
128 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e :
'• A l’exemple des millionnaires de Friiè, deux prê-
■ très Anglois , qui avoient long-tems demeuré en
Irlande , palïèrent en Germanie, chez les peuples
qu’ils nommoient les anciens Saxons , parce que
ceux de la grande Bretagne en étoient yenus. Ces
prêtres fe nommoient tous deux Evalde, mais pour
les diftinguer on nommoit l’un le blanc l’autre le
noir , fuiyant la différence de leur poil. Etant entrez
chez un Fermier , ils le prièrent de les faire
conduire au ièigneur dupais, ce qu’il leur promit,
ôc les retint quelques jours. Cependant les barbares
s’apperçurent que ces deux étrangers étoient
d’une autre religion : car ils s’appliquoient continuellement
à la pfalmodie & à la priere, & offroient
tous les jours à Dieu le faint iàcrifice : portant avec
eux des.vaiès iaçrez, & une planche coniàcrée qui
leur feryoit d’autel. C’efl la première fois que je
trouve un autel portatif. Les barbares craignirent
que il ces étrangers parloientà leur ièigneur, ils ne
le fiffent Chrétien, & que tout le pais petit à petit,
ne fut contraint à changer de religion. Ainfi ils les
prirent bruiquement, & les, firent mourir, ils tuèrent
Eyalde le blanc d’un coup d’épée ; & déchirèrent
Evalde le noir par de longs & horribles tour-
mens. Le ièigneur l’ayant appris fut tellement irrité,
de ce qu’on n’avoit pas lailïe venir vers lui ces étrangers
: qu’il fit brûler le village, & tuer tous les ha-
pitans. Les corps des martyrs jettez dans le Rhin
furent découverts, par une lumière miraculeuiè
que leurs meurtriers virent eux-mêmes , & Pépin
les fit apporter honorablement à Cologne.'
L egliiè
L i v r e q u a r a n t e-u n i e ’ m e . 119
L ’églife honore leur mémoire le cinquième d’Oélo-
bre, qui fut le jour de leur martyre.
Saint Villebrod alla prêcher l’évangile même
dans la partie de Fjife qui obéïifoit à Ratbod; &
ce prince le reçût avec honneur, mais il ne profita
poiqt de fes inftru&ions. Le faint évêque paifa chez
íes Danois, peuples très-farouches, à qui comman-
doit Ongende plus cruel que toutes les bêtes ; il ne
lailfa pas de le traiter avec honneur , mais il de-
meura-endurci ; & faint Villebrod voyant qu’il n’y
avoit rien à efperer en ce païs, fe contenta d’en
amener trente jeunes enfans fie retourna en France :
mais craignant les accidens d’ un fi long voyage, il
les inftruifit & les baptifa en chemin. Dans les confins
des Danois & d e s Frifons, étoit une ifle à l’embouchure
de l’Elbe , qui portoit alors le nom de
leurDieu Fofice.Les payensla reveroient tellement,
qu’ils n’ofoient toucher aux animaux qui y paif-
foien t, ni parler en puifant de l’eau d’une fontaine
qui l’arrofoit. Le faint homme ayant été jetté dans
cette ifle par latempê,tey demeura quelques jours
attendant le tems favorable. Il baptifa trois hommes
dans la fontaine, 8c fit tuer quelques animaux pour
les vanger. Les payens croyoient que ceux qui en
avoient mangé mourroient fubitement, ou que du
moins ils deviendroient furieux : mais voyant qu’il
ne leur en arrivoit aucun mal, ils furenr étonnez,
& rapportèrent la chofe à leur duc Ratbod. Celui-
ci voulant vanger fes Dieux, fit jetter le fort trois
fois par jourpendant trois jours, fuivant l’ancienne
fupei fti tion des Germains, fur le faint évêque ôc fes
Tome IX. R
Martyr» R , j *
OB.
Vita c» ?»
C» IV»
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