d’Andanie Une ardente et nombreuse jeunesse y florissait alors; Aris-
tomène, que, selon Pausanias1 « on y révérait comme un héros, et qui,
* pour relever sa naissance au-dessus de celle des simples mortels,
« assurait que sa mère Nicotélie avait eu commerce avec un génie revêtu
« des formes d’un serpent; Aristomène brillait au milieu de cette génér
« ration guerrière, ardente à provoquer la dernière guerre de Messénie,
« trente-neuf ans après la destruction d’Ithome, et dans la quatrième
« année de là XXIII.'Olympiade. ’ Les Messéniens furent d’abord favorisés
par la fortune; après, une bataille qu’ils gagnèrent au lieu nommé
le monument du Sanglier, leur général vainqueur se rendant à Andanie,
« y entra en triomphe; les femmes et les vierges allèrent au-devant
« de lui, jonchant de fleurs le chemin par où il passait en chantant
« un distique qui a été conservé à la postérité, et qui était conçu à
*, peu près en ces termes : Aristomène victorieux dans la glorieuse
« plaine de Sténiklère a mis en fuite les Lacédémoniens et les a pour-
«suivis jusque dans le haut des montagnes.3” Mais les ennemis ayant
repris la supériorité, et les Messéniens étant tombés dans l’impossibilité
de défendre le plat pays, Aristomène lui-même n’y vit d’autre remède
que de l’abandonner pour se retirer sur le mont Ira; dès-lors Andanie
s’efface dans l’histoire. Mais la valeur n’y pouvait plus rien; il avait été
prononcé par l’oracle : «que, lorsqu’un Bouc boirait dans la Néda, Ira
« tomberait comme Itbome.” Nous renverrons aux auteurs des Messé-
niaques et des Hommes illustres4 pour l’explication de l’énigme sacrée,
dont le mot était un Figuier qui croissait au bord du fleuve, dans les
eaux duquel s’abreuvaient ses racines.
Pausanias, venant de Camasius, laissa l’emplacement d’Andanie sur
sa gauche; il ne dit point qu’il l’ait visité et ne nous en apprend
absolument rien. La route de Tripolitza, que nous laissâmes également
à gauche, traverse le pays plat pour gagner le camp de Tzacona par
un endroit nommé Sandanie, où nous n’avons point été, mais dont le
nom, qui rappelle, presque sans altération, celui de la ville perdue,
i . Pausanias, Ub. Vf, cap. 27; -soyez aussi Poljbe etPlutarque a. Pausanias, îih. IV, cap. i 4.
— 3. Plutarqne, Vie d’Aristomène. Traduction deBelIangerj t. IX, p. 3i 6 et 317. — 4- Pansa,
nias, lib. IV, cap. 2 0 , et Plutarque, loc, cit., p. 33i.
semble indiquer qu’on pourrait bien y retrouver des ruines qu’on n’a
encore recherchées qu’en des lieux où rien n’indique qu’elles peuvent être;
En descendant le cours du Mavrozoumèna, le long duquel étaient
successivement deux moulins, nous avions sans cesse l’Ithome devant
les yeux ; cette montagne nous présentait son côté septentrional, par oit
elle est escarpée et presque coupée à pic, surtout vers sa partie supérieure,
qui s’alonge horizontalement comme un mur du Nord-Ouest au
Sud-Est; sa base semblait être formée d’éboulemens et de vastes frag»
mens de rochers dftloqués, entremêlés d’une verdure qui contrastait avec
la ferrugineuse nudité des remparts naturels d’alentour. Nous eussions
déjà pu en atteindre le pied dès le matin par deux chemins que nous
avions laissés à droite, et qui, partant du moulin de notre halte, et de
celui qu’on trouve ensuite, traversent la rivière à deux gués successifs;
mais nous voulions voir la jonction du Mavrozoumèna avec la Pirnatza,
où existe un pont triangulaire, célèbre dans tout le pays, et qui mérite
en effet qu’on le visite.
La Pirnatza est, à proprement parler, le seul véritable fleuve de Messénie,
qui prend sa source au pic de Kouvella. Cette Pirnatza coule d’abord
à travers la plaine de Sténikléros du Nord au Sud, où elle reçoit par sa
droite l’affluent que nous venons de suivre, et dans lequel nous avons
reconnu leBalyra; tandis que par sa gauche un peu avant le confluent que
son pont particularise, elle se grossit d’une autre rivière, formée de la
réunion de deux assez grands cours d’eaux, descendus l’un du faîte du
Tétrage, l’autre des flancs des monts Hélénitsa. Sa totalité ne répond point
au Pamisus de l’antiquité, dont les sources, que nous visiterons bientôt,
étaient censées exister près de l’antique Thuria; son cours étant plutôt
renommé par le volume de ses eaux et la largeur de son embouchure où
entraient les vaisseaux, que par sa longueur. Le nom de Pamisus ne s’appliquait
qu’à la partie inférieure du fleuve, où se voit aujourd’hui Nizi,
et que Danville a pris pour la plaine de Sténikléros. Sa partie supérieure
était sous un autre nom considérée comme une rivière distincte et comme
un simple affluent, qui fut peut-être ce qu’on appelait le Cnéus. Quoi qu’il
en soit, le pont que nous venions de voir est fort remarquable : ses fon-
demens et les assises inférieures de toute sa construction appartiennent