souvent très-gros d’un Grès bleuâtre ou gris, tombés des coucbes supérieures,
qui se superposent en se pressant, et à travers desquelles sont des
veines d’un Jaspe rouge, souvent fort vif en couleur; mais au-dessous, à
partir du village que nous laissions en arrière, saillit un Calcaire presque
partout d’une remarquable blancheur, notamment près de la chapelle du
Limax. Quelques espaces d’un terrain uni ou moins inclinés et cultivés,
environnés ou soutenus de murs en pierres sèches, se voient d’abord çà et
là; après trois quarts d’heure de marche, on arrive dans une région boisée
ou l’Yeuse (n.° 1 275) persistait, mais ou les Lauriers, les Gaîniers et les
Caroubiers ne s’élèvent point. Des Roures (n.° 1277) ou Chênes, pareils
à ceux de nos environs, étaient l’essence dominante de la forêt, mais à
peine s’en trouvait-il dont les feuilles commençassent à poindre; on eût
dit des arbres morts entre les Poiriers (n.° 652), les énormes Aubépines
chargés de fleurs éblouissantes et parmi cette première verdure printanière
des hauts lieux dont l’éclat est si tendre; doublant alors l’angle septentrional
du Cotylus, nous reconnûmes que cette montagne est une sorte
d’arête également rapide sur ses deux flancs. Nous nous désaltérâmes dans
une jolie fontaine dont le pourtour était rempli de Cresson (n.° 866), et
que nous crûmes d’abord être celle que mentionne Pausanias au voisinage
du temple dont nous approchions, comme étant celle dont plusieurs
avaient cru que naissait le Limax; mais à quelque distance, ayant passé
vers son origine un torrent qui pourrait bien être la rivière naissante, et
qui distingue la montagne que nous venions de doubler de celle sur laquelle,
à proprement parler, se trouve le temple, nous arrivâmes sur une
pente charmante, couverte d’une herbe aussi fraîche que serrée, et nous
y vîmes une autre fontaine, mieux bâtie, dont le cristal s’échappait avec
murmure pour remplir un réservoir verdi par les filamens d’un genre
d’êtres ambigus aquatiques, que nous avons appelés du nom de la nymphe
Salmacis (n.° 1509), mais ou nous ne trouvâmes point de ces Anaraïdes
qu’on nous avait dit y devoir habiter; au reste, s’il y en eût existé, le
bassin n’était pas assez profond pour qu’on courût risque d’y être noyé
par de telles perfides. La bâtisse qui protégeait la source était évidemment
moderne; mais il se trouvait entre les matériaux qu’y avaient employés de
barbares restaurateurs, des quartiers de beau Marbre blanc, et des fragmens
de sculptures de la bonne époque. Nous fûmes tellement charmés
dé la beauté du lieu que, si nos tentes ne fussent pas demeurées à Phigalie,
nous y eussions campé. Il ne nous restait guère plus à faire, pour
atteindre le temple, que dix minutes de chemin, et cependant nous n’en
distinguions aucun indice. U fallut encore gravir par un sentier rapide,
qui doit être un torrent lorsqu’il pleut, entre des arbres à peine bour-
geonnans, mais au pied desquels le printemps se révélait par la floraison
des Yiolettes et des Anémones. Un tambour de colonne cannelée, gisant
dans l’étroit passage, fut le premier débris qui nous apprit que nous
touchions au^erme de notre excursion : tout à coup le lieu sacré apparut
à nos regards émerveillés, majestueux dans la solitude des hautes
régions et comme encadré entre des cimes qui environnaient une plateforme
surchargée de décombres dont il occupait le milieu.
Nous étions les premiers membres de la Commission scientifique qui,
avec M. Lenormand, portions nos pas vers ce temple si long-temps
inconnu, ou trente-cinq colonnes canneléés et d’une teinte pâle demeuraient
debout avec leur entablement, formé de longues pierres allant de
l’une à l’autre et dont le toit seul semblait manquer; les débris de ce toit,
avec ceux de la cella, jonchaient les environs. Baccuetprit aussitôt une
vue du monument pour constater l’état ou il se trouvait; mais je me suis
dispensé de la reproduire, la section d’architecture en ayant donné plusieurs1
avec un excellent plan et beaucoup de planches, ou les moindres
détails de ce qui en reste sont soigneusement représentés. On est ici vers
les confins de l’Elide et de l’Arcadie, à 1150 mètres environ au-dessus de
la mer , dans le site le plus aérièn et le plus intéressant qu’il soit possible
d’imaginer, dominant à droite la mer Ionienne, oii l’on aperçoit au loin
les Strophades, antique asyle des fabuleuses Harpies, et plongeant à
gauche sur le golfe de Coron, de l’autre côté duquel se dresse la majestueuse
chaîne du Taygète; lè Tétrage, région des vieux souvenirs, s’élève
i . Tome II, pl. 3o , comme le temple apparaît en y montant par le côté où nous y sommes
venus* pl. 4 j plus près et du côté méridional, par où Baccuet l’avait pris * pl. 6 , également de prés
et du côté opposé* pl. 7, vu de côté, et pl. 8 , en dedans et de l’endroit où devait être la statué
du dieu. M. de Stackelberg a aussi donné deux vues des mêmes lieux* la plus petite ne nous satisfait
point* la plus grande nous paraît au contraire parfaite et la meilleure de toutes celles qui
existent.