franche où le blé succède à la betterave dans l’assolement. Les
plantes industrielles l’ont portée de nos jours au plus haut degré de
culture intensive. Elle vaut de 800à 1.S00 francs de plus par hectare
que le bief; elle atteint des rendements de 50.000 kilogrammes de betteraves
à sucre, de 35 à 40 hectolitres de blé, de 50 à 60 hectolitres
d’avoine, de 10.000 kilogrammes de foin (luzerne ou trèfle)1. Avant
même son utilisation savante et intégrale p a rla culture moderne, cette
terre féconde avait exercé son attrait sur les hommes; elle porte les
groupements les plus anciens et les plus forts. Tandis que, sur d’autres
sols, c’est l ’eau qui afîxéles villages, on peut dire qu’ici e’est la terre. Si
nous considérons les limites des communes, nous constatons que les
communes des vallées cherchent à s’étendre sur les plateaux pour y
cultiver des parcelles de terre franche ; par contre, il est rare de voir
une commune de plateau descendre daus la vallée pour y revendiquer
de l’espace; en réalité, la grande fortune de ces contrées
s’étale à la surface des plateaux, et non pas au fond des vallées ; les
colonies humaines se groupent sur les lieux mêmes où la terre est
la peilleure.
1 Risler. Géologie agricole, IV, p. 152-134.
CHAPITRE V
L E CLIMAT
I. Les influences g énérales : les vents, la tem p é ra tu re , l ’h um id ité - — 9 L’aspect
des saisons : l’h iv e r, le p rin tem p s , l ’été, l ’au tom n e .
Entre les hauteurs du Boulonnais et du pays de Bray, par la
vallée de la Somme, s’ouvre vers la Manche une longue plaine qui
s’étend vers l’Est jusqu’au relèvement de la Thiérache et de l’Ardenne ;
elle s’éloigne peu à peu de l’influence maritime pour se rapprocher
de conditions plus continentales. Très peu accidentée, pauvre en
contrastes climatériques, elle n ’offre point aux vents d’obstacles
imposants; les pentes n’y connaissent pas, comme dans les montagnes,
la brutale inégalité d’un versant déshérité et d’un versant
privilégié par les rayons solaires. Vers ses limites, elle se fond sans
choc brusque avec les x’égions voisines. Sur ce territoire sans frontières
et sans barrières, les influences se jouent sans contrainte.
Nous ne sommes point dans le domaine d’un climat original, aucune
cause météorologique n’est assez puissante pour donner à ce pays la
propriété d’un ciel particulier. Nous nous trouvons plutôt dans une
zone de transition où la nature du climat infiniment complexe et
variable, exempte de contacts tyranniques et d’orientations exclusives,
résulte à la fois d'une dégradation progressive et d’un déplacement
incessant des influences météorologiques; elle provient moins de
leur opposition que de leur fusion, moins d’une domination que d’un
partage. Sur cette terre si monotone à d’autres égards, si uniforme
par le relief et le sous-sol, le climat ne cesse pas, au courant de
l’année, de semer des nuances; l’oppression d’une cause dominante
aurait éteint toute variété en astreignant l’homme aux mêmes cultures,
aux mêmes travaux ; au contraire, au sein d’une atmosphère instable
à tout moment sans cesser d’être clémente, se succèdent tour à tour
à travers les saisons, mille circonstances diverses de température et
d’humidité qui, en créant la possibilité d’un riche paysage agricole,
fournissent à l’homme les occasions d’un travail multiple ; le climat