
L ’élévation des Canaux àü-deffus de la
campagne, la relève pour ainfi dire aux
ÿeux du fpeéfateur ; & l’on rencontre de
tems eh teins des lieux'fi riàns, fi champêtre
s , qu’on ne fauroit le» voir fans plaifir.
T o u t y fent l’induilrie, & fon effet natur
e l, l’abondance. 11 eft vrai que l’induftrie
eft bien eXcité e , quand elle eft toujours
fuivié de fuccès ; & je crois qu’il y a peu
de Pays où elle doive plus à cette caufe.
C e te f r e in , quoique fi u n i, ne lai île pas
d’avoir fes variétés pour un voyageur. D ’abord
ces Canaux traverfent les V ille s , &
il en-eft peu d’aufii jolies que celles de là
Hollande. 11 ne me fembloit pas au commencement
que je fuife dans des rues, tant
Textéfieur des maifons eft la v é , propre;
peint avec foin & de jolies couleurs. Oh
en lave chaque femaine avec des feringues,
non feulement les fenêtres & les portes,
jnais les murs: on lave même le pavé, qui
eft auffi de briques ; & on le fait à caufe
de l’humidité du pays. Cela paroit d’abord
un paradoxe; & cependant c’eft le feul
moyen d ’habiter fans danger un pays humide.
L ’effet le plus pernicieux de l’humidité,
pour les corps für lesquels elle fe dépofe,
eft
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eft une forte d’incruftation qu’elle produit
à leur fu r fa c e , par la pouffière qui s’ y attache
& les mouffes qui y croiffent; incru-
ftation qui retient de plus en plus l’humid
ité , & qui la pompe comme une éponge*
Cette humidité ftagnante eft pernicieufe *
tant pour les maifons fur lesquelles elle fé-
journe, que pour leurs habitans. L a propreté
prévient la formation de cette c roû te ; l’eau
abondamment répandue fur lés faces de ces
maifons, entraîne ces petits d épô ts, de Ce
fèche affez vite pour n’en pas former elle-
même.
Toutes ces jolies rues font bordées d’arbres
le long des Canaux; & c’eft au -tra vers
de ces décorations * qui plairoient au
Théâtre , que l’on navige tant qu’on eft
dans les Ville s. Au dehors, & jusqu'à
une grande diftance, ou trouve les maifons
de pîaifance de leur habitans, & là on na-
vige' comme dans les Canaux de leurs jardins.
L ’eau eft fi abondante, que chaque
poffeffeur de terre peut fe procurer autant
de Canaux qu’il veut ; & en les çreufant,
il y gagne d’abord de pouvoir répandre fur
fon fol le terrein qu’ il en tire. Enfuite il
s’enferme chez lui par ce moyen, fans haie
ni muraille. 11 peut donc avoir le devant
de