
tantôt l’équipage qui y fert: cependantle mot vo/eft j
d’un ul'age plus fréquent dans ces deux derniers cas. !
La fauconnerie, coniidérée comme un art relatif
aux oifeaux , a pour objets, le choix qu’on en fa it,
la manière de les drefier , les foins qu’on en prend
en fanté ou en maladies
Ce fimple énoncé l'uffit pour faire voir que les
hommes le font occupés “longtemps de la fauconnerie
& qu’ils l’ont traitée comme un art important.
C ’en étoit un tel en effet pour nos aïeux : depuis l’u-
fage des armes à feu , ce n’eft pour nous qu’un art
d’amufement, pour nos rois le moyen de leur procurer
un divertilfement qu’ils prennent quelquefois
& lorfqu’ils fe montrent dans tout l’appareil de leur
puiffance , l’équipage de la fauconnerie eft un refte
de la magnificence de leurs ancêtres qu’ils ont con-
confervé parmi les autres lignes extérieurs qui annoncent
leur pouvoir. En Allemagne où les moeurs
ont moins changé , où avec de moins grandes pof*-
feffions, un plus grand nombre d’hommes partagent
les titres, les droits & l’extérieur des-fouverains, la
fauconnerie eft encore un art en honneur.
Je traiterai fucceffivement dans cet article des
parties de la fauconnerie, afin que ce que la nature
de l’ouvrage auquel je travaille me permet d’en
d ir e , préfente fur cet art un précis aufti complet
qu’il m’a été poffible de le rédiger*
Si la fauconnerie, utile dans les fiècles paffés,
cultivée avec foin par nos pères, d’un avantage
fort borné pour nous, & prefque oubliée de nos
jours, ne fixe pas notre attention comme un art
néceffaire , elle la mérite comme un art curieux ,
comme un de ceux qui atteftent. l’induftrie & le
pouvoir de l’homme. Il établit en effet , fon
empire , il l’exerce à la faveur de la fauconnerie
fur les êtres les plus indépendant, fur ceux à qui
fa prote&ion eft la plus inutile, qui ont le plus ■
de moyens de fubvenir à leurs 'befoins, de fe
fouftraire à fon jo u g , le moins de dangers à
courir avec plus de reffources pour y échapper ;
il affervit les caractères les plus indociles ; il
fix e , il rend fédentaires les êtres les plus inconf-
tans| les plus accoutumés à changer de lieu , les
plus avides de la liberté, ceux qui en fouftrent
le plus impatiemment la perte dans le. premier
effai qu’ils font de la captivité ; il change le naturel
,'fans altérer le mécanifme ; & après avoir, par
la force ou par la protection qu’il accorde, fub-
jugué les animaux attachés comme lui à la te rre ,
l’homme étend, par le moyen de la fauconnerie,
fon empire fur les habitans de l’air ; ils diftin-
guent fa voix, ils la reconnoiffent, ils y font dociles,
elle détermine leur volonté & dirige leurs mouvements,
ati-deflùs de lui, dans un éloignement où
il n’a nul moyen de les atteindre, au milieu de
l’efpace où ils font libres, qu’ils ont été accoutumés
à traverfer, & dans lequel ils ne fembloient que
deftinés à fe jouer & à ne s’y mouvoir qu’à leur
g ré , fans reconnoître d’autre loi que celle de leur
volonté,
Tous les oifeaux de proie ne font pas propres'
a la fauconnerie ; on n’y employé que les efpèces
qui ont des qualités dont la privation fait négli—
ger les autres. Ces qualités font la rapidité du
v o l , l’agilité & la foupleffe des mouvemens, le
courage ou l’acharnement à pourfuivre la proie;
Ces qualités dans les oifeaux, comme toutes les
facultés -dans les animaux, dépendent de l’organi-
fation. La forme de l’aile rend le vol plus rapide
ou plus lent ; félon que la ferre eft plus longue
ou plus courte, elle a plus de force ; fui vant qu’elle
eft plus déliée ou plus maflive, l’oifeau manie
mieux fa proie ; il l’attaque avecplus d’avantage
& plus d’adreffe. Celui dont l’aile & la ferre, favorablement
conformées , rendent , l’une fon vol
facile & p rompt, l’autre fon attaque ailée &. fure,
pourfuit'la proie avec ardeur; en la joignant il
fond fur elle avec la confiance qu’infpire l’habitude
de la viCloire, & les difficultés que lui font éprouver
la vitefle, les rufes ou la force de fon ennemi
, ne font qu’irriter le courage d’un affaillant
accoutumé à vaincre ; il s’acharne fur fa proie à
proportion de la réfiftânce qu’il éprouve , 6c qui
ne fait que l’encourager. L’oifeau de proie, ati
contraire, à qui la nature a moins accordé d’avan-
tages, fe rebute aifément, il fe lalfe bientôt d’une
pourlùite qui le fatigue, & dont la durée plus
grande a fouvent .'été fans fuccès ; il fe refufe
dans l’attaque à des efforts -“pénibles, qui në lui
ont que rarement procuré la' vi&oire. Le premier
ne revient jamais que vainqueur , & le fécond
retourne fouvent fans avoir engagé le combat. Il
eft donc important de . nous former une idée
jufte de la conformation de l’ailé & de la ferre
«dans -les oifeaux de proie, puifqu’elle nous indique
leurs qualités, qu’elle nous fait diftinguer ceux qui
font les plus propres à la fauconnerie ; les oifeaux
qu’on y peut employer, quoique moins utilement,
& ceux qu’on doit en exclure.
Les auteurs anciens qui ont écrit fur la faucon-
nerie, n’en ont traité que la partie méchànique.
Un fçavant a , de nos jours, approfondi & développé
la théorie de cet art qu’ori avoit prefque
oublié : M. Huber , citoyen de Genève , qui
réunit à une imagination aéiive le talent d’obfer-
v e r , s’eft occupé de la fauconnerie - en homme de
génie, en obfervafeur qui compare les produéfions
de la nature, qui lie les connoiffances, les augmente
les unes par les autres , & qui, dans une
découverte qu’il vient de faire, reconnoît la route
qui conduit à une découverte nouvelle : il a
compofé un ouvrage qu’il n’a pas encore publié ,
mais dont il a bien voulu me communiquer un
précis, & je lui fuis redevable d’une grande partie
des chofes que j’expoferai dans cet article.-
Ce fçavant divilè les oifeaux, en confidérant
la conformation de leurs ailes, en rameurs & en
voiliers ; en s’occupant de la conformation de leurs
ferres, en jiobles & ignobles.
I Les rameurs s’élèvent dans les hautes régions
l’air , ils y pourfuivent, attaquent & faififfent
leur proie à toutes lès hauteurs, où ils fondent
fur elle comme un trait. Aucun des êtres qui tra-
verfent les airs ne leur peut échapper, foit qu’ils
cherchent leur fureté en s’élevant , ou qu’ils fuient
en côtoyant la furface de la terre : les oifeaux
rameurs doivent leurs avantages & la vi&oire , qui
les fuit par-tout, à leur feule conftitution. Les
voiliers rie s’élèvent qu’à une hauteur moyenne
pour découvrir une proie courante ou qui ne
s’élève jamais très-haut ; ils la pourfuivent à tire-
d’aile , cherchent à la joindre ou par viteffe ou
par des rufes, qui fuppléent en eux aux facultés
phyfiques.
L ’aile dans les rameurs eft mince , déliée, peu
çpnvexe , & fortement tendue quand elle eft
déployée.
Dans les voiliers elle eft plus épaiffe, maffive,
arquée & moins tendue pendant le vol.
Dans les rameurs les dix premières plumes de l’aile
font entières ; elles conftituent proprement la rame
& forment un plan continu, parce que les' plumes fe
touchent les unes les autres dans toute leur longueur,
à la faveur" de leurs barbes égales dans
le trajet du tuyau. Dans ces.oifeaux la première
plume de l’aile eft plus courte que. la fécondé : on
la nomme cerceau ; la fécondé eft la plus longue.
Dans les voiliers les cinq premières, plumes de
l’aile font échancrées , depuis leur milieu juf-
qu’à leur extrémité. Ces cinq plumes font d’une
longueur inégale. La première eft beaucoup plus
courte que les autres, la quatrième eft la plus
longue. L ’extrémité de cette aile , qui eft la partie
la plus importante pour le v o l , forme une furface
interrompue, entrecoupée par des ouvertures ou
échancrures.
Les mouvemens de la première efpèce d’aile,
mince, pleine, fortement tendue, mue par une
puiffance a ftiv e , font aifés, rapides, forts, ils
ont un effet complet ; ceux de la fécondé efpèce
d’aile maffive, convexe, entr’ouverte par des
échancrures, mue mollement par des forces moins
énergiques, font pénibles, lents, ont moins d’action,
& produifent moins d’effet.
Les oifeau^ rameurs 5 à la faveur de la conformation
de leurs ailes-, volent contre le v ent, la
tête haute & portée en-avant ; ils s’élèvent fans
peine dans les plus hautes régions , où ils fe jouent
dans tous les fens & fe portent de tous les côtés :
les voiliers, au contraire , ne volent avec avantage
que vent arriéré , la tête baffe & inclinée ; ils ne
s’élèvent que pour découvrir leur proie.
Les fauconniers avoient remarqué la différence
du vol que nous venons d’indiquer ; mais ils n’a-
voient. confidéré que l’effet, fans en rechercher
les caufes; ils défignent fous le nom d'oifeaux de
haut vol ou de leurre , ceux que M. Huber
appelle rameurs ; & fous celui d’oifeaux de bas
vol, de baffe volerie ou de poing, ceux que M. Huber
nomme voiliers, & auxquels il donne auffi le
nom d'oifeaux planans. Cette dernière dénomination
peint bien leur v o l , lorfque les ailes étendues
, immobiles , foulevées par le v en t, ils font
portés fuivant fon cours •, fans aftion de leur part,
ou au moins avec une aâion très-bornée.
Les oifeaux de haut vol & ceux de bas vol > ou
les rameurs & les voiliers , ne diffèrent pas moins,
par la conformation de la ferre que par celle des
ailes.
La ferre , dans les oifeaux de proie , eft une
main ; mais c’eft une main armée, qui empoigne,
bleffe , & qui réunifiant encore les avantages
que le pied peut fournir, preffe & comprime du
poids de tout le corps.. C’eft ce rapport avec
la main &. le pied tout-à-la-fois , qui a fait donner
le nom de talon au doigt de la ferre le plus
court, de long-doigt à celui qui excède les autres,
de petit doigt à celui qui eft externe , de pouce au
doigt le plus interne & porté en même-temps en-
avant. Les ongles plus ou moins longs, arqués ,
aigus, qui terminent les doigts , font les inftru-
mens offenfifs dont la ferre eft armée.
Toutes ces parties concourant enfemble dans
l’attaque , à proportion qu’elles font mieux conformées
pour le but auquel elles font deftinées ,
l’oifeau affaillant a plus d’avantages. •
Des doigts plus longs, plus déliés, font plus
fouples , plus agiles, plus forts : ils embraffent
une furface plus étendue ; mus par un levier
plus long, ils étreignent plus fortement.
Des ongles plus arqués, plus acérés, pénètrent
plus facilement, plus promptement & plus profondément,,
ils arrêtent plus aifément, ils retiennent
plus fortement, & font une plaie plus dan-
gereufe.
Un pied conformé de façon que le poids du
corps fe concentre en un point qui fert de bafe,
prelfe & comprime davantage que celui dans
lequel le poids du corps fe partage fur une plus
grande furface. N
Tels font les avantages réunis dans la ferre des
oifeaux de haut vol ou rameurs. Traités plus favorablement
pour la pourfuite par la conformation
de leurs ailes, ils ont pour l’attaque des armes
plus aifées .à faire agir & d’un effet plus affiné.
Ils doivent leur fupériorité, fur-tout, à la longueur
de leurs doigts : on les reconnoît à ce caradtère :
M. Huber les confidérant fous ce point de vue ,
les a nommés oifeaux nobles, & il appelle oifeaux
ignobles ceux dont les doigts font courts & maffifs.
Ces qualités & ces défauts admettent néceffaire-
ment des degrés. Ainfi les oifeaux nobles ont tous
les doigts longs & déliés , les" oifeaux ignobles les
ont gros & courts. Mais les uns & les autres,
d’après la conformation de leurs doigts plus ou
moins parfaite ou imparfaite, doivent être placés
dans différens rangs de leur claffe ; le faucon , par
exemple, à la tête des oifeaux nobles, & la bufe
au dernier degré des oifeaux ignobles.
Tous les oifeaux de haute volerie ou rameurs