
lite entr’eux e il une chimère; & s’il y a
du bonheur à conférer & à recevoir des dis-
tinflions;(ce que tout le monde épropve dans
le dernier c a s , & que le coeur dit à l’égard
du premier) c ’eit dans la gradation des
dîilin&ions, que ce bonheur prend fa four,
ce. Je rendis cette femme heureüfe à bien
peu de fra ix; & elle me rendit heureux,
en me faifant remarquer que je lui avois
fait plaifir. Pourquoi tous ceux qui ont une
grande fupériorité, ne favent - ils pas recevoir
& conférer ce bonheur réciproque !
*A quelque diflance du lieu où je m’étois
arrêté avec cette bonne femme, je trouv
a i une jolie petite fille de n eu f à dix ans,
qui revenoit du même ouvrage avec un paquet
d’herbes fur fa tête ; & , comme il
e il ordinaire au V illa g e , elle avoit fous
fa garde une foeur cadette à peine de trois
ans. L a jolie enfant avoit auffi fon paquet
d’herbes, gros comme le p o in g , qu’elle
portoit en triomphe fur fa tê te , toute glo-
rieufe d’imiter fa foeur ; qui de fon côté
paroiifoit enchantée du plaifir qu’elle pro-
curoit. Cette petite fcène m’en donna tant
à m o i-m êm e , que fans y fonge r, je battis
des mains comme au Théâtre, où ces mêmes
objets m’euflent peut - être laide froid.
C’e il
C ’e il aux Champs, que ces fcènes font remuantes:
parceque c’e il - là que le fpcéla-
teur y e il préparé, par un calme qui laiife
aux objets extérieurs leur influence natü-
I relie. On vient au contraire au Théâtre,
plein de l’idée des plaifirs de l ’A r t , & des
déplaifirs du Monde. E ilr i l donc furpre-
nant, qu’il y faille tant de machinés pour
remonter les hommes à jouir ? Il me fem-
ble voir ce Sénateuf Italien, qui na yant
plus.ri, depuis qu’il avoit endôiTé fà robe*
lit venir Arlequin dans fon Cab ine t* & lui
dit d’ùn ton g ra v e : Fais moi rire. ,, H ë !
„ difpofez• vous à r ire , & il n’ÿ faudra
„ pas tant de façon ! ” C ’e il ainfi que l’on
vient demander au Théâtre tous les fenti-
mens agréables. Quelle tâche pour les
Auteurs & les Aéteurs ! J’ai peine à concevoir
comment on ofe l’entreprendre; excepté
pour le commun Peuple, qui fe distingue
par une plus grande aptitude àjoüir.
Heureux qui peut relier Peuple !
PalTant ainfi de Colline en Colline par
Sicheftshaüfen & Belknhaufen, j ’arrivai à ce
Pont fur la Lahn, o ù , dans mon premier
I voyage, j ’avois retrouvé les Bafaltes après
t les avoir perdus quelque tems de vite. On
I les apporté des Montagnes auprès defquel-
E e 4 les