alimentaient le Cojeul restent taries depuis vingt ans, après avoir été
intermittentes depuis le x v i i i0 siècle ; à Héninel, le lit demeure desséché.
Enfin l’Escaut dont les premières sources furent àBeaurevoir,
au lieu dit Somescaut, les a reportées de 4 kilomètres en aval.
On voit par tous ces détails soigneusement vérifiés quelle généralité
prend dans le pays de craie le phénomène de l’abaissement de
la nappe aquifère. Si l’on parcourt le pays ou même si l’on regarde
la carte, on est amené à cette conviction que l’origine de ce phénomène
dépasse les limites mêmes de la période historique ; car, si des
causes encore actuelles l’accélèrent, c’est à des temps plus lointains
qu’il faut attribuer le développement des vallées sèches si remarquables
dans cette région. Les plateaux de craie sont parcourus en tous
sens par des sillons sinueux qui prolongent les vallées ; parmi les
plus curieux, on peut citer au Sud-Est de Cambrai le ravin YVarnelle
qui prolonge la vallée d’Esnes jusqu’auprès de Clary et de Bertry,
ou bien encore le ravin du canal des Torrents qui vers l’aval se termine
à l’Escaut et vers l’amont pousse sa tête jusqu’au delàdeBohain
(pl. YIII). Si ces vallées sèches ont connu un écoulement régulier,
comment se sont-elles asséchées ?
En remontant ces dépressions, on observe que rien duns leur
topographie ne les distingue nettement des vallées ; par leur réseau
régulièrement ramifié, dont tous les éléments sont en parfaite continuité
les uns avec les autres et vont se raccorder naturellement avec
la tête des vallées arrosées qui leur font suite, elles se révèlent comme
une partie intégrante du réseau hydrographique. En réalité, elles
marquent une phase ancienne de son existence; elles rappellent simplement
une époque où le niveau de la nappe aquifère leur permettait
d’avoir des sources et des eaux courantes. Leur direction, comme
celle de tous les canaux d’écoulement, leur fut imposée parle s ondulations
ou les fractures de la surface ; les vallées préexistaient aux
rivières; le ravin Warnelle et le canal des Torrents, par exemple,
occupent des plis synclinaux. Ce n’est donc point par une différence
de nature et d’origine qu’elles se distinguent des vallées arrosées,
mais plutôt par une différence de régime, par l’arrêt de tout écoulement
permanent. Mais alors quelles furent ces eaux qui les animèrent
et les creusèrent? On se trouve en présence de plusieurs hypothèses1.
On peut admettre qu’à la suite d’une énorme augmentation
des précipitations telle qu’il s’en produisit certainement au début du
Pléistocène, les dépressions du sol livrèrent passage à des masses
1 Cf. Reid, 138. Dollf'us, 218.