pas qu’elle ne soit celle que désigne Homère1-sous le nom de Pédàsos
l’une des sépt que promet Agamemnon au bouillant Achille. Le poète
la caractérise par l’épithète de riche en vignobles, et l’on sait qu’il est
toujours fort éxact dans ces sortes de signalemens. 11 n’existe plus, à
la vérité, un seul vignoble dans les environs dé Modon, et l’olivier
paraît avoir été depuis bien des siècles la culture dominante sur l’extrémité
méridionale de la Messénie; mais il ne s’ensuit pas qu’Homère
se fût trompé, et l’on sait que le commerce de ses vins, enrichissant
Méthone dans les temps reculés, fut même une fois la cause de Sa
ruine. « Les ïllyriens, dit Pausanias, ayant goûté la douceur de com-
« mander aux autres, ne songèrent plus qu’à étendre leur domina-
« tion; ils firent provision de bâtimens propres à courir les mers, et
« après avoir écumé tout ce qui se trouvait à leur portée, ils allèrent
« mouiller au port de Mothone. D’abord, sous l’ombre d’amitié, ils
« envoyèrent dire aux habitans qu’ils venaient pour acheter les récoltes
« de leurs vignes; quelques gens de la ville se pressèrent de les leur
« apporter et reçurent le prix qu’ils en attendaient, ils prirent même en
« retour quelques-unes des marchandises des ïllyriens. Le lendemain les
« habitans des campagnes vinrent en plus grand nombre avec leurs vins
« pour faire le même trafic; mais bientôt les traîtres étrangers, voyant
« leur proie dans leurs filets, enlevèrent toute cette multitude, particu-
« lièremént les femmes, et faisant voile pour leur pays, ils laissèrent la
« ville et son territoire changés en un d é s e r t . '
On ne sait pas exactement à quelle époque le nom de Pédase fit place
à celui dont le Modon moderne est évidemment dérivé. Le témoignage
de Pausanias n’est pas une grande autorité sur ce point, quand iLraconte
que les Mothonéens attribuent ce changement à une fille d’OEneus,
fils de Porthaon qui, ayant passé au Péloponèse avec Diomède après
la prise de Troie, eut de sa concubineNune fille nommée Mothone,
« pour moi, ajoute notre auteur, je crois que cette ville a tiré son nom
« d’une grosse rocbe que les gens du pays appellent Mothon et qui
1. Iliad., liv. IX , vers i 5o - i$2.
3. Écrit Pédasus et Pédalos par plusieurs, entre autres par Gédojn, t. I.*r, p. 4oa.
« forme au devant une espèce de rade fort étroite, en rompant la furie
« des vagues de la mer dans laquelle on la voit s’avancer. r Méthone
favorisa les Messéniens lorsque ceux-ci occupaient le mont Ira* pendant
la guerre cruelle que leur firent les Spartiates, lesquels se vengèrent en
chassant ce qu’il y testait d’habitans pour donner la ville aux Naupliens
que Domicratidasy roi d’Argos, chassait, au contraire, de ses Etats
parce qu’ils s’étaient montrés dévoués au parti de Lacédémone. Les
descendans des Naupliens y furent trouvés par les Messéniens lorsque
cëûx-ci revinrent de Sicile pour occuper de nouveau leur première patrie ;.
ces Messéniens qui n’avaient pas voulu, comme on l’a vu plu&haut
(p. 45), qu’on égorgeât les Zancléens vaincus, eurent encore la générosité
de ne pas chasser de Méthone les petits-fils de leurs ennemis.
Dès le commencement de l’empire romain, Méthone, toujours habitée
par les descendans des Naupliens, joue encore un certain rôle dans l’histoire
, et ses désastres recommencent avec le siège qu’Agrippa en fit par
terre et par mer ; l’ayant prise, il y fit mourir Bagouas ou Boguas2,
roi des Maurusiens, qui avait suivi le parti d’Antoine, et qui s’était jeté
dans cette place. Il fallait qu’après cet événement elle eût conservé
quelque importance, puisqu’elle mérita que Trajan, maître du monde,
se souvînt d’elle et voulût réparer sa détresse; il accorda des privilèges
et des franchises à ses habitans, en leur laissant se choisir un gouvernement
aristocratique, qu’ils conservaient long-temps sous les empereurs
d’Orient; mais en 1124 les Yénitiens, qui s’étaient emparés de
Rhodes, attaquèrent Modon et en firent la conquête : ils la détruisirent,
à ce qu’il paraît, de fond en comble, « parce que, dit la chronique de
« Morée3, les Grecs qui y avaient leur marine entravaient, à l*Éide
« de leurs bâtimens, les opérations maritimes de la république, et
« sortaient de ce port pour porter dommage aux places vénitiennes.5>
Dès l’année suivante la ville <rfentra sous la domination grecque, mais
elle ne se repeupla qu’imparfaitement. On trouve qu’en \ \ 66 seulement
elle*avait un évêque du rite d’Orient, appelé Nicolas. Environ trente-
1. Pausanias, lib. IV, câ% 18. ^
2. Dion Casshis, lib. L , cap. 2 , p. 61t.
3. Traduction de Buchon, p. 127.
1 . s