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CAMBRÉSIS, BOULONNAIS, LAONNAIS, NOYONNAIS
L occupation romaine fit naître en Gaule de nouveaux groupements.
Par les routes, marchands et colons propageaient le commerce
et la culture. Comme l’administration suit l’homme pour le
protéger et le surveiller, on vit apparaître de nouvelles circonscriptions,
ou bien les anciennes se cloisonner, se dédoubler. Si l’on
passe de la Gaule Celtique à la Gaule Impériale, on remarque que
la liste des cités s'accroît; sans doute, si les documents le permettaient,
on verrait que leur première origine remonte loin ; mais leur
croissance définitive se rattache aux progrès récents de leùr population,
de leurs ressources, de leurs relations ; aux progrès de la colonisation
correspond une génération de cités. Comparons la liste des
peuples Gaulois dont parle César à la liste des cités sous Auguste
en 27, puis à celle que fournit entre 395 et 423 la Notitia provincia-
rum et civitatum, enfin à la division officielle du pays au vie siècle.
Entre la conquête de César et la mort d’Auguste, c’est Senlis qui
apparaît au milieu du Silviacum, sur les confins boisés de Beauvais,
de Paris et de Soissons; entre la mort d’Auguste et le règne d’Hono-
rius, ce sont les cités de Cambrai et de Boulogne ; au ve siècle, c’est
Laon ; au vie, Noyon.
Cambrésis.
Dans son ensemble, la cité de Cambrai ou diocèse de Cambrai1
s étendait sur le territoire des Nervii, ce peuple germanique que
César mentionne souvent. Cambrai se trouvait sur la voie romaine
qui menait au Rhin par Bagacum et Atualuca ; elle hérita de-Bayai
que les invasions avaient ruinée ; eile s’accrut encore par l’établissement
des rois h rancs.-Devenue capitale d’un diocèse (Civitas Cama-
racensium), elle étendait sa juridiction sur six arcliidiaconés : Cambrésis,
Hainaut, Brabant, Valenciennes, Bruxelles, Anvers, auxquels
correspondent dès le vu® siècle autant de divisions civiles. Or, c’est
à 1 archidiaconé de Cambrésis que correspond à peu près le pagus
Cameracensis, Cambresiaeum, le Cambrésis vulgaire. Rien ne fut
moins constant que l’étendue du Cambrésis. D’abord l’archidiaconé
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était plus étendu que le pagus ; il contenait le doyenné de Beaumetz
qui avant 1093 appartenait au diocèse d’Arras. Ensuite, sur ses frontières,
le Cambrésis perdit, lors de la constitution des comtés
d'Artois, de Vermandois, de Hainaut et de Flandre, certaines localités
qui restèrent cependant soumises aux évêques de Cambrai. Enfin le
comté de Cambrésis, donné en 1009 à l’évêque de Cambrai par l’empereur
saint Henri et réduit aux seuls doyennés de Cambrai et du
Cateau, ne concordait ni avec l’archidiaconé, ni avec le pagus. Au
reste, sur ces plateaux uniformes,, rien dans la nature ne pouvait
imposer aux limites quelque stabilité. Ici, comme en d autres points,
elles ont méconnu le tracé des vallees ; vers 1 Artois, elles dépassaient
l’Escaut ; vers le Hainaut, ni la Sambre ni la Selle n’ont
servi de limites naturelles : les territoires de Sart-1 Évêque, de Sart-
en-Cambrésis et d e 'la Groise formaient à l’Est de la Sambre des
enclaves du Cambrésis sur le Hainaut. Pendant longtemps, les forêts
lui firent une frontière, au Sud par l’Arrouaise, au Nord par l’Ostre-
vent; maintenant on passe du Cambrésis au Vermandois sans
aucun obstacle, sans même l’impression d’un changement. De même,
jamais rien n’a détaché l’Artois du Cambrésis ; ce sont, de part et
d’autre, les mêmes aspects naturels, les mêmes champs qu’ici la forêt
n’interrompait pas. Cette continuité naturelle n’échappe ni aux voyageurs
ni aux habitants. Les vieux noms d’Artois, de Cambrésis et de
Vermandois ne répondent plus à des realités ; on les remplace par le
Pas-de-Calais, le Nord et l’Aisne. Les services changent de chefs-
lieux ; les bureaux varient d’attributions et les fonctionnaires de résidence;
les circonscriptions se remanient ; mais rien dans ces vicissitudes
ne procède de la nature ; le Cambrésis n a pas de caractères
physiques, en propre ; c’est un terme historique.
Boulonnais.
L’essor de la cité de Boulogne date des relations de l’Empire
Romain avec la Grande-Bretagne. Port de guerre et de commerce,
passage commode vers la grande île, tête de trois voies romaines
vers Bavai, Cambrai et Amiens, étape des soldats puis des missionnaires,
Boulogne était au début du ve siècle le chef-lieu civil et religieux
d’une cité qu’on avait démembrée dp la cité des Morini. Le
territoire des Morini se décomposait dès lors en deux cités : Civitas
Morinorum (Thérouanne) et Civitas Bononensium (Boulogne). Contrairement
à la règle générale, l’Église n’a pas consacré cette division;
d’abord Boulogne ne resta pas cité épiscopale et passa sous 1 autorité