Ces sables et argiles surmontent immédiatement la craie. Mais
ils sont surmontés eux-mêmes, sur le liane des « montagnes », par
une puissante assise d’autres sables très Uns, doux au toucher, présentant
à leur sommet une zone argileuse à peu près constante et
supportant le couronnement de calcaire grossier. Filtrées par le calcaire,
les eaux s’arrêtent à cette zone argileuse qui marque un premier
niveau de sources; puis, de nouveau reprises par la masse du
sable, elles ne s’arrêtent plus que sur les argiles du bas marquées
par un autre niveau de sources. Grâce à cette superposition de
couches alternativement perméables et imperméables qui contraste
avec l’homogénéité de la craie, l’eau, s’échappant sur la ligne de
contact, alimente toute une frange de villages de versants. Sur le
ilanc septentrional des montagnes de Liancourt et de Clermont, villages
et hameaux se pressent sur l’affleurement humide : Berthe-
eourt, Yillers-Saint-Sépulcfe, Marcilly, Montreuil-sur-Tliérain, Mat-
tencourt ; de même, à Yillers, Fayel, Grand-Courcelles, Nointel,
Crapin, Fay, Gicourt, Agnetz, Boulincourt. Le fait n’est pas moins
remarquable sur le versant méridional de la Montagne de Noyon,
attestant partout par la position des villages l’influence du filtre
sablonneux. Ce sable est loin d’être stérile et sec comme ceux de
Fontainebleau ; il fournit une bonne terre. Toutes ces pentes sablonneuses
fourmillent d’hommes. Exposées au Nord, elles fournissent
des «riez »incultes (riez de Cuigny, LaNeuville-en-Beine), pâturages
maigres semés d'arbres fruitiers, séjour de pauvres ménagers, de
carriers et de bûcherons. Mais, à l’Orient comme au Midi, elles sont
âprement cultivées ; elles composent ces terroirs de vergers, de ja rdins
et de vignes qui, au sortir des grandes plaines de la Picardie,
arrachaient un cri d’étonnement à Arthur Young : mélange pittoresque
où voisinent une pièce de blé, un carré de légumes, une tache de
trèfle, un lopin de vigne, souvent cultivés à la bêche par un peuple
de tout petits propriétaires ; la division du sol est poussée si loin que
les arbres de l’un se penchent sur la propriété de l’autre ; sous la
forêt des pommiers, des poiriers, des pêchers, des abricotiers, des
pruniers, des cerisiers et des noyers où parfois s’enroulent des
treilles, s’abritent mille récoltes variées qui se succèdent sans
relâche : ici, les asperges et le raisin de Laon ; là, les artichauts et
les haricots de Noyon ; partout, jusqu’à Clermont, tous ces produits
lucratifs de la petite culture qui ont mérité à la vallée du Thérain
entre Clermont et Creil le nom de « Vallée Dorée ». Rien n’égale le
charme de ces côtes ensoleillées et verdoyantes, à la fois vergers et
jardins, sillonnées dans leurs chemins creux par le va-et-vient labo