diminutif et qu’ils présentgnt en petit les accidens-qu’on regarde comme
caractéristiques des hautes montagnes. On dirait, en voyant le terrain,
une des chaînes de la Suisse uou des Pyrénées, avec ses plateaux, ses
contre-forts, ses vallées, ses anastomoses, ses lacs et ses torreqs, représentés
en relief; quand on examine «es aeeidens du haut des falaises
qui les dominent, il n’y existe rigoureusement, quant aux formes,
d’autre différence que celle des proportion^, les cimes prononcées n’y
ayant guère que vingt à trente pieds d’élévation au-dessus du niveau
de la mer, au lieu de trois à quatre mille mètres. Chaqùe forte pluie,
les tempêtes et les hivers produisent de grands changemens dans ces
montagnes en miniature, oh des prêles fluyiatiles sont comme les forêts
de sapins au-dessus des humbles graminées qui figurent de verdoyantes
prairies. Mais la physionomie alpine, en s’y modifiant, ne disparaît
jamais. L’examen de ces lieux est conséquemment fort propre à donner,
sans avoir recours à de grands catadismes, des idées justes sur plusieurs
des causes qui ont dû contribuer bidonner aux pays de montagne^
la configuration qu’on leur voit. .
Les environs de CujeS nous ojïrirent entre Marseille et Toulon la
conformation du trou de Soucy, dans fies proportions beaucoup plus
vastes,' avec les caractères d’un kataBotron encore mieux prononcé.
Les voitures publiques, allant de Toulon à Marseille, s’y arrêtent pour
donner le temps aux voyageurs de prendre leur repas tandis qu’on
relaie; c’est d’ailleurs une station de poste. En venant d’Àubagnes.,
et quand on est parvenu au lieu nommé Albenas, on s éleve par un
défilé dont la montée ne laisse pas que d’être rude, et que flanquent
des blocs de rochers calcaires quelquefois énormes, blancs, confusément
et majestueusement entassés, liés par un peu de terre rougeâtre;
d’entre lesquels s’élèvent les pins dont se compose la forêt aride qui
ombrage à peine le grand chemin. Après avoir dépassé le point le
plus élevé du col, et le bois s’éclaircissant, on aperçoit devant soi,
à mesure qu’on commence à descendre, non pas un vallon, mais
comme un bassin,fermé de toutes parts; cirque immense,: entouré de
montaghes, au fond duquel s’étend une plaine plantée de vignes et
de câpriers partout où elle n’est point abandonnée à cette herbe
dure qui caractérise les sites marécageux. La route, un peu relevée en
chaussée, bordée^e haies ou de murs bas en pierres sèches, en traverse
le bord septentrional. Une flaque d’eau assez étendue existait au côté
opposé quand-:nous y passâmes; elle s’étendait à main droite jusqu’à
la base des hauteurs méridionales : elle était le résultat des pluies de
l’automne, accumulées au-dessous du niveau d’un katabotron latéral
par lequel s’était dégorgé souterrainement le surplus, et qu’on appelle
1 e Gouffre de la Roque. On veille à ce que ce gouffre ne se bouche
point de manière à ne plus fournir d’issue à l’eau du ciel ; s’il s’encombrait,
la mare dont les chaleurs de la belle saison procurent l’évaporation
complète, ne se desséchant plus, deviendrait en peu d’années un
lac sous lequel disparaîtraient toutes les cultures: et qui. pourrait à la
longue devenir d’une ” profondeur considérable. On verrait alors se
renouveler précisément sur la limite de deux départemens du Midi ce
qui est arrivé en Morée dans les bassins analogues à celui degflujes,
qpe noient aujourd’hui les lacs de Phonia et de Stinphale. Nous n’avons
pu, en passant par Cujes, obtenir de renseignemeÿis sur le point oii les
eaux du Gouffre de la Roque peuvent reparaître; mais je présume que
ces eaux doivent aboutir au petit golfe des Lesques, situé entre la Ciotat
et la plage de Beauveller oit se voient les ruines d’une petite ville de
Tarente. Le bassinée Cujq§., qui dut être originairement un lac quand
aucun dégorgeoir n’y existait, retournerait donc à son état primitif.
Les montagnçs qui le cernent peuvent avoir quatre cents mètres du
coté du sud, et environ sept cents du côté du nord^où elles se lient
à la montagne de Garlaban. La maison de poste est à deux cent neuf
mètres au-dessus du niveau de la mer ; le gouffre et le niveau de la
plaine sont beaucoup plus bas.
Les bords fangeux de ces eaux stagnantes attirent dans le canton
beaucoup de bécasses; nulle part peut-être on n’en trouve davantage,
et nous en vîmes en quantité de pendues aux fenêtres des moindres
cabarets. Les voyageurs peuvent s’en régaler dans toutes les auberges
du heu, oh l’on en couvre quelquefois les tables a^sç profusion. On
prétend qu’elles y sont plus grasses et meilleures que partout ailleurs.
Je ne veux point toucher cette particularité, qui tient à l’histoire
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