
, *-** narines à demi-couvertes d’une membrane
«paille & molle.
vivent de grains, qu’ils avalent fans le cafler ;
ils ne produifent que deux oeufs à chaque ponte ;
ils en font pïuüeurs par an : le mâle & la femelle
couvent alternativement, & tous les deux prennent
un égal foin des petits, qu’ils nourrirent en dégorgeant
la nourriture déjà plus ou moins amollie ,
oc ayant fubi dans leuF jabot un commencement de
digeftion plus ou moins avancé. Car , dans les
premiers jours, les pigeons ne donnent à manger
a leurs petits que quelque temps après qu’ils en
eux-memes,& le grain qu’ils leur dégorgent
eit ü amolli, qu’il eft prêt de fe fondre en une forte
de pulpe ; mais, à mefure que les petits avancent
<n,.Jge > *e père & h mère leur donnent le grain
1 /T'nt ava.^ 9 P^us Promptement après l’avoir
ramalle & fuivant les degrés de l’âge des jeunes
qu ils nourriffent.
Les pige annaux font fort long-temps à apprendre
a chercher 6c à ramafler eux-mêmes le grain : ils
iuivent encore le père 6c la mère bien du temps i
apres qu ils font en état de voler ; lors même qu’ils
©nt prefque acquis tout leur développement, ils en
reçoivent encore leur nourriture r il faut, pour leur
en faire perdre l’habitude, que le père & la mère, j
©u occupes des foins d’une nouvelle couvée, ou
fatigues de ceux qu’ils ont donnés à des petits en
état de s’en palie r, les- rebutent & fe refofent à
ieur importunité. Cependant ce n’eft qu’une indo-
lence naturelle aux pigeonnaux , la parefle à faire
olage de leurs facultés , qui les attache fi longtemps
a la fuite du père & de la mère , & ce n’eft
pas leur propre foibleffe , mais l’ignorance & le
defaut d’urage de leurs forces qui les retiennent dans
fa dépendance. Car fi l’on féqueftre les pigeonnaux,
meme fort long-temps avant que lepère & la mère
leur renifent la nourriture, qu’on le s enferme feuls-
en leur iaiffant du grain, fut-ce dans l’âge où ife
ne commencent qu’à peine à pouvoir vo le r , après
avoir enduré quelque-temps la faim & poufTé des
eris. plaintifs, ils- fe déterminent à ramafler du
grain ; ils y réufliflent, & en peu de jours ils-font
habitués a prendre la quantité de nourriture dont
ils ont befoin.
Tout le monde fçaitque lepigeon n’apas- d’autre
•.voix qu’un fon plein & roulant , qp’on nomme
roucoulement-r 8t l’aétion de le former, roucouler;
que le roucoulement du mâle eft plus- plein ,, plus
fort & plus foutenu que celui de la femelle ; elle
a aufli un roucoulement, maisbeaucoupplus foible,
& quelle fait^enteadre.bien moins fouvent; ce'
»’eft guère qu’à cinq à ftx. mois que les jeunes
commencent à roucouler , & jufques-là ils con-
fervent le cri aigu & plaintif dü- premier âge. Ils
font a-peu-près-au terme de leur grandeur quand
ik roucoulent, & ils font-en état de produire à
* n i t d ix mois ou un an , fuivant lès> races.
Les pigeons font en général d’une forme agréabî’e
** élégante ; leur plumage eft lifte ^arrangé , fouventorné
des plus brillantes couleurs & de reflets écfaJ
tans^ autour de la gorge & du cou : ils . ont foin
de l’entretenir propre ; on diroit que ces ©»féaux
connoiflent l’avantage qu’il y a dé plaire 6c qu’il*
y font fenfibfes-; tous leurs mouvemens- femblent
avoir cet objet pour b u t, & l ’ardeur en amour ,
jointe à la galanterie, paroiffent former le fond'
de leur cara&ère. Le mâle', aftif & empreffé
auprès de fa femelle , palfe 6c repaffe devant elle
en faifant des courbettes , en prenant des attitudes
& en pouffant un fon foutenu & modulé, dont
fe but femhle être à la fois de l’avertir du foin
de propager fon efpèce , de lui peindre la vivacité
de fes defirs & de l ’inviter à y répondre , en
lui développant les grâces & les beautés qui le
parent lui-même.
La femelle, grave & pofée pendant que le mâle
eft agité, a l’air de recevoir fes avertiffemens &
fes démonftrations comme un devoir qu’il remplit
& des hommages qu’il lui' rend i elle ne témoigne
ni dédain, ni empreffement.
. Ces préludes font fuivis de carefles q u i, en
reculant l’accompliffement des defirs , les augmentent
& préparent une jouiffance plus douce :
le mâle, réunifiant le fentiment paternel à l’amour
conjugal , offre à manger à fa femelle , qui en-
reçoit de la manière que lui & elle en dégorgeront
a leurs petits ; ainfi, le fentiment de- ces tendres
careffes eft eompofé de toutes les- affeéfions les
plus douces, des élans de l’amour , de là tendreffe
paternelle & de la recorinoiffance des petits ; la
femelle en prend l’habitude : elle albnge le cou ,
elle étend à demi les ailes ; elle les agite d'un mouvement
doux , en recevant les baifers de fon amant
& les dons du chef de la famille. Eft-ce que-,. dans
toutes les efpèces, là douceur , & quelque chofe
de fournis & de dépendant, donneroient plus de
^aces aux femelles & infpireroient* plus d’amour
& de tendreffe aux mâles l
A ces préludes , pour léfquels on diroit que
Ta galanterie a réuni tout ce que fon art.a de plus-
délicat y fuccède l’à â e qui joint les deux fexes y
ü n© dure' qu’un inftant : la femelle x à demi
baiffée-, reçoit- le- m â le ,, dont les defirs finiflent
pair un contaéb inftantané ; les deux amans- fe fé-
parent pour fe rapprocher bientôt 6c goûter de
nouveaux plàifirs ;. cependant ils • ne les. occupent
pas entièrement, & tous deux rafleqiblent quelques
menues branches ou- des brins dé faille pour en
compofer un nid plus ou moins travaillé ^fuivant-
lès efpèces; lé mâle a coutume de le gar-der le
premier 6c d’inviter fa- compare- à s^y rendre
il Emploie- pour appel un fon plein, mais plus-
bas que le roucoulement ordinaire ; à l’approche
de fa compagne, il témoigne fa fenfibilité par des
battemens-d’aile- d oux , auxquels elle répond de
la= même manière, & le-couple y prefle fur le.
nid a côté 'l’un de l’autre, femblè jouir/par anticipation
du plaifir de foigner ies, petits qui doivent*
naître. - L e temps de la ponte arrive-; la - femelle
garde le nid quelques heures dans îa journée & y
couche une ou deux nuits avant de pondre ; quelquefois
, foit qu’elle néglige ce premier devoir, foit
que le mâle foit d’un naturel preffant , il pourfuit
la femelle pour l ’obliger à fe rendre & à demeurer
au nid ; ce n’eft plus un amant empreffé, mais tous
fes mouvemens font ceux d’un maître qui commande.
La ponte fe fait-en deux jours , & ce n’eft que le
fécond que l’incubation commence à être continue ;
fa durée eft de dix-huit jours. Pendant qu’elle a lieu,
le mâle remplace la femelle deux fois en vingt-
quatre heures , le matin de neuf heures à midi à
peu-près , & de trois heures jufqu’au coucher du
foleil, changement dont les heures & la . durée
varient fuivant les faifons.
Il manque , pour achever l’hiftoire des habitudes
du pigeon en général, d’avoir parlé de fa fidélité.
La première union,eft communément la feule;
le couple qui s’eft une fois u n i, demeure joint
toute fa vie ; mais fi l’un des deux vient à manquer
àl’autre par quelqu’accident, celui qui furvit cherche,
& il trouve à former une nouvelle alliance ; la nature
femble avoir préparé la confiance de la première
union ; car il eft allez commun que les deux
jeunes qui naiffent de la même couvée, foient 1 un
un mâle , l’autre une femelle qui deviennent ordinairement
époux.
A r t i c l e I I .
De la fouche primitive des pigeons domeftiques ;
des races & des variétés ,• des foins qu’elles exigent,
& des avantages que nous en retirons.
A proportion qu’une efpèce eft plus anciennement
domeftique , qu’elle eft plus multipliée , 6c
qu’en fe propageant elle a produit un plus grand
nombre de races 6c de variétés, il eft plus difficile
d’en faire l’hiftoire & de reconnoître la fouche dont
les races 6c les variétés font émanées.
Le chien parmi fes quadrupèdes , lepigeonparmi
les oifeaux, étoient par les raifons que je viens
d’expofer, les animaux dont l’hiftoire étoit la plus
compliquée &. la plus difficile à éclaircir. On doit
à M. le comte de Buffon d’avoir furmonté fes
obftacles dont elle étoit embarraffée, de nous avoir
fait connokre la fouche primitive du chien & du
pigeon, 6c d’avoir rappelle à l’efpèce originaire les
races 6c les variétés qui en font forties*; ou phi-
tô t , pour ne parler que du pigeon, qui appartient
feul au fujet que je traite, on n’avoit avant M. de
Buffon qu’indiqué' confufément les races^& les variétés
fans remonter par degrés à-la four ce & à
lfefpèce première.
M. Briffon avoit compté, avec plufieurs des
auteurs qui l’avoienr précédé, cinq efpèces de pi~
geons fçavoir, i ° . 1e pigeon domeftique : i ° . le
pigeon romain dans l’efpèce duquel on admettoit
feize variétés : 30. 1e pigeon bijet : 40. le pigeon
de roche 6c une variété-dans cette efpèce : 50, le
pigeon fauvage..
Maïs chacune de ces efpèces n'étoit pas indiquée
d’une manière affez précife pour qu’on pût la reconnoître
facilement & la diftinguer fûrement. La
dénomination étoit vague, fans fondement 6c ne
donnoit qu’une idée incertaine de fon objet. Ainfi
il étoit mal aifé de fçavoir ce qu’on entendoit pré-*
cifément par pigeon domeftique, puifque le pigeon
romain 6c fes feize variétés qu’on comptoit dans
cette efpèce font des animaux qui vivent également
dans l’etat de domefticité. Il n’étoit- pas prouvé
par raport aux pigeons de roche avec la variété &
au pigeon fauvage , fi c’étoient des oifeaux qui
euflent toujours vécu dans ce même état, ou qui
y fuffent repaffés en s’affranchiffant de la domefticité
; car Jes pigeons domeftiques qui défertent nos
demeures 6c les retraites où ils font nés , prennent
les habitudes des pigeons libres & ils engendrent-
des races qui deviennent avec le temps femblables-
à ces derniers pigeons y devoit-on fes regarder en1
conféquence comme le produit des races domefi*'
tiques affranchies , ou des efpèces primitives dont
ces races domeftiques font forties i
Telles étoient l’obfcurité & le s difficultés qui com-
pliquoient l’hiftoire despigeons lorfque M. le comte'
de Buffon obferva que le pigeon de nos colombiers
s’accouple & produit une génération féconde avec
toutes les races 6c les variétés de nos autres pi*
geons domeftiques ; il remarqua en même temps-
que de tous les pigeons celui de colombier eft Tel—-
pèce la plus reffemblante au bifet dont-elfe diffère
très-peu , que les pigeons qui défertent les colombiers
prennent plus ou moins les habitudes du bifet,
6c que fouvent ils s’y conforment ; il conclut de ces
faits que le bifet, qui eft un oifeau de paffage & par
raport auquel cette remarque démontre que c’eft une-
race libre , qui n’a pas ceffé de vivre fous les loix>
de la nature, eft la fouche primitive dont nous*
avons tiré par la domefticité les races fecondaires»
6c leurs-variétés.
I l manque à l’expofé que je viens de- faire- la*
force que lui prêtent-le raifonnement, le ftyle de-
M. Buffon, plufieurs détails- dans lefquels il e ft:
entré; peut-être affociai-je malgré moi à fespen-'
fé es, quelques'vues qui me- fontparticulrères ; j’in--
vite donc le lefteur à puifer dans l’ouvrage de
M. de Buffon même fes preuves de fon fentiment
que les bornes danslefquelles je dois me renfermer'
ne m’ont pas permis d’expofer dans toute leur"
étendue, 6c de traufcrire dans les mêmes- termes-
dont- il s’eft fervi;
I l nous paroîf donc démontré, autant qtfe la-
nature de la chofe en eft fufceptiblè , que lé bifet?
effi la fouche primitive de toutes lès'races & de-
toutes fes variétés-de pigeons domeftiques ', & quant
au pigeon de rache avec là variété-, ainfi qü6' lè '
pigeon fauvage: , il eft vraifemblàble qu& ce n'e font*
ou que des variétésrdu bifet ôu mêtne dès race&-
émanées de lu i, affranchies de la domefticité 06'.
qui ont-repalTé à- l’état de liberté,-