grecs est représenté dans une multitudé de voyages en Orient. Il est
pompeux et théâtral dansles métropoles riches. L’ignorance de tous ces
prêtres est, pour ainsi dire, devenue lieu commun dans les moindres
relations; mais S’ils sont mal-propres et peu instruits, même excessivement
superstitieux habituellement, ils ne sont point intolérans et fanatiques
: c’est une justice qu’on leur doit. « Assossies au peuple par les liens
„ de la morale, de famille et des malheurs, dit M. de Pouqueville, dont
« nous saisissons une occasion pour citer quelques bonnes lignes, les
« papas appellent leurs compatriotes aux autels en leur inspirant une
¿ affection véritable pour le culte chrétien. La religion entre les mains
« de ces hoTnmes simples, au lieu d’être un instrument politique, est pour
« les infortunés une consolation qui se joint a leurs intérêts les plus
« chers; aussi, loin de prêcher de sinistres maximés, les papas ne font
» entendre que des paroles de paix et d’amour; ils convient les enfans
V et la jeunesse aux fêtes religieuses par le double charme des canti-
« quès de grâce et de plaisir qui accompagnent chaque solennité. Ils
« ne rougissent, pas ces ministres d’un Dieu de démence, d’entonnerl’epi-
« thalame ; ils boivent avec l’homme des champs à l’oubli des maux com-
« muns ; ils font couler le vin des "sacrifices au banquet de l’amitié, per-
i suadés que celai qui travaille doit aussi se réjouir, et que le méchant
« seul passe sa vie dans la tristesse; enfin, leurs fonctions, comme aux
g temps-antiques où le sacerdoce ne formait jamais un corps particulier,
«se bornent à présenter à l’Éternel les voeux des peuples.... Aux j ours
« de fête l’office divin est annoncé par des décharges de mousqueterie,
« et quelquefois on se rend à l’église des minuit; la liturgie est entendue
« avec recueillement; on verse comme consolation quelques rasades
« d’eau bénite aux fidèles préparés pour la communion, et les festins
« Commencent même dans le temple où l’on se met en appétit, en man-
« géant des crêpes et en buvant des verres de raki... Les caloyers, qui
« dans cette circonstance donnent l’exemple, rivalisent avec les plus
« intrépides buveurs, en portant aux saints des santés qui sont toujours
* précédées de la formule : Seigneur pardortnez-nous; l’hégoumène boit
. « 'a S. Dimitri; le moine à S. George, vainqueur du diable, etc,1, ” et
i . Voy. de la Grèce, t. VI, chap. 5, p. 197 et x63. ' •
tout ceci ne se pratique pas seulement au Péloponnèse ou chez les autres
chrétiens de la Turquie d’Europe, je me souviens avoir lu dans Chardin,
que le patriarche d’une province de l’Asie, oii il voyageait, avait coutume
de diré: «Celui qui ne s’enivre pas aux grandes fêtés, notamment
« à Pâques et à Noël, ne saurait passer pour orthodoxe et doit être
« excommunié. §
Si les fonctions du sacerdoce sont demeurées, chez les Grecs convertis
à la loi de Christ, ce qu’elles furent chez leurs aïeux plongés dans
les erreurs du polythéisme, la religion même n’a guère fait que se
modifier pour eux. On a déjà vu que le culte des trois personnes, dont
se compose un dieu unique, et des saints qui forment leur cour céleste,
n’est, à peu de chose près, que celui des divinités de l’Olympe sous
d’autres noms et autrement vêtues, et que partout ou fut un temple
ou quelque hiéron antique, se retrouve une église ou quelque chapelle
moderne. Il en est de même des superstitions et de la presque-totalité des
croyances populaires. Chez les habitans primitifs, dont la mythologie
n’est que l’histoire poétiquement altérée^ les Dryades et les Hamadryades
habitaient les sombres forêts, et en protégeaient les vieux arbres; les
Néréides régnaient dans les fraîches fontaines dont le cristal servait de
miroir aux Nymphes des champs ainsi qu’aux bergers, entre lesquels
un certain Narcisse devint amoureux de lui-même. Ces immortelles d’un
ordre subalterne, toujours douées d’un pouvoir surnaturel, existent de
même pour les Moréotes d’aujourd’hui. Nous choisirons, afin de faire connaître
les idées qu’on s’en forme encore, une des mille histoires qui nous
en ont été contées, et nous laisserons parler le bon homme André, cuisinier
de la commission, vieux Messénien, qui, ayant beaucoup voyagé
d’une extrémité de la Grèce à l’autre et même jusqu’en Barbarie , avait la
mémoire ornée de traditions et d’anecdotes locales;; il était surtout fort
instruit touchant ce qui concerne les Néréides qu’il appelait Anarardes, et
il jurait par la panagie et la sainte croix en avoir vu de ses propres yeux.
« Elles habitent, nous disait-il, dans le plus profond des mers, des
<<r sources et des fontaines abondantes ; on les y voit plonger et disparaître
« lorsqu’on s’en approche tout à coup : alors leurs beaux cheveux flottent
« autour d’elles comme des nuages, la mobilité des eaux les faisant