« igeurs ont pu le voir sur la fin de ses jours paisibles jouir du respect
« universel.
«Panayot-bey Komodoraki de Rambos, le remplaça en 1805 : c’était
« le père de ma femme, de celle de Mourdzinos et d’Atanasouli, qui
« occupe aujourd’hui le pyrgo de Zarnate, oîi nous l’irons visiter
« demain : enlevé avec ce fils à peine adolescent, par les troupes du fameux
« pacha de Janina, sur quelqu’une de ses possessions où il avait porté
« les armes, son vainqueur l’envoya au sultan son maître, qui le fit
« enfermer dans un cachot, où nous présumons qu’il a fini cruellement:
« Ali réserva mon jeune beau-frère, dont la beauté l’interessa, comme
.« otage avec plusieurs autres enfans grecs : c’est là qu’Atanasouli a
« pris les grands airs qui vous frapperont en lui, et qui lui ont fait
« tant d’ennemis dans le pays depuis qu’il y est revenu avec Tagré-
A ment du tyran de l’Épire, qu’il ne saurait se hasarder à sortir de
« son château sans être environné d’une grosse escorte. Anton-bey,
« Grégoraki d’Agéranos, près de Passava au Magne oriental, succéda
« à mon beau-père en 1808. II n’occupait point encore depuis un
« an sa haute dignité, que déjà le Divan avait décidé de le faire
« enlever; il le sut, se mit en mesure de se défendre dans ses domaines,
n où Ton nosa point le venir attaquer, et fut de son vivant remplacé
« par Constantin Zervacôs de Malévri. Celui-ci fut surpris Tannée sui-
« vante, conduit à Constantinople et ignominieusement pendu, souspré-
« texte de piraterie. Théodore-bey, de la famille Glygoraki, régna
« à sa place en 1810; il était natif de Mavrovouni, et ses biens sont
« passés au Dzanataki actuel, à qui tout bonheur vient, parce qu’il est
« un homme sage et prudent. Quand ce pauvre Théodore-bey s’est
« laissé, malgré tant de sinistres précédens, attirer à Constantinople y
* où il est mort dans les prisons, la famille Mavromichalis a pu
« enfin parvenir au but vers lequel on la voyait tendre depuis un
« quart de siècle : son chef, sous le nom de Pétro-bey, a été élevé à la
« première dignité de Sparte, en 1811, et ne s’en regarde point comme
« dépossédé par la révolution même; il y prétend toujours, et n’attend
« qu’une occasion pour le manifester hautement. Ü Nous devons au capitaine
Yaudrimey le portrait, très-ressemblant (voyez PI ), de ce
dernier souverain électif des Maniotes, que son frère George qualifiait
encore devant nous à Kitriès de fixaihevs, et chez lequel nous ne poussâmes
point notre reconnaissance; les premiers pas que nous avions faits
dans Sparte nous ayant, pour ainsi dire, jeté dans l’alliance de ses principaux
ennemis.
Le repas que nous acceptâmes chez le capitaine de Malta, en nous
faisant connaître les usages de table des Maniotes, nous apprit que le
brouet noir n’y était plus d’usage, et que la profusion des mets s’y trouvait
en contravention avec la frugalité qu’observait l’antique Lacédémone :
le luxe y consiste aujourd’hui à servir jusqu’à vingt ou trente plats l’un
après l’autre, dont un mouton, arrangé de diverses manières, fournit
environ la moitié; le reste se compose de gibier, de volaille, de poissons
et de riz, le tout assez fortement pimenté. La table, autour de laquelle on
s’accroupit sur des coussins, est ronde: je m’y fis enfin une idée exacte
de la manière dont les anciens se tenaient dans leurs festins; ils n’y étaient
certainement pas couchés sur des lits, comme on se l’est imaginé, et
comme on Ta répété dans tant de livres et depuis tant de siècles. Des
érudits se sont creusé l’esprit pour concevoir Ife manière dont on pouvait
manger commodément et bien digérer en se tenant dans une situation
horizontale, calculant l’espace qu’il fallait aux convives d’Aspasie, de Lu-
cullus, ou d’Antoine et de Cléopatre dans leurs soupers fins; si de tels
savans eussent seulement dîné chez Mavrico-Poulo, chez Mourdzinos,
chez Yatrakos ou dans un pyrgo quelconque du Magne, ils n’eussent plus
été embarrassés pour placer leur monde à la table de ces illustres personnages.
Dans Rome et dans Athènes alors, comme dans tout l’Orient
aujourd’hui, on s’accroupissait tout simplement à la façon des garçons
tailleurs sur des coussins ou sur des tapis, sans s’étendre sur des lits pareils
à ceux où nous dormons et comme les peintres ont coutume d’en représenter
ordinairement dans la sainte cène ou autres banquets des dieux. Les
vêtemens larges des peuples de race orientale (gens togata) motivaient
cette manière de se tenir pour manger; tandis que les escabeaux, les bancs
et plus tard les chaises, furent des exhaussemens nécessités chez les
Occidentaux (gens bracata), où des bragues, qui sont devenues successivement
des grègues, des culottes et des pantalons, gênèrent de tout
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