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de faint Pierre , & de tous les Romains, emmené
les beftiaux, eoupé les vignes jufques a la racine,
foulé les moilTons, enforte qu il ne nous refte plus
de quoi vivre. Ils ont égorgé quantité de ferfs de
faint Pierre & des Romains, & emmene les autres
en captivité : jufqucsaarracher du iein de leurmeie
les, enfans à la mammelle pour les egorger. Les
païens mêmes n’ont jamais fait tant de maux.
X V I I .
Lettre au nom
de faint Pierre.
Enfin le pape ufant en cette extrémité d’un artifice
fans exemple devant ni après dans toute l’hil-
$tep. tpift.s-,».', toire de l’églife, écrivit au ror & aux François une
çmoi. 5. lettre au nom de faint Pierre, le faifant parler luimême
, comme s’il eut encore e tefurla terre. Le
titre imité desépîtrescanoniques, commence ainfi :
Pierre appelléà l’apoftolat par Jefus-Chrift fils du
Dieu vivant. Il fait parler avec lui la Vierge , les
anges, les martyrs & tous les autres faims, afin
que les François viennent promptement au fecours
de la fource de leur régénération , Sc de leur mere
fpirituelle. Je vous conjure, dit-il, par le Dieu v ivant
, de ne pas permettre que ma ville de Rome S>C
mon peuple , foit plus long-temps déchiré par les
Lombards : afin que vos corps & vos ames ne foient
pas déchirées dans le feu eternel : ni que les brebis
du troupeau que Dieu m’a confie foient difperfees,
de peu qu’il ne vous rejette, Sc vous difperfecomme
le peuple d’Ifraël, Et enfuite : Si vous m’obéiffez
promptement, vous en recevrez une granderefom-
penfe en cette vie : vous furmonterez tous vos ennemis
, vous yivrez long-tems,, mangeant les biens
de la terre, & vous aurez fans doute la vie eternelle:
autrement
L i v r e q u a r a n t e -t r o i s i e ’m e . 385
autrement fçachez que par l’autorité de la fainte ------------
Trinité & la grâce de mon apoftolat, vous ferez A N. yyj.
prive du roïaume de Dieu & de la vie éternelle.
Cette lettre cil importante pour connoître le genie
de ce fiecle-là,& jufques.où les hommes les plus graves
fçavoient pouffer la fi&ion quand ils la croïoient
utile. Au refte elle eft pleine d’équivoques comme
les précédentes. L’églife y fignifie, non l’affemblée
des fideles : mais les biens temporels confacrez à
Dieu : le troupeau de Jefus-Chrift font les corps,
& non pas les ames : les promeffes temporelles de
l’ancienne loi font mêlées avec les fpirituelles de l ’évangile
; & les motifs les plus faints de la religion
emploïez pour une affaire d’état.
Pépin le rendit à des inftances fi preffantes : il xym.
L . r* 1 _ D o n a t io n d e
marcha en Lombardie avec toutes les troupes , & pcpiu.
lorfqu’il étoit prêt à y entrer, arrivèrent à Rome des -Amp.
ambaffadeurs de l’empereur Conftantin : fçavoir ,
Grégoire premier fecretaire & Jean filentiaire, en-
voïez vers le roi Pépin. Le pape les avertit de fa marche
qu’ils eurent peine à croire les envoïa en France
accompagnez d’un légat de fa part. Ils prirent
la meiüj & arrivèrent promptement àMarfeille, où
ils apprirent que Pépin étoit déjà fur les terres des
Lombards. Affligez de cette nouvelle , ils s’efforcèrent
de retenir par artifice le légat du pape à Marfeille
; & l’empêcher d’aller trouver le roi de France,
mais ils ne purent y réuffir. Grégoire l’un des
ambaffadeurs prit donc les devants, & aïant joint
Pépin près de Pavie, il le pria inftamment avec de
grandes promeffes, de rendre à l’empereur Ravenne
Tome IX . C c c