les forêts de Carnelle et de Thelle au vie siècle ; les abbayes de Saint-
Flay ou Saint-Germer (680 ou 661) les forêts de Bray et de Thelle ;
Saint-Dénis et Saint-Waast. d’Arras (fin vu6 siècle) la forêt de Goe-
-selve; Noyon (641), Corbie, Sithiu et Brétigny, la forêt de Beine;
■Saint-Remi et Saint-Nicaise de Reims, Saint-Vincent de Laon, la
forêt de Thiérache ; Saint-Fursy de Péronne et le Mont Saint-Quentin
¡(643-660), la forêt d’Arrouaise ; Corbie (687-662) la forêt de Vicogne;
iSaint-Valery (614-627), les forêts du Yimeu ; Cenlule (640), Forest-
montiers (640-678), Saint-Josse (793) la forêt de Crécy; Sithiu,
Samer et Auchy-les-Moines, les forêts des Morins et du Boulonnais.
Grâce aux religieux de Lobbes (640), de Crespin (647), de Wallers
(687), d’Hautmont (647), de Mons et de Maubeuge (681), de Maroilles,
deDompierre, de Saint-Ghislain (vne siècle) etdeLiessies (vme siècle),
1 immense Forêt Charbonnière fut demembrée en plusieurs massifs
boisés. On peut se faire une idée du travail accompli par l’importance
des propriétés de ces abbayes; les exploitations dépendant deSaint-
Riquier1 se répandaient dans tout le Ponthieu entre la Somme et
1 Authie et jusque dans le Vimeu ; de même les possessions de Saint-
Waast et de Corbie portaient jusqu’en de lointaines campagnes les
exemples d’un travail méthodique. Mais cette oeuvre de culture fut
arrêtée par les invasions normandes.
Le x et surtout le xi* siècle virent reprendre la colonisation par
les moines2. Ce fut une époque de-nnise en valeur dont la contrée
n a plus revu d exemples avant le xixe siècle. Les grands propriétaires,
les rois, l’Église, les seigneurs cherchent à augmenter les
revenus de leurs terres ; ils en confient l’exploitation aux religieux,
agronomes actifs et intelligents. Non seulement les rois leur accordent
des parties de forêts à défricher, comme Philippe-Auguste qui
remit en 1220 aux religieux de Saint-Denis en France l’essartement
des bois situés entre Estrées-Saint-Denis et Cressonsacqs, mais encore
ils affranchissent les habitants qui consentent à y travailler; ainsi
se développe la classe des petits cultivateurs, attachés à leur champ,
qui est encore aujourd’hui le trait original de la culture en ces pays'
Cette seconde génération de travailleurs monastiques marque une
seconde période de conquêtes agricoles. Les massifs forestiers se
réduisent et se disloquent. Les plus larges entailles paraissent avoir
été ouvertes dans l’épais rideau d’arbres qui s’étendait depuis la
Thiérache jusqu’à la Manche en passant par l ’Arrouaise et la forêt
! H é n o c q u e , 550, II, p . 482 e t ssq .
4 Don G re n ie r, 414, p . 72 e t ssq .
3 Don G ren ie r, 414, p . 74.
de Crécy. Entamé par Corbie, Saint-Waast, Mont-Saint-Quentin,
Honnecourt, le défrichement de l’Arrouaise1 fut poursuivi par les
abbayes de Fesmy, de Saint-André, du Cateau du M°nt-Sw
Quentin, de Vaucelles, d’Eaucourt et surtout par Samt-N colas d Ar-
rouaise fondée en 1090. Les fonds défrichés restaient le plus souvent
sous la dépendance des seigneurs; on desservait le sart comme un
fief et il y avait des paysans sartaires ; en 1190, un abbe, ayan
affranchi certains serfs àCurlu, déclara que dans la suite ils seraient
regardés comme sa rtaires2. Les défrichements amenaient meme
entre les propriétaires voisins des contestations au sujet de la propriété
des nouvelles terres, comme en 1170 entre le chapitre d Arras
et l’abbaye d’Arrouaise3. Souvent aussi les seigneurs abandonnaient
aux moines défricheurs une partie des essarts; la reserve du cham-
part, qu’ils stipulaient en échange de la faculté de defncher, leur créait
dans la suite de nouveaux revenus. Les abbayes étaient de ven tab es
entreprises de culture, à qui les propriétaires faisaient appel pour
améliorer leur “capital foncier. Les morceaux de foret concédés
étaient parfois fort étendus, comme ces 1.800 journaux accordes
vers 1160 dans laforêtde Vicogne par Gui Camp d Ayesne et Gérard
de Picquigny pour l’établissement des fermes du Val des Maisons .
La tentative devait être bien forte d’accroître ses revenus avec la
rente de nouvelles terres; il faut même croire qu il y eut a certains
moments une réaction contre cette fièvre de defnchemen , car
en 1243 le seigneur de Beauval s’engage à l’égard des éclievins
de Doullens à ne pas défricher (extirpare nec essartare) le bois du
Deffois6. . ft. i
Autant que les documents permettent d’en juger, les conquêtes de
la culture furent immenses à cette époque. Presque toute la foret de
Vicogne disparut par l’oeuvre des abbayes de Citeaux et de Piemontré;
ainsi se formèrent vers 1130-1160 les fermes de Malheureux,
de Septenville, du Val des Maisons, de R o s e l , de Valvion d Olincoui t,
de Savières, au fur et à mesure des concessions accordées aux re
montrés de Saint-Jean d’Amiens6. Vers la même époque, autour d Or-
1 Gosse 543, p. 1-60 passim à propos du défrichement de l’Arrouaiso.
s I n mialité'de « s a r t a i r e » semble bien indiquer quelque avantage ; mais nous ne
savons pas en quoi consiste cet avantage. Lamprecht n’en dit rien, dans se^ t u d e s sm
l élat éc'onomiq'ue de la France pendant la première partie du Moyen Age. (Tiad. Man-
gnan), Paris 1889.
8 Cartulaire du Chapitre d’Arras, p. 29.
1 Bouthors, 504, I, p.. 274.
8 Beauvillé, 477, I, p. 23.