
2^8 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e ;
non entant qu’il eft vifible , mais en tant qu’il
s’eft rendu vifible pour nous. Mais Dieu a dit par
Moïfe : T u ne feras point d’images. Apprenez comment
Mo'ife l’explique lui-même dans le Deucero-
nome : Le Seigneur nous a parlé du milieu du feu :
vous n’avez vu aucune image, vous avez feulement
oüi fa voixtde peur qu’en regardant le ciel,&voyant
le foleil, la lune & les étoiles, vous ne vous laiffiez
feduirepour les adorer &: les fervir. Voyez-vous
que fon deffein n’eft que devous détourner d’adorer
la créature au lieu du Créateur , & d’attribuer à
quelque autre qu’à lui le culte de latrie. Ce précepte
étoit donc pour les Juifs enclins à l’idolâtrie:mais
pour nous à qui il eft donné de connoître parfaitement
la nature divine , qui avons pafle l’enfance,
nous fçavons ce qu’il eft poflib le, & ce qu’il e.ft im-
poiïible de reprcfènter par des images. Comment
pourroit-on faire une image de celui qui n’a ni figure
, ni bornes ? ou peindre par des couleurs celui
qui n’a point de corps ? Mais depuis qu’il s’eft fait
homme, vous pouvez faire l’image de fa forme humaine.
Vous pouvez peindre fà naiflance de la
V ierg e, fon baptême dans le Jourdain, fa Transfiguration
fur le T h ab o r , fès tourmens, fà croix, fa fè-
pulture, fa Refurre&ion, fon Afcenfion. Exprimez
tout cela par les couleurs, auffi bien que par
les paroles. Ne craignez rien.
Il explique enfuite les différentes lignifications
du mot d’image & du mot d’adoration. Le Fils
de Dieu eft l’image vivante du pere. Les idées de
Dieu font les images des chofes qu’il veut faire»
L i v r e q u a r a n t e - d e u x i e ’ m e .
Les choies fenfibles font des images des chofes in-
fenfibles ; ainfi l’écriture pour s’accommoder à nôtre
foibleffe attribue quelquefois à Dieu ôc aux A nges
des figures corporelles. Ainfi pour reprefènter
la T r in ité , nous employons la comparaifon du foleil
, de fa lumière ôc de fon rayon : de la fource ôc
duruiffeau. Nous appelions encore image le figne
des chofes futures : ainfi l’arche d’alliance, la verge
d’Aa ron,& l'urne de la manne fignifioient lafainte
Vierge : le fèrpent d’airain fignifioit Jefus-Chrift en
croix : la mer 8c la nuée fignifioient le baptême. On
nomme encore images, ce qui conferve la mémoire
des chofes pafïees ; foit par les lettres, comme quand
Dieu écrivit fa loi fur des tables,8c ordonna d’écri-
rè la vie des hommes qui lui étoient chers : foit par
d’autres monumens fenfibles, comme l’urne Ôc la
Verge qu’il fit garder dans l’arche. Otez donc toutes
fortes d’images, 8c déclarez-vous contre celuiqui
les a fait faire, ou recevez-les toutes chacune comme
il lui convient.
L ’adoration fe prend en deux manieres. Il y a
celle que nous rendons à Dieu fèùl adorable par fà
nature, 8c qui s’appellelatrie : il y en a une autre que
nous rendons à caufè de Dieu à fès amis & à fès
ferviteurs : comme quand Jofue 8c David adorèrent
des anges, ou aux lieux 8c au x . choies confàcrées à
D ieu, ou aux princes qu’il a établis. Gomme quand
Jacob adora Efaü fon frere aîné, 8c quand jofèph
fut adoré par fes freres. Il y a auffi une adoration ,
qui n’eft qu’un honneur rendu réciproquement,
comme entre Abraham 8c les enfans d’Emor. Otez
L Tü j
Gernf. xxxiiia
Genef, xiYit