. être à 1163 ; établie pour protéger les molières de Routhiauville, de
Mondiaux et de Quend, elle portait le nom de Chaussée Duhamel :
rendue inutile par les digues plus avancées, on a cessé de l’entretenir
; mais son emplacement est bien marqué sur les cartes actuelles
par le chemin qui, du Muret, se rend à Routhiauville par les fermes
de la Grande Retz et de la Petite Retz. En avant de cette première
ligne de défense, les renclôtures ne tardèrent pas à se multiplier : la
molière de Routhiauville en 1461, la molière de Jean Gruber en 1462.
la molière d’Adrien devant le Pas d’Authie en 1475, les molières
Moyennes en 1511, la molière Neuve de Quend ou Bellevue en 1511.
les molières Graveronen 1530 et 1563, la molière Engagée en 1575'
la grande molière de Routhiauville en 1597, et bien d’autres encore
dont les chemins actuels retracent les contours (Enclos de la Blan-
quetaque, de la Briqueterie, de la Morette). C’est pour consolider et
souder entre eux tous ces travaux isolés que fut achevée en 1597
une seconde ligne de défense, longue de 2.250 toises, appelée le Royon
Battant en mer. Toutes les terres enfermées entre la Chaussée
Duhamel et le Royon Battant en mer composaient les domaines du
sieur de Retz et le territoire des hameaux ou fermes du Muret, de la
Petite et de la Grande Retz, de la Bonne Dame et du Royon. Ces
noms de lieux n ’apparaissent pas dans les textes du Moyen Age,
tandis qu’au contraire Routhiauville est cité en 636, Monchaux et
Quend en 998.
L ’Authie poussée vers le Nord-Est formant sans cesse de nouveaux
« relais », de nouvelles molières se trouvèrent à a renclore ».
Dès 1709, les habitants du Marquenterre en demandent l’autorisai ,
tion. Ce droit leur fut contesté par les propriétaires des fiefs de la
Motte et de la Retz, ensuite par le comte de Boulainvillers ; tandis
que le procès durait, une tempête éventrait le Royon Battant en mer
et compromettait non seulement les terres revendiquées par les
plaideurs, mais encore les terres rencloses depuis des siècles (1735).
On agit d urgence. Un arrêt du Conseil d’État rendu sur l’avis de
Chauvelin, intendant de Picardie (15 avril 1737) ordonna que, pour
garantir le pays des irruptions de la mer, on réparerait l’ancienne
digue et qu’on en construirait une nouvelle, plus près de la mer et
parallèlement à l’Authie. Comme la propriété des 1.274 mesures de
terrain a renclore était l’objet d’un procès, l’État avança 19.000 livres;
les régiments de Ponthieu et de Luxembourg fournirent des terrassiers;
ainsi fut achevée la troisième ligne de digues; en 1737, le
sieur de Châteauneuf devenait l’adjudicataire des nouvelles renclôtures
: la ferme de Châteauneuf date de cette époque. Enfin, comme
les alluvions s’étaient accrues pendant le xvme siècle, le comte
d’Artois, apanagistedu Ponthieu, ne tarda pas a ie s aliéner; en 1777,
il concédait au sieur de Lormoy 672 arpents de molières au delà delà
digue de Châteauneuf; une quatrième ligne de digues fermait vers
le Nord cette nouvelle concession. Depuis cette époque, l’Authie n’a
pas cessé de s’éloigner du Marquenterre, ni les renclôtures de la
suivre dans sa retraite : en 1860, le Domaine faisait construire la
digue qui longe la rivière en face de Fort-Mahon, et plus récemment
d’autres digues diminuaient encore le domaine de l’Authie.
Cet ensemble de digues, oeuvre de plusieurs siècles, formé
l’enceinte du pays contre la mer. Mais la sécurité serait incomplète
sans un système bien combiné d’écluses et de canaux d’écoulement.
Le dessèchement.
Sur le sol imperméable et plat des Bas-Champs, les eaux de pluie
s’écoulent avec peine. Pendant la saison humide, le pays fut longtemps
inabordable et malsain. Au xvme siècle encore, certains
chemins restaient impraticables neuf mois de l’année. En été, les
villages manquaient d’eau potable. Un cultivateur qui habitait les
marais et venait payer son fermage à son propriétaire disait : « Dans
trois mois je ne pourrai pas venir, car c’est l’époque où j ’aurai les
lièvres. » De Ponlhoile à Rue et à Yillers, le pays était couvert .
d’étangs, entretenus artificiellement pour la pêche, qui portaient les
eaux à un niveau élevé et maintenaient l’inondation sur tous les
terrains bas des environs1. L ’oeuvre du dessèchement, entreprise dès
le Moyen Age, mais compromise par des intervalles de négligence ou
d’abandon, n’est achevée que depuis fort peu de temps. Elle dépendait
non seulement de la perfection de l’égouttement, mais encore du
système d’écluses destiné à assurer vers la mer le débouché des eaux
de l’intérieur.
Le drainage des Bas-Champs de Cayeux, de Lanchères, de Bru-
telles et de Woignarue s’opère vers la baie de Somme par deux
grandes « courses » rectilignes qui s’unissent .au-dessous de la ferme
Yatel; les eaux de l’ancien « Hâble d’Ault » et des « haulles » ou
courants d’Hautebut et d’Onival viennent les rejoindre. La plupart
des travaux furent exécutés à partir de 1770. Un réseau compliqué
de fossés, d’égouts et de courses, que traversent les chemins sur une
multitude de ponts et de ponceaux, divise le pays en petits rectangles
' Lotîls, 560, p. 327. — Arch. Nat. R1 103, 705 et R* 106 (Registre, p. 2).