parts et ses portes l'impression d’une citadelle. Sur sa haute hutte
couronnée de murailles, Saint-Valery semble encore surveiller l’entrée
de la Somme et défier l’escalade.
Quand on pénètre au cour de ces anciennes forteresses et qu’on
Fig- 36. — La Fère, ville de défense, au milieu d’une large vallée,
au confluent de l’Oise et de la Serre.....
gravit parmi 1 entassement des maisons les ruelles obscures et incommodes
qui conduisent au sommet, on est obligé d’admettre que, si
cette position fut à certaines époques recherchée de parti pris pour
mettre la ville a 1 abri d une attaque, elle ne saurait convenir au fonctionnement,
ni au développement des organes d’une cité; on y
manque d’espace, d’air, de lumière, parfois d’eau et de pierre. Toutes
ces villes sont des machines de guerre, des oeuvres artificielles où
les lois naturelles sont violées. La chose est matériellement prouvée
à Montdidier. En effet les monuments, la tradition et les documents
attestent que jadis la plus grande partie de la ville était située dans
la vallée ; les églises Saint-Martin et Saint-Médard, maintenant isolées,
se trouvaient aux xne et xme siècles dans l’intérieur de Montdidier;
le château était sur la hauteur, la ville dans la vallée. G est au
xve siècle, à partir des guerres des Bourguignons, que les habitants
abandonnèrent la ville pour se réfugier entre les murailles de la ville
haute dont les rues furent pavées avec les pavés et les grès arrachés
dans la ville ba sse1.
Le type le plus original à la fois et le plus commun des emplacements
fortifiés ne se rencontre pas sur les hauteurs, mais au
milieu des étendues marécageuses des vallées. Ce qui éloignait les
villages attirait les places fortes ; pourvues de moyens d’action plus
puissants, elles pouvaient triompher des obstacles naturels et même
les faire servir à leur défense. De là, ces places fortes de vallées inondées
dont on trouve les exemples non seulement à Amiens, à Abbe-
ville, à Péronne, à Ham, à La Fère (fig. 36), à Beauvais, mais encore
dans le Bas-Pays, à Aire et à_Saint-Omer. La même disposition, un
peu moins complète, se retrouve à Bouchain, defendue au Sud et à
l’Est parles marais de la Sensée et les écluses de l’Escaut, et à Arras
protégée vers le Nord par la vallée de la Scarpe. Dès sa fondation,
Amiens grâce aux eaux de la Somme, de l’Ayre et de la Selle et
grâce aux marais inondés de la vallée se trouvait enfermee dans une
ceinture d’eau qui rendait son accès difficile. La position de Beauvais,
au milieu de sa vallée, au confluent du Thérain et de 1 Avelon,
rappelle par ses avantages celle d’Amiens. Péronne, au milieu de ses
marais à peine franchissables, passait pour imprenable. On comprend
que la vallée de la Somme, avec quelques fortes têtes de pont
et ses rares passages, formait jadis un puissant rempart naturel .
de là,-son importance dâns les guerres entre les rois de France et
les souverains de la Flandre.
Mais cette ceinture de marais, pas plus qu un refuge élevé sut
les hauteurs, ne pouvait convenir an libre développement des
villes. Le passage d’une grande route excepté, elles n avaient aucune
raison de se confiner dans un milieu malsain et incommode. Il est
prouvé pour P é ro n n e2, pour Hesdin8 et pour Abbeville4 que les
villes primitives n’occupaient pas cette situation au milieu des eaux.
A Péronne, la première agglomération avait formé sur la rive gauche
de la Somme un village appelé Sobotécluse ; c’est au moment des
1 Beauvillé, 476, I, p. 5-11.
s Vallois, 389, p. 1-3,71-115.
3 Thierry, 588, IV, p. 1-6; Louandre, 564, I, p. 77-79 ; Prarond, 380, VI, p . 19-32.
4 Atlas des villes de Belgique, 8« livraison.