Apollon, et qui s’étendit dans les temps reculés sur une bonne partie du
bassin du Pamisus, notamment entre Phares et Thuria. Les villages en
ruines de Leika, de Kalami, de Ratzikovo, d’Aizaga et de Kourtchaonchi,
nous restèrent successivement sur la droite ; ce dernier avait compte près
de 450 familles. Les collines qu’ils couronnaient, composées de transports
d’alluvions, appuyées à des monts calcaires, rocailleux et arides,
présentaient des érosions du plus étrange aspect; au fond du ravin de
Fourdjala, où nous campâmes, une de ces buttes ressemblait à un tombeau
monumental taillé de main d’homme. Fourdjala ou Phroutzala comptait
autrefois plus de six cents habitans, il n’y en restait pas cent cinquante;
mais ce lieu où se tinrent, nous dit-on, des espèces de foires, ne pouvait
manquer de redevenir florissant, et des maisons s y relevaient sur
les deux rives de son torrent qui traverse un bois d’Oliviers. A partir de
ce lieu, on marche entre de riches plantations de Mûriers, environnées
de haies et de vignobles très-bien tenus; on laisse encore plusieurs villages
à droite, où les collines s’élèvent et s’accidentent de plus en plus,
et l’on trouve bientôt deux églises ruinées, dédiées a S. Nicolas et à
S. George : celle-ci, qui est bâtie avec des matériaux antiques, s’élève à
droite près d’un ravin marécageux; elle doit occuper la place de ce temple
de Diane Limnatide, où commencèrent, par la mort dun roi de Lace-
démone, les guerres des Spartiates et des Messéniens, si l’on n’aime
mieux la rechercher dans le marais qui est en avant d’Armyros. Un
vieux Câprier, qui sortait d’un trou de la muraille au-dessus de la porte,
pourra faire reconnaître aux voyageurs qui suivront nos pas, 1 édifice
abandonné que la vignette du présent chapitre représente, et peu après
lequel nous quittâmes la route pour reconnaître sur la gauche, au milieu
de nombreux Figuiers et des Oliviers, les ruines considérables de bains
romains, qui, dans le pays, conservent le nom de Loutro. On ne sait ni
à quelle époque ces bains furent bâtis, ni quand ils ont été détruits; ce
qui en reste, consiste en salles voûtées, où l’on reconnaît l’embouchure
de plusieurs des canaux par où venait l’eau. Baccuet en dessina les arcades
de briques (voyez pl. XXIV). D’autres ruines en étaient rapprochées,
et pouvaient bien être celles des réservoirs : un paysan, que nous
aperçûmes sur un Mûrier voisin, nous dit « que, si nous voulions voir
« des ruines encore plus considérables, il pourrait nous y conduire;”
ayant accepté sa proposition, nous montâmes au village de Veissaga,
laissant à droite celui de Pharnusi, et par un étroit sentier, pratiqué
dans un escarpement calcaire, nous arrivâmes sur un plateau couvert
de décombres, et qui fut l’emplacement de l’antique Thuria. Cette ville
descendit plus tard dans la plaine, et le Loutro, que nous venions
de visiter, fut sans doute un des monumens de la Thuria inférieure
et nouvelle; selon Pausanias1, la supérieure répondait a l’Anthéa dont
il est parlé dans Homère : elle fut détachée de la Messénie par l’em-
pereur Auguste, pour être donnée aux Spartiates. Il y restait quelques
pans de murs d’un temple de la déesse de Syrie, avec des remparts
parfaitement reconnaissables. Ceux-ci, flanqués de grosses tours carrées,
paraissent avoir été rasés, et ce qui en subsiste, peu élevé au-dessus
du sol, est composé de pierres en tout semblables, pour la taille, les
dimensions et l’assemblage, à celles de l’enceinte de Messène; les moins
maltraités par le temps la couvrent à l’Est, du Sud au Nord, le long
de la crête du ravin qui vient du mont Malévo, et qui passe à Poliani.
On y voit beaucoup plus de restes des vieux âges que n’en cite Pausanias;
divers soubassemens de temples ou autres édifices s’y reconnaissent
fort bien : on y trouve l’une des plus grandes citernes de toute
la péninsule, et à laquelle celle d’Hyéro d’Epidaure peut seule être comparée;
cette citerne avait plus de vingt-cinq pas de long sur dix-huit
au moins de large, et dans la multitude de décombres qui la remplissaient,
il se trouvait des quartiers de diverses sortes de Marbres. Je vis çà
et là quelques tambours de colonnes, sans un seul chapiteau, et vers le
Nord dut être une porte de ville, dont les soubassemens sont parfaitement
en place; l’enceinte fut assez étendue, et lorsque nous en sortîmes pour
traverser ce qu’on nous dit s’appeler Paléocastron, où était une fontaine,
on nous indiqua sur la gauche du village, à peu de distance, dans un
enfoncement, à l’origine d’un vallon ombragé, une chapelle de S.e Marie,
très-digne d’attention; voisin d’une source fraîche et dans un site des plus
pittoresque, ce monument s’élève au milieu des murs d’un temple antique,
peut-être celui de la déesse de Syrie qu’on adorait à Thuria, et sa partie
i . Lib. IV, cap. 3i .
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