
dans les terres enfemencées ; elle ne confirait pas
de nid; la femelle fe contente de creufer un trou
en terre pour y dépofer fes oeufs ; elle n’en pond
cjiie deux ; ils ne font pas plus gros que ceux de
Voie, d’un brun-olivâtre pâle, tachetés de points
hruns plus foncés ; l’incubation eft de trente jours ; la
couveufe abandonne fes oeufs pour peu qu’on fe
foit approche du lieu oh elle avoit cru fe cacher,
©u xpie pendant qu’elle s’abfente pour chercher
de la nourriture, on ait touché à fes oeufs.
L 'outarde court avec affez de promptitude en
s aidant de fes ailes ; elle a beaucoup de peine à
prendre fon vol , & ne parvient à s’enlever
qu’après avoir couru un certain efpace ; elle eft
très-fauvage , ou fi l’on veut très-timide ; on pour-
roit auffi bien dire très-prudente ; un animal qui
a auffi peu d’avantages , qu’on ne manque guère
de pourfuivre toutes les fois qu’on l’apperçoit ,
ne fçauroit fuir de trop loin ; elle craint fur-tout
les chiens & c’eft peut-être parce qu’on a coutume
de s en l'ervir pour la chaffer ; on la force quelquefois
a la courle de cette façon avant qu’elle ait pu
s enlever ; on la chaffe auffi à l’oifeau de proie,
& fur - tout on l'a tire. Mais fa timidité là rend
très - difficile à approcher ; on a imaginé différens
moyens, pour y parvenir ,. tels que de 1e cacher
fous de la paille dans une charrette dont on abandonne
la conduite , ou fur un chemin, ou à travers
les terres , au cheval qu’on y a attellé ; ou
l ’on fe couvre d’une peau.de cheval ou de vache ,
©u d’une toile fur laquelle eft peinte la figure d’un
de ces animaux ; la peau ou la toile font étendues
par le moyen de barons qui fe croifont 6c qui
ont leur point d’appui fur la tête du chafféur; deux
trous pratiqués aux points qui répondent à fes
y e u x , lui laiffent la lumière néceffaire pour fe
conduire & voir au loin ce qui fe paffe ; des pieds
& une queue de l’animal que la toile repréfente
attaches au bas achèvent la reffemblance grofiière
qui fuffit pour tromper les outardes ; à la faveur
de ce déguifeinent le chaffeur , qui tient fon fufil
caché fous le manteau qui le couvre , peut approcher
des outardes qu’il a apperçues affez près pour
le s tirer ; cependant il ne doit pas aller à elles
trop précipitamment ni trop dire&ement; mais
fans fe prelfer, il doit s’avancer à pas lents, obliques
ôc tortueux, tels qu’en font un cheval ou
une vache qui paiffent dans un champ.
Les outardes vont ordinairement en bandes de
-Jiuit ou dix le plus fouvent, & quelquefois beaucoup
plus nombreuies ; fuivant plufieurs auteurs
*>n trouve ces oifeaux en S y r ie , dans la Lybie , I
dans la partie méridionale de l’Europe ; mais il
par oit plus confiant que les outardes habitent au
contraire les parties iéptentrionales de l’Europe,
©u que du moins elles y font plus nombreûfos &
qu’elles ne palfent dans les pays méridionaux que
dans certaines circonftances ; il en eft de même
des montagnes fur lefquelles on les trouye très-
farement; les contrées oh elles font plus communes
| font les Pays-Bas, l’Allemagne , la Pologne ; ou
dit qu’elles paffent deux fois régulièrement en
France au printemps & à l’automne ; on ne les
voit guère dans d’autres de nos provinces, que
la Lorraine , la Champagne 6c le Poitou ;.je. crois
qu’elles n’y font pas de paffage 6c qu’elles y habitent
toute l’année , ou qu’au moins il en refte
quelques - unes : j’ai vu en. différens temps trois
outardes qui avoient été' prifes fort jeunes en été
cians les plaines de la. Champagne ; ainli il refte
au moins quelques couples qui y font leur nid ;
toutes les lois que l’hiver eft rigoureux, & qu’en
meme-temps la terre eft couverte de neige pendant
quelques jours , ce qui eft plus ordinaire dans
le mois de janvier qu’en, tout autre temps , ' on
apporte au marché de Paris dès outardes en. plus
ou moins grand" nombre , 6c les marchands, auxquels
je m’en fuis informé , m’ont toujours dit
qu’elles étoiènt apportées de Champagne ou de
Picardie ; il"le peut quelles y paffent en plus
grand nombre des Pays - Bas 6c de l’Allemagne
dans les temps de difette ;mais on peut croire auffi
qu’on les prend alors en plus grand nombre , parce
que , comme tous les autres animaux , la faim les
rend moins méfiantes; enfin lès outardes ne font
pas rares non plus .dans la grande Bretagne.;
1 efpèce s’.y eft fans doute trouvée enfermée. 6c
s’y eft confervée depuis l’irruption des mers qui
ont léparé cette île tameufë d’avec le continent.;
car malgré le peu d’étendue. du détroit, qui l’en
fcpare , il n’éft pas vraifemblablé qu’un oifeau aufii
pelant puiffe lè franchir.
La cliair des outardesfür-tout dés jeunes , paffe
pour un très-bon gibier ; on parle très-fouvent de
la ^différence qu’il y a entre la chair des ailes 6c
celle de la cuiffe ; il n’y a guère pourtant à cet
égard que celle qu’on trouve entre la chair des
mêmes parties fur la plupart des oifeaux ; c’eft*
à-dire que celle des ailes eft plus blanche , plus
longue, plus tendre & moins fapide ; crue celle
des cuiffes eft plus courte , plus brune , plus ferme
6c a plus de faveur.
Je ne terminerai pas l’article de Youtarde fans
remarquer combien il feroit avantageux de rendre
cet oifeau domeftique ; celui qui y parviendrait
feroit à la fociété un préfent oeconomique au-deffus
du don qui lui a été fait en lui procurant le dindon,
fi on a égard à la groffeur 6c à la bonté de la chair
de lW t f r ^ m a i s iïpdraît que ne pondant que deux
oeufs, ce produit borné diminuerait l’avantage de
l ’acquifition ; cependant il eft très - probable que
Youtarde, fi elle ne couvoit pas, pondrait, comme
tous les autres oifeaux un plus grand nombre d’oeufs ;
d’ailleurs il me femble qu’on n’eft pas allez fûr
qu’elle n’en ponde que deux & qu’ellq ne faffe
qu’une ponte , pour que cette partie de fon histoire
ne fouffre pas encore quelques doutes qu’il
forait important d’éclaircir ; mais en ne fuppolani
dans 1 état de liberté qu’une ponte de deux oeufs
& la faifon des amours palfée dans les foins de
l'incubation , il eft très-probable que la ponte de
Y-outarde qui ne couverait pas, feroit plus abondante.
L’avantage qui en réfulteroit, devroit porter
à en faire l’effai Ôc tout femble annoncer qu’il doit
réuffir par raport à un oifeau granivore &. herbivore
, habitant par lui - même d’un climat oh il
n’éprouverait d’autre changement que la perte de
la liberté qu’il ne faudrait pas lui .faire fentir trop
vivement d’abord ; d’ailleurs , cet oifeau , malgré
fon caraélère naturellement fauvage, s’apprivoife
aifément pris jeune ôc fe fait fi bien à vivre avec
d’autres oifeaux , même à l’étroit, que j’ai vu
long-temps dans la boutique d’un oileleur une
outarde qui y avoit été élévée ôc qui y demeurait
fans être enfermée.
O u t a r d e ( p e t ite ) , v u lg a ir em e n t c a n e
PETIERE.
PI. enl. 25 le mâle , 10 la femelle.
B r i s s . tom. V3 pag. 24 , p i . I l , fig. 1 le mâle ,
a.la femelle , genre LX V I. -
Canepetiere. B e l . hijl. nat. des ôif.pag. 237 , fig.
de la femelle, pag. 258.
Cane petiere , n om m é e p a r aucun s olive. B e l .
portr. d’oif. pag. 56.
Cane pétrace. S a l . hifi. des oif. pag. 13 5 .
Cane petrotte en Berri.
Il y a fort peu de noms auffi mal appliqués
que celui de cane donné à Là petite outarde ,
puifque cet oifeau n’a aucun raport avec le canard ,
& que cette dénomination ne peut qu’en donner
une faûffe idée ; c’eft une véritable outarde, mais
beaucoup plus de moitié plus petite que la grande ,
dont elle a d’ailleurs tous les cara&ères ôc une partie
des mêmes habitudes.
La petite outarde eft à-peu-près de la groffeur
d’un faifan ; fa longueur eft de dix-fept pouces
du bout du bec à celui de la queue ; elle a deux
pieds huit pouces ôc demi de vol , ôc fes ailes
pliées atteignent un peu au-delà des trois quarts
de la queu® : le plumage du mâle 6c celui de
la femelle font fort différens, ôc, à quelques égards,
celui de la femelle eft le plus brillant, contre ce
qui eft ordinaire aux oifeaux. •
Je commence par décrire le mâle : il a le deffus
de la tête couvert de plumes noires , marquées
chacune d’une ligne rouffeâtre, félon la longueur
de la tige ; les cotés de la tête 6c la gorge d’un
rouffeâtre - çlair fetné de taches longitudinales
noirâtres ; le cou noir , orné d’un collier blanc
au-deffous de la gorge , lequel remonte vers les
cotés & gagne jufques derrière la tête , en fe rétré-
ciffànt ; une bande noire , qui eft au-deffous de
<"e collier, eft parfemée de quelques taches rouf-
foâtres ; plus bas font deux bandes tranfverfales ,
une blanche, 6c au-deffous , près de la poitrine,
une noire ; le dos , les plumes fcapulaires , les
petites couvertures du deffus des ailes 6c de la
queue, le croupion , font femés de taches noires ,
fur un fond varié de fauve , de noir, de rouffeâtre
& de très-peu de blanc, difpofées 6c tracées en
zigzags ; les grandes couvertures du deffus de la
queue font blanches; c’eft aufii la couleur de la
poitrine, du ventre 6c de la partie des jambes,
qui eft garnie de plumes, 6c celles des couvertures
du deffous de la queue , lefquelles font de plus
rayées de noir tranfverfalement ; les grandes couvertures
du deffus des ailes font noirâtres, terminées
de blanc ; le pli de l’aile eft blanc ; l'aile eft
compofée de vingt-lept pennes ; les quatre premières
ou les quatre plus extérieures , font blanches
à leur origine , noirâtres dans le refte de leur
longueur ; les fix fuivantes font blanches, marquées
vers leur extrémité d’une large bande tranf-
verfale noirâtre ; à compter de la onzième à la
vingt-unième, les onze pennes intermédiaires font
blanches ; mais la dernière eft variée de fauve 6c
de noirâtre dans fonmilieu ; enfin les fix plus
près du corps font variées des mêmes couleurs
que le dos ; de dix-huit pennes qui compofent
la queue, les quatre intermédiaires font fauves,
variées de larges bandes tranfverfales noirâtres ,
6c entre ces b a n d e s i l en court d’autres plus
étroites de la même couleur, tracées en zigzags ;
les pennes latérales font blanches 6c variées de
petites bandes noirâtres qui s’étendent en différens
fens 6c de plus d’une large bande de la même
couleur vers l'extrémité de chaque plume ; le bec
eft d’un gris-brun ; le bas des jambes ôc les pieds
font gris.
La femelle, quoique d’un plumage très-différent
de celui du mâle, n’exige pas une longue d é fe c tion :
elle a le deffus.de Ja tête varié de noir &■ de
rouffeâtre , fuivant Je fens des plumes ; fo cou
rouffeâtre , marqué de brun fur le milieu de chaque
plume ; la gor^e d’Un blanc-rouffeâtre ; le deffus
du corps varié de bandes tranfverfales noires
fur fond jaunâtre, &. beaucoup plus reffemblant
en cette partie à la grande outarde qu’à fon mâle ;
la poitrine d’un blanc - rouffeâtre variée de bandes
noirâtres , tant longitudinales que tranfverfales ;
le ventre blanc ; les côtés 6c les couvertures du
deffus 6c du deffous de la queue d’un blanc rayé
tranïVerfalement de noirâtre ; les pennes de l’aile
jôc fes 'çouvertm-es fupérieures blanches , rayées
tranfverïalement de noirâtrè.
La petite Outarde eft un oifeau rare, qui n’eft
guère connu que dans quelques provinces de
France ; ce font la Beauce, le Maine, la Normandie
, le Berri 6c le Poitou. Cependant ce même
oifeau , qu’il paraît qu’on ne voit pas dans les
autres contrées de l’Europe , eft de paffage dans les
pays où on a coutume de le trouver ; la petite outarde
y arrive au mois d’avril, 6c fe retire à la fin
de feptembre ; elle fe plaît dans les terres maigres
6c pierreufes, 6c, fuivant M. Salerne, les infeétes
font fa nourriture principale ; mais il paraît qu’elle
pâture auffi l’herbe tendre 6c qu’elle mange du
grain ; on prétend qu’elle ne fe tient que dans les
avoines 6c jamais fur les terres couvertes d’autres
grains. Suivant M. Salerne ces oifeaux commencent
O o ij