manque de continuité ; certaines régions n’en offrent que des lambeaux;
sur d’autres, il s’étale en couches épaisses ininterrompues; ces
variations sont en rapport avec l'architecture du sol et avec le relief.
On peut poser en règle que la continuité de la couverture limoneuse
est en raison directe de l’horizontalité du sol; elle varie avec la pente
et disparaît sur les surfaces très inclinées ; on comprend que ces
matières extrêmement meubles ne résistent pas au ruissellement et
que, des couches de limon, les premières enlevées furent celles qui
s étaient déposées sur le versant des vallées ; les bords de la Somme,
de la Selle, de là Noye, de l ’Avre ont été dégarnies de leur limon sur
de grandes étendues; d’une manière générale, partout où des pentes
rapides ont activé le ravinement de la surface, le limon a disparu. Par
contre, les surfaces plates l’ont conservé ; il se dispose en longues
bandes couronnant les plateaux qui séparent les bassins hydrographiques;
et comme la disposition du réseau hydrographique reflète la
disposition des plis de la craie, on peut dire que les lignes de gros
villages agricoles établis sur les bandes limoneuses sont une expression
vivante de la structure profonde du sol : ainsi s’échelonnent
entre le bassin du Thérain et le bassin de la Somme, Formerie, Grand-
villers, Grez, Crèvecoeur,FrancasteI,Froissy, W awignies,Fameclion,
Lieuvillers, Noroy, Bailleul-le-Soc ; entre la Somme et l’Authie, Beau-
quesne, Puchevillers, Candas, Fienvillers, Bernaville, Bèaumetz,
Longvillers, Yvrencheux; entre l’Authie et la Canche, Bonnières,
Quoeux, Le Quesnoy, Campagne ; entre le bassin de la Canche et le
bassin del’Escaut, Monchy-Breton, Ostreville, Vallmon, Tangry, Sains,
Fiefs, L aires. C’est le long de ces sommets plats que se répartissent
les meilleures terres ; les cultivateurs savent bien qu’en descendant sur
les pentes la charrue ne rencontre plus la même épaisseur de terre
franche et qu’elle retourne souvent d e là craie ou de l’argile à silex.
Mais il y a plus. Puisque la couverture de limon se maintient continue
lorsqu’elle se trouve hors de portée du ruissellement, toutes les
régions où les vallées seront espacées et les mouvement du sol rares
auront plus de chances de conserver leur limon; ainsi se sont formés
des pays comme le Yimeu et le Santerre, véritables régions naturelles
dont la caractéristique géographique, est l’uniformité même de
leur manteau de limon ; pour cette raison, elles furent de tout temps
les terres promises de la culture, les districts ruraux les plus populeux
de cette contrée agricole.
Le dépôt des limons de lavage sur les pentes et dans les dépressions
s’effectue sous nos yeux. Dans cette région de relief calme et
de sol perméable, les phénomènes de ruissellement n’ont pas la même
intensité qu’en d’autres pays plus accidentés mais 1s jgm t
de continuité. A la suite des orages, le limon ^ « e a u x ^ r a m é
les eaux sauvages, descend sur les pentes, puis se dépose dans les
creux. On observe couramment dans les campagnes que des creux
ou « cavées » se sont comblés parle s apports des grandes plmea,, le
vallons delà craie s’engorgent par le dépôt continuel des alluvions
que les eaux n ’entraînent plus; on en voit dont le fond tapisse de
L o n ne forme plus qu’une légère ondulatmnde la surface crayeuse ,
certaines « avalasses » ont jeté sur de méchants terrains tourbeux
des trésors de bonne terre. Le 4 mai 1865 près de Yendhuille
(Aisne), à la suite d’un gros orage, la vallée d Ossu reçut un dep
de 0m,25 de limon sur une largeur de 500 métrés et une longue
de 1 kilomètre. Parfois la violence des eaux déchausse des si ex ou
des morceaux de craie : le dépôt devient caillouteux ou calcaire.
En général, comme le limon dont il dérive, il est argilo-sableux;
souvent il s’accumule au confluent des vallons ou les argilieres
communales viennent l’exploiter ; on en tire la terre a pise humble
matière des chaumières rurales. Dans les vallées, il occupe le fl»ncle
moins raide, le moins exposé aux vents pluvieux. Toutes les val ees,
dirigéesN. S.ouN. O.-S. E.présententainsideuxversants.disparates,
l’un escarpé où la craie se montre souvent à nu, l’autre doucement
incliné, avec des champs sur ses pentes limoneuses ; c est le type de
presque tous les grands ravins, comme le ravin Warnelle ou bien le
vallon du canal des Torrents, qui sillonnent le Cambresis. Le contraste
se marque encore mieux dans certaines vallées larges ou e
versant limoneux s’étale assez pour porter des villages ; la vallee de
la Canche présente d’un bout à l’autre cette opposition des deux
rives ; à droite, des parois abruptes parfois taillées en falaise comme
à Frévent; à gauche, un large revêtement de limon avec des champs
de betteraves, de blé, de pommes de terre, des carrés de tabqc, des
arbres, des vergers, des pâtures, avec une chaîne de gracieux vi -
lages qui font de la grande route une véritable « rue » fraîche et
D e s c r ip t io n d e s lim o n s .
Le limon n’est en réalité qu’un ensemble de limons. L’étude stra-
tigraphique en a été faite avec une rare finesse d’observation Par l®s
géologues de Lille et de Belgique dans toute la région du Nord1. Elle
Ladrière, 92, 94, 9a. Rutot, 140. D'Acy, 1. Gosselet, 70 (1901)