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rence que ces deuxTortues font des variétés
de celle qu’on nomme Caouanne.
Les Bec-à-Faucons, qui forment la troi-
fième variété , font les moindres de toutes.
On les nomme ainfi, parce qu’elles ont la
gueule longue & petite, d’une conformation
affez femblable à celle du bec des Faucons.
Leur dos eft couvert de cette belle écaille
dont on fait un riche commerce. On voit
par ce feul caractère, que la Tortue dont il
s’agit ici elt la même que le Caret. Dampier
ajoute que les plus grolfes de ces Tortues
ont environ trois livres & demie d’écaille ;
que leur chair eft d’une bonté médiocre, S t
fi mal-faine en certains lieux, qu’elle caufe
des vomiffemens exceflifs.
La quatrième variété eft celle que Dampier
appelle proprement Tortue verte , S t à
laquelle on a auffi donné le nom de Tortue
franche. Elle tire fon nom, fuivant le même
voyageur, de la couleur de fon écaille, qui
eft plus verte que celle des autres ; elle eft
auiîi fort déliée , fort tranfparente, S i les
nuages en font plus beaux que ceux du Bec-
à-Faucon ou Caret. Mais on ne s’en fert
que pour les pièces.de rapport, parce qu’elle
eft extrêmement fine. Ces Tortues font en
général plus greffes que le Bec-à-Faucon,
S t pèfent jufqû’à trois cens livres. Elles ont
aufli le dos plus plat. Leur tête eft petite & !
arrondie.
Dampier a remarqué qu’à Blanco, Cap
de la Nouvelle Efpagne dans la mer du Sud,
les Tortues vertes, les feules qu’on y trou-,
v â t , étoient plus greffes que toutes celles
de la même mer , S t qu’elles y pefoient
ordinairement deux cens quatre-vingt ou
trois cens livres. Le gras en eft jaune , le
maigre blanc , S i la chair extraordinaire- ;
ment douce. Les teintes de la couleur des
parties graffes Se charnues varient fuivant
les pays ; quelquefois aufli elles diffèrent
dans les individus qui habitent un même
lie’u. Parmi les Tortues des petites Ifles qui
bordent le continent de la Nouvelle Efpagne
au midi de Cuba, les unes ont la chair
verte, les autres l’ont noire , S t les autres
jaune. On y envoyé' de la Jamaïque des
à l’HiJloire Naturelle
T o r t u e s .
vaiffeaux , qui les prennent au filet, & qui
les portent dans cette Ifle, oh elles arrivent
vivantes : on leur fait des réfervoirs en
mer; c’eft la nourriture ordinaire du peuple.
La Tortue verte vit d’une herbe qui croit à
trois, quatre, cinq ou fix braffes d’eau, S t
dont la feuille a environ un quart de pouce
de largeur fur fix pouces de longueur.
La cinquième variété eft l’Hecate, ainfi
nommée par les Efpagnols. Elle aime l’eau
douce, S t cherche les étangs S t les lacs,
d’où elle vient rarement à terre. Son poids
n’eft que de douze ou quinze livres. Elle a
les jambes petites, les pieds plats, le cou
I long S t menu. Sa chair paffe pour un bon
aliment.
Les Terrapènes, qui font la fixième variété,
reffemblent beaucoup aux Hecates;
mais elles font fenfiblement moins graffes
S t ont le dos plus rond. Elles aiment les
lieux humides S t marécageux. On eftime
aufli leur chair. Il s’en trouve beaucoup fur
les côtes de l ’iile des Pins , qui eft entre
celle de Cuba S t le continent. Elles pénètrent
dans les bois , où les chaffeurs Efpagnols
ont peu de peine à les prendre.^ Ils les
portent à leurs cabannes , S i après leur
avoir fait une marque particulière fur l’e-
caille , ils les laiffent aller , avec la certitude
de les retrouver à fi peu de diftance ,
qu’après un mois de chaffe, chacun recon-
noît les fiennes S t les emporte à Cuba. La
qualité de la chair des Terrapènes S i des
Hecates, qui fournit un bon aliment, fem-
ble devoir faire rapporter ces deux T o r tues
aux Tortues vertes , qui font la feule
des efpèces citéeü par le commun des vo yageurs
, dont la chair foit recherchée.
La feptième variété comprend les Tortues
bâtardes , qui font des Tortues vertes, mais
1 dont l’écaille eft beaucoup plus épaiffe que
celle des autres Tortues de la même couleur
, S i dont la chair n’eft pas fi douce.
Elles font fort communes aux Mes de Gal-
lapagos, vis-à-vis le continent de la Nouvelle
Efpagne dans la mer du Sud. On ne
connoît point de Tortues dont le corps ait
T o r t u e s .
plus d’étendue en largeur, car celle de leur
ventre eft ordinairement de cinq pieds.
La petite Tortue qui fait la huitième des
variétés citées par Dampier ,-fe trouve fur
la côte occidentale du Mexique. Sa chair
paffe pour être de très-bonne qualité. Mais
Dampier ne diftingue cette Tortue que par
fa petiteffe, S t n’en donne aucune defcrip-
tion. ( Jlifi. générale des Voyages,T. X LVIII,
p. 344& fu iv .)
Des différentes efpèces de Tortues que
l ’on a obfervées dans les divers pays , la
Tortue de terre e ft , félon lé rapport de
Kolben , la feule qui fe trouve au Cap de
Bonne-Efpérânce. Elle y eft très-multipliée.
Sa chair eft blanche & d’excellent goût. Son
foie St fes oeufs paffent pour un mets déli-
T o r t u e s ;
cat unais la Tortue eft fi petite, qu’elle n’a
pas plus de quatre pouces de largeur. Sa
tête S t fes pieds font d’une couleur brune.
Soh écaille eft fi dure , qu’on prétend qu’un
charriot bien chargé paffe defltis fans qu’elle
en fouffre.
Cette Tortue a dans le pays un ennemi
redoutable , qui eft l’Aigle Oßifrage. Ces
oifeaux enlèvent les Tortues, S i les laiffent
enfuite tomber fur les rochers pour en bri-
fer l’écaille, d’où leur vient leur nom. Une
feule chute ne fuffit pas, & l’Aigle eft obligé
de reprendre la Tortue St de la précipiter
à plufieurs reprifes, avant qu’elle foit affez
brifée pour lui fervir de nourriture. ( H iß .
générale des Voyages , T . X V III » pag. 1 5 8
St 179.)