
trouvent .fur la partie voifine du dos font au
nombre de huit, 6c garnifïent cette partie, comme
on l a dit, de plufieurs arrêtes un peu comprimées.
Les quatorze fuivans forment fur les lignes externes
des côtés deux rangs de faillies, produites
par des écailles triangulaires , qui font paroître la
queue de part & d’autre comme dentée ou garnie
de crêtes. Ces deux rangs d’écailles convergent &
le réunifient en une faillie unique & toujours dentelée
, qui s’élève lur le milieu du relie de la queue.
( Nota. On voit par cette defcription comparée à
la précédente , qui ell de Linnæus, que le nombre
des fegmens dont il s’agit varie dans les différens
individus ).
Les pieds de devant font palmés & fendus en
cinq doigts , dont les trois premiers feulement font
garnis d’ongles. Les pipds de derrière font moins
leniiblement palmés & ont quatre doigts , dont
1 extérieur ell dépourvu d’ongle.
La couleur du corps ell cendrée ou plutôt livide*
marquée de plulieurs bandes tranfverfales & ondées
, dont la première ell fur le cou , la fécondé
entre les pieds de devant, la troilième & la quatrième
font fur le dos , la cinquième ell avant les
cuifles, la lixième derrière les cuiffes, la feptième
& toutes les autres jufqu’au -nombre de quatorze
entourent la queue. L in . Aman. Acad. ~
On apporta à Verfailles vers la fin de l’année
16 8 1 , un Crocodile qui a vécu encore près d’un
mois. Le fpeélacle de cet animal vivant , déjà fi
propre par lui-même à exciter la curiofité, parut
fur-tout extraordinaire par la çirconflance de la
failon ou l’on étoit alors & par celle du climat. Car
le froid ell tellement contraire au Crocodile, qu'en
Egypte même* cet animal, au rapport des auteurs,
ne peut palfer les nuits d’été que dans l’eau, qui
alors ell beaucoup plus chaude que l’air. Ceux qui
avoient apporté par terre depuis la Rochelle le
Crocodile dont il s’agit ic i, dirent qu’ils l’avoirnt
cru mort plulieurs lo is , & n’avoient pu le faire
revenir qu’en le mettant auprès du feu. On ne
l’a point vu manger depuis Ion entrée en France,
& on ne lui a trouvé dans le ventricule que du
fablon & de petits limaçons dans leur coquille *
gros environ comme des pois. Ce Crocodile ell
décrit dans les Mémoires pour fervir à l’Hilloire
Naturelle des animaux, rédigés par M. Perrault,
de l’Académie des Sciences.Nous allons donner un
extrait de cette defcription que l’on pourra comparer
avec celle de.Linnæus.
Ce Crocodile étoit fort jeune & n’avoit que trois
pieds neuf pouces & demi de longueur. La queue
étoit aulfi longue que le relie du corps, qui, dans
fa plus grande largeur , c’ell-à-dire , à l’endroit du
ventre, avoit cinq pouces & demi. Les jambes de
devant, depuis le corps jufqu’au bout des ongles,
avoient fix pouces & demi, & celles de derrière
fept pouces & demi: La tête étoit longue de fept
pouces. La longueur des y e u x , depuis un angle
jufqu a l’autre, étoit de neuf lignes ; il n’y avoit
pas entre eux un pouce de dillance : ils étoient
litués dans un même plan fur la tête , qui étoit
fort platte.
La plupart des auteurs font le Crocodile jaune*
&. difent que ce nom lui a été donné à caufe de fa
couleur dé faffran. Ariflote prétend qu’il ell noir,
car il dit que le Caméloon devient quelquefois
noir comme le Crocodile. Celui que l’on décrit ici
avoit deux couleurs ; le deffus de tout le corps étoit
d’un gris-brun verdâtre , mêlé en plufieurs endroits
d’un verd-pâle. Ces deux couleurs repréfentoient
allez bien le bronze un peu rouillé. Le deffous du
corps & de la queue , ainfi que le dedans des
jambes & le delfous des pieds étoient d’un blanc
un peu jaunâtre. Les ongles avoient la même couleur
que le deffus du corps. Les dents étoient
blanches.
Tout le corps étoit ‘couvert d’écailles , à la
réferve de la tête , qui n’avoit que la peau collée
immédiatement fur l’os * la chair des mufcles cro-
taphites étant cachée dans les trous des oreilles.
Ces écailles étoient de trois fortes. Celles qui
couvroient les flancs, les jambes, & la plus grande
partie du cou étoient de figure à-peu-près ronde,
de grandeurs différentes & diftribuées irrégulièrement
: toutes les autres avoient une figure & une
difpofition plus régulièie : elles étoient de deux
efpèces. Celles qui couvroient le dos * le milieu
du cou & le deffus de la queue n’étoient point
féparées les unes des autres comme celles dont
on a parlé d’ab o rd ; mais elles formoient des
bandes qui traverfoient le corps en allant d’un des
flancs à l’autre, &. fur ces bandes il y avoit des
gravures ou filions tellement dilpofés , que tous
les petits efpaces intermédiaires repréfentoient
des écailles rondes qui .n’étoient point en recouvrement
comme les tuiles d’un toit, ainfi qu’on
l’obferve dans les autres animaux à écailles , mais
tous les entre-deux étoient au droit l’un dè l’autre ,
enforte que les écailles formoient des rangs félon
la longueur du corps par le moyen des gravures,
de même que les bandes en formoient d’autres
en-travers ;-mais les féparations des bandes étoient
bien plus vifibles que celles des écailles qui n’étoient
diflinguées que par les gravures, au lieu
que les entre-deux des bandes étoient formés par
la peau nue de l’animal.
Cette flruélure ne s’accorde pas avec ce qui
efl dit dans les nouvelles relations, que pour bief-
fer le Crocodile, foit avec des armes à feu, foit
avec des piques*il faut le frapper de derrière en-
devant ; cela feroit vraifemblable * fi fes écailles
fe recouvraient comme les tuiles d’un toit : mais
il efl certain , qu’étant pofées feulement l’une à
côté, de l’autre, comme des carreaux, il faut, pour
percer le Crocodile, le frapper perpendiculairement
dans les jointures des bandes oh il n’y a que de
la peau : car ces bandes font comme impénétrables,
leur fubftance qui paroît moyenne entre celle de
l’os 6c du cartilage ayant une dureté qui furpaffe
de beaucoup celle des os les plus durs, & une
flexibilité qui les empêche d’être caffantes comme
les cartilages.
Sur le dos, au milieu de chaque écaille , il y
avoit une crête comme pour la fortifier. Lés crêtes
étoient moins élevées fur les écailles du dos que
celles qui étoient vers les flânes, parce que cet
endroit doit être mieux armé, comme étant plus
expofé aux coups que le dos. Sur les côtés de la
queue, qui commence au-delà des pjéds çle derrière,
il y avoit deux rangs de cés crêtes fort
élevées ; ces deux rangs * à un pied de diflance
du bout de la queue , s’uniflbient de manière que
de là jufqu’à Ton extrémité il n’y avoit plus qu’un
rang de crêtes qui s’élèvoit par-deffus. En cet
endroit la queue étoit platte lupérieurement, de
même que le rëfl'e & le dos aùfli ; mais en-deffbus
elle n’étoit platte que vers l’extrémité qui étoit
en même temps très-flexible ; la partie antérieure
étoit arrondie ainfi que le . ventre. Ceÿ*e .figure
de la queue qui donne au Crocodile de la facilité
pour nager , efl allez femblable à celle d’un
aviron, qui de rond qu’il efl vers le milieu, va
en s’applatiffant vers Ion extrémité.
Les écailles qui garniffoient le ventre, le deffous
de la queue , le deffous du cou 6c de la mâchoire,
le dedans des jambes & le deffous des pieds étoient
d’une troifième efpëce. Elles étoient flexibles , fans
crêtes , 6c difpôléés comme des'carreaux, ainfi
que celles du dos ; mais elles ne formoient pas de
bandes, étant féparées fenfiblément les unes des
autres* & jointes feulement par de forts ligamens.
Leur figure étoit quarrée, &. leur fubffance n’avoit
pas l’impénétrabilité de celle du dos. Pline ,
\Hiß. Nat. Liv. 8 , ch. 2 4 ) , dit que le Dauphin
perce le ventre du Crocodile à l’aide d’une crête
qu’il a fur la tête.
Sur le bout du mufeau * qui étoit pointu, il y
avoit un trou rond, reiiipli d’une chair molafle ,
tout le refie de la tête étant dégarni de chair,
ainfi qu’il a été dit. Cette partie charnue étoit percée
de deux petits trous en forme de croiffant :
c’étoient lesL narines" de l’animal.
Les yeux étoient longs, 6c avoient leur grand
angle tourné vers le mufeau, 6c le petit vers le
haut de la tête. Les paupières étoient grandes :
celle de deffus avoit quatre lignes , & l’inférieure
trois lignes. Elles étoiènt toutes deux également
mobiles , ce qui ne s’accorde pas avec ce que dit
Pline.( id. liv. 1 1 , ch. 37 ) , que tous le s . quadrupèdes
ovipares n’ont que la paupière inférieure de
mobile. Ces paupières étoient l’une 6c l’autre affez
dures 6c fe pliffoient difficilement. Elles n’avoient
point de cils ; elles étoient feulement dentelées
-en leurs bords : il y avoit aufli au haut de l’orbite
un rang dentelé qui fervoit de fourcil comme au
Caméléon , avec cette différence néanmoins que
dans le .Caméléon ces dentelures font formées par
l’os , $c dans le Crocodile feulement par la peau,
repliée. La paupière interne dans l’animal mort
couvroit tout l’oeil, & il falloit la retirer vers le
grand angle.de deffus la prunelle ,fur laquelle elle'
retournoit d’elle-même.
-Les ouvertures des oreilles qui étoient au-deflus
des yeux* étoient cachées & recouvertes par la peau
qui formoit comme deux paupières exaélement
fermées. C’efl ce qui a fait croire à Albert ( liv. 24
de Anim. ) , que le Crocodile n’a point d’oreilles,
parce que le Lézard , qu’il dit être en tout femblable
au Crocodile , a ces ouvertures fort grandes
6c fort vifibles. Hérodote au contraire ( liv . 2 ) ,
femble donner des oreilles externes au Crocodile *
quand il dit que les Egyptiens habitans de Memphis
ont dès Crocodiles privés à qui ils mettent des
pendaris d’oreillé.
Les dents étoient au nombre de foixante & huit,
quinze de chaque côté à la mâchoire d’en - bas ,
6c dix-neuf à chaque côté de la mâchoire fupérieure.
Elles étoient dè grandèur différente ; lès
plus longues font apparemment celles que Pline,
( Hift. Nat. ibid. ) , appelle les canines, & qu’il dit
avoir la vertu de guérir les fièvres intermittentes ;
quoiqu’à parler exactement * toutes les dents du
Crocodile étant également pointues * il n’y en a
point qui puiffent proprement être appellées canines.
Cette figure làifie encore moins d’apparence
que l’on ait pu trouver da>s cet animal les molaires
dont Pline parlé encore, & qui fe voyent à
une efpèce de Crocodile qui efl à Poitiers dans la
grande falle du préfidiàl.
Toutes les dents étoient un peu courbées vers
le gofier, principalement celles qui étoient vers
le bout du mufeau; leur difpofition étoit te lle ,
que quand la gueulé étoit fermée , elles paffoient
les unes entre 4es autres, & les pointes des dents
de la mâchoire fupérieure entroient dans les trous
creufés dans les gencives de la mâchoire inférieure,
le refie paffant entre les dents de l’autre mâchoire
| qui n’étoient pas jointes les unes aux autres,
quoiqu’elles paruffent l’être, lorfque la gueule étoit
fermée; car alors , comme l’animal n’a point de
lèvres* 6c que toutes les dents fe voyent à découvert
, tout paroît rempli, les dents inférieures
occupant les intervalles de celles d’en-haut , 6c
j celles-ci étant logées dans lès interflices des infé-
! rieures. La racine étoit plus groffe 6c plus longue
que le refie de l a . d|ént ; elle étoit creufe de manière
que fa cavité alloit en pointe, & pénétroit
jufques dans le corps de la dént ; cette cavité a
été remarquée par Pline. ( Hifl. Nat. ibid. ).
Beaucoup d’auteprs ont écrit que la mâchoire
fupérieure du Crocodile étoit mobile, contre l’ordinaire
dè ce qu’on obferve dans l’homme & les
animaux, dont la mâchoire inférieure efl la feule
qui ait du mouvement. Cette partie a été examinée
avec'/oin dans le Crocodile dont il s’agit,
aififi que dans plufieurs autres, & l’obférvation a
prouvé que lé fait dont nous parlons étoit dénué
de fondement. Le Crocodile a la mâchoire inférieure
feule mobile comme les autres animaux,