
L E T T R E LX X X V I I I .
Etat des Bruyères dans le pa/Jage du pays
las & inculte du Brabant, au haut des
Collines cultivées de Tongres.
H a s s e e t , le 20*. Mien 1778.
M A D A M E .
ï ®j/ e vais quitter les Bruyères, & je m’approche
d’un Pays où l’objet de mes ob*
fervations changera. Je profite donc 'd’une
ha lte , pour expliquer à V . M . , par quelles
nuances fe fait ce paflage, d’un pays
encore d é fe r t, à d’autres qui paroiiTent
habités depuis longtems. Ces traces s’effa
c e ro n t , & il eft utile de les conftater.
Je préparerai en même tems l’examen que
je me propofe de faire dès ce fo ir , de ces
murs de Tongres, dont les anneaux ont
fa it imaginer, que la Mer les baignoit
jadis.
Au
Au fortir de l’enceinte cultivée de Poftel,
jai traverfé ces vaftes Bruyères que je dé-
couvris hier au foir de la galerie du Moulin
à vent. Elles s’étendent horizontale-
ment à une très grande difhnce ; fans que
rien s’élève fur leur fu r fa c e , que les monceaux
de gazon qu’on a coupésçà & là , pour
le transporter fort loin auprès des lieux cultivés.
On brûle cette c roû te , parcequ’on n'a
point de tourbe* Il s’en eonfomme ainü une
très grande quantité : & quoique fa cendre fort
un engrais, il fe réduit à bien peu d e choie.
iT*faut donc une furface très v a f te , pour
pourvoir à tout dans le petit nombre de
lieux habités ; ce qui retarde beaucoup la
fertilifation. Quel fervice ne rendroic pas
l ’Etat à ces p a y s - là , en y plantant des Bois
ou des broifaillés-!
L e premier endroit habité que j ’aie trouv
é fur ma ro u te , eit celui donc j ’avois ap-
perçu le clocher hier au foir : i l eft diflant
de deux lieues, & fe nomme Loemel. C ’eft
un joli Bourg, tout environné de culture
très prospérante. Il y a de bonnes prairies
, fans que j ’y aie apperçu des eaux.
Quand une prairie eft bien établie; l’épais-
feur feule de l’h e rb e , que produifent les
F 4 pluies