cents pas sur la gauche de Modon un paleocastro,
« ou vieux château ”, dont on ne saurait pourtant retrouver le moindre
vestige. Le lendemain de son arrivée, Boblaye, qui visita le bas des
falaises en cet endroit, n’y trouva que des fragmens de vieille poterie,
parmi lesquels j’ai recueilli plus tard quelques morceaux de verre- antique
; il y déterra aussi la première des médailles que la Commission
ait découverte en Grèce, et l’oifrit aussitôt comme d’un heureux présage
à M. Dubois, directeur de la section d’archéologie. Ce savant y déchiffra
l’empereur Commode, vainqueur aux jeux isthmiques. S’il n’exista